Une vieille connaissance...[FINI]

Un soir d’automne arrivait, la vie devenait silencieuse petit à petit, à mesure que les rayons du soleil diminuaient, les Pokémons héliophiles se taisaient et rentraient dans leur abri, afin de profiter de la nuit pour dormir. Tandis que les sciaphiles, ceux qui préféraient l’ombre à la lumière, commençaient peu à peu à sortir de leur tanière.

Giovanni Sakaki, chef destitué temporairement d’une organisation ayant sévi pendant de longues années et ayant été, un temps, la plus crainte au monde, se comportait tels ces Pokémons nocturnes sortant une fois la lune dominant le ciel.

L’homme marchait paisiblement dans une sorte d’immense bosquet dans la région de Kanto, son Persian à ses côtés, et profitait de la noirceur du ciel pour contempler les étoiles, à des milliards de kilomètres de lui. Cette sensation de petitesse l’irrita, et il détacha donc rapidement son regard des astres. Non, décidément le Boss n’appréciait vraiment pas voir quelque chose, ou quelqu’un, se trouvant plus haut que lui. Ce qui lui posait problème ces derniers temps…

Autrefois, le Gym Leader pouvait sans problèmes arriver dans un grand hôtel et réclamer une chambre, il l’avait dans la seconde, ou bien partir jouer au casino, tous les jetons tombaient à ses pieds, ou encore simplement débarquer sur une place bondée de monde, on le reconnaissait, et l’admirait… quand il avait encore son titre de Champion de l’Arène… ou craint quand on connaissait sa réelle identité. Mais désormais, tout était différent. Sakaki avait même de la peine à aller dans un grand restaurant pour manger quelque chose de raffiné, pas qu’il devait se serrer la ceinture, mais parce qu’il se devait de rester anonyme. Il n’était plus rien. Rien. Officiellement c’était un cadavre, une poussière finie ayant fait son temps, quelque chose de bien inférieure à ce qu’il avait pu être dans ses moments de gloire…

Cette idée lui occasionnait des colères internes fortes, auxquelles il répondait par un petit verre de whiskey. Cependant, il savait que ce n’était pas en buvant et en se lamentant qu’il prendrait sa revanche et regagnerait sa place dans le Pokémonde. Au contraire, il fallait qu’il aille de l’avant, il avait les outils pour, ayant gardé de côté une bonne petite fortune personnelle « au-cas-où », et s’étant rallié avec lui un des meilleurs éléments dans son domaine ; Garth Maise, son ami d’enfance.

D’ailleurs, il se demandait bien ce qui lui était arrivé… Voilà depuis plusieurs années qu’il n’avait eu de ses nouvelles… Il ignorait même la raison pour laquelle celui en qui il avait le plus confiance était parti avant que la Team Rocket ne chute violemment. Peut-être avait-il senti la dégringolade ? Qui sait… Sa présence lui aurait été bénéfique s’il avait été là, et il pouvait l’avouer, son ami lui manquait, à sa façon.

Perdu dans ses pensées, Giovanni arriva rapidement devant la grotte bien camouflée, se situant au plus profond de la grande forêt. Cette caverne semblait banale, avec peu de profondeur, bref un simple abri pour Pokémons et animaux…. Mais, en réalité, elle n’était pas aussi rudimentaire que la nature aurait voulu qu’elle soit. En effet, elle contenait un mini laboratoire de recherches ainsi que des toilettes, une cuisine, bref de quoi vivre. L’ex-champion de Jadielle avait jugé bon d’aménager un peu son Q.G, en quelque sorte. Mais il avait pris des précautions : il avait fait recouvrir une porte géante à l’allure de pierre quelques mètres après l’entrée de la grotte, lui donnant l’apparence d’une mini-cavité sans profondeur, pour cacher au mieux son Quartier Général.

Sakaki tenta de repérer une pierre spéciale planquée dans l’herbe, avec l’aide de son fidèle compagnon. Persian la trouva plus aisément que son maître, ayant une meilleure vision nocturne. Le Pokémon appuya dessus le caillou, et permis à la porte cachée de s’ouvrir.

Ainsi le Gym Leader pénétra à l’intérieur, Persian à ses talons, et quelques secondes après, la porte se referma. Giovanni alluma la lumière et constata que rien n’avait changé depuis la dernière utilisation de la planque. Donc personne ne l’avait découverte, ce qui soulagea quelque peu l’homme.

Machinalement il alla se servir un verre de rosé dans l’armoire, puis il se posa sur un canapé en cuir aménagé devant la porte d’entrée du laboratoire. Sirotant tranquillement son breuvage alcoolisé, le chef de la Team Rocket voyait défiler en lui de vieux souvenirs. Notamment la période où avait débuté son amitié avec Garth. Ou encore, quand il arrêtait le travail pour rejoindre Lisa, avec Silver dans les bras, car oui de temps en temps il le prenait pour s’occuper de lui avec sa femme. Les bons moments de la Team Rocket, aussi revenaient dans sa tête. Ces souvenirs revigoraient sa rancune quant à sa défaite. Il aurait aimé que les choses durent plus longtemps, que tout se soit déroulé comme il l’aurait souhaité, tant au niveau familial que professionnel.

Avant tout lui était permis tout lui était possible, il était LE chef, LE détenteur du pouvoir… mais maintenant… plus rien ne lui appartenait vraiment, même pas ses propres enfants.

Giovanni grimaça et finit cul-sec son verre de vin, puis le déposa sur la table devant lui.

Tout cela le tracassait. Et comme si ce n’était pas suffisant, il y avait autre chose qui perturbait ses nuits… Il pouvait nettement se rappeler avoir désiré de toute son âme une chose, autre que le monde, une chose vivante, mais il ne savait pas du tout ce que c’était. Cette drôle de sensation lui était venue après s’être retrouvé, avec ses troupes de combat et Domino à ses côtés, au milieu d’une montagne, sans savoir ce qu’il faisait là-bas ni pour quelles raisons il était venu se perdre sur un immense bloc de roches. Autre chose étrange, Sakaki était incapable de détailler certaines recherches sur Mew… qui pourtant, avait été LE projet de sa vie. Il savait juste que la mère de Jesse avait perdu la vie dans une expédition, sous les yeux de Garth, et qu’ils avaient trouvé une pierre contenant l’ADN de la créature légendaire… mais pour la suite, Giovanni ne savait rien. Il lui était d’ailleurs impossible de retrouver les rapports ou les constatations des recherches des scientifiques… Les scientifiques eux-mêmes semblaient avoir disparu de la mémoire du Boss.

Toutes ces choses créaient en sa tête un tourbillon d’idées floues et peu claires, l’alcool n’aidant pas, même à toute petite quantité. Alors le chef de la Team Rocket, mit ses mains contre son visage, ferma les yeux pour calmer l’ouragan que subissait son cerveau.

Invité

[La grotte est à la jointure de Johto et de Kanto, donc avant la route victoire… si c’est nécessaire de le relocaliser soit, mais c’est assez compliqué de poster dans le bon endroit dans cette situation, désolées!]

« Avez-vous déjà vu cet homme? »

Commencer par poser la question à Johto. C’était l’endroit où les gens étaient le moins susceptibles de se souvenir de la tête d’un homme qu’ils n’auraient vraisemblablement vu que dans le journal, le moins frais dans leur mémoire.
Trois années, ce n’était pas beaucoup. Des petits malins qui se souvenaient de l’affaire, ou qui avait déjà vécu la période de gloire de l’homme, auraient pu mentir ou voir leur mémoire se déformer rien que pour plaire à cet homme étrange qui venait se rendre aux centre Pokémons et posait cette question à tout le monde, plusieurs photographies anciennes à la main.

Il fallait que Garth use de sa logique et se mette à penser comme lui pour le retrouver.
Qu’aurait-pu faire un amoureux de la renommée comme Sakaki-sama pour changer radicalement ses habitudes et ne plus se montrer aux yeux du monde? Très certainement l’inverse total de son point de vue.
Avec le type de pokémon qu’il affectionnait, se cacher dans une grotte. S’éloigner de Kanto, où la population qui l’avait souvent vu au travers ne serait-ce, pour les plus incultes, des informations régionales. Garth avait deux solutions. L’exil total… ou le simple éloignement. Dans le premier cas, ses recherches mettraient plusieurs années… Et il lui faudrait aller chercher dans les archives des transports maritimes. Utiliser un pokémon pour voler était toutefois long et compliqué, si Garth se permettait de le faire, c’était parce qu’il adorait faire des longues pauses à explorer les alentours… Et il se doutait qu’un homme cherchant à perdre ses traces n’userait pas de patience.
Il le retrouverai, ça, ce n’était pas un problème. Mais ce serait long, très long. D’ici là, Garth n’était pas sûr que sa motivation tienne jusqu’au bout.

Pourquoi exactement voulait-il le retrouver?

Il avait quitté la Team Rocket sans dire un mot. Mewtwo était une partie de la réponse, une infime partie comparée à celle qui voulait que Garth ne voulait pas être suivi en rentrant chez lui, aucune envie de mêler ses parents et son village natal à tout cela.
Puis il avait assez d’argent pour élucider ce mystère qui l’avait bercé toute son enfance, explorer la tour. Il l’avait fait, mais sans la peur que la Team Rocket gâche tout. … Ils étaient son porte monnaie, même si Giovanni était aussi son ami. La lucidité n’empêchait pas l’amitié, mais elle avait insinué en son cœur une certitude: s’il voulait que les choses aient un risque moindre d’être abîmées, il avait autant intérêt à ce que la Team ne le sache pas.

La fameuse Team Quetzacoalt, dont il avait lu les nouvelles dans le journal, l’intriguait autant qu’il s’en méfiait. D’abord, ils en voulaient apparemment à… « L’oiseau de feu »? Cela pouvait indiquer plusieurs Pokémons légendaires. Mais sans aucun doute ça en concernait un. Pas que Garth ne connaisse pas le désir effroyable d’en voir un, un jour, de le connaitre mieux, pour l’avoir ressenti; pas qu’il ignore la soif de pouvoir des hommes.
Giovanni n’était pas derrière tout ça. Ou il aurait fait appel à lui. Si les agissements de la Team Rocket quand ils cherchaient Mew, et envers Mewtwo, étaient déjà scandaleux, Garth craignait pour celle de Quetzacoalt. Ces fous avaient fait exploser un parc d’attraction, bon sang!
Il voulait les arrêter. Un désir de fou, et il y arriverait pas seul. Il lui faudrait un mécène fortuné, des hommes et… une arme. Cette arme, il la connaissait pour avoir fait partie de ceux qui l’ont créée… Et ce fortuné, il le cherchait en ce moment.

Heureusement son investigation porta bien vite ses fruits.
Le simple éloignement était la réponse à sa question, et ça valait mieux. Garth, se connaissant, aurait été capable de finir par craquer… Le taux de réponses s’accrut quand il approcha de la Route Victoire. Beaucoup de perdants de la Ligue s’y reposaient, et plusieurs d’entres eux lui signalèrent avoir eu l’impression d’être observé, alors que des commerçants confirmaient que longtemps auparavant un homme qui correspondait à peu près à ce signalement était venu.
Garth se déplaça de nuit. Plus de risques de rencontre avec des Pokémons sauvages, et combattre n’était décidément pas son truc, mais plus de chance aussi de voir Giovanni qui devait sûrement agir le soir lui aussi.
Sa chère et belle amie Gardevoir, plus une agréable compagnie qu’un pokémon, se déplaçait en lévitant à côté de lui. Et puis ça lui faisait de la conversation. Evidemment, elle ne répondait pas, mais lui avait l’impression de ne pas parler dans le vide, elle hochait la tête et le protégeait ainsi de près.
Il campa dans la zone, en prenant soin de faire le moins de bruit possible.

Un pisteur, un traqueur. Jour et nuit, sans relâche. La moindre trace d’humain subtilement cachée, mais trouvée par Gardevoir, aurait été parfaite. Combien de fois Garth rencontra-t-il des restes tellement évidents d’humains qu’il se jura d’un jour se rendre à la Ligue Pokémon et pourrir tous les passants, des campeurs et des aventuriers, à ce qu’il paraît, mais ne dissimulaient même pas leurs excréments! Ah, mais vraiment… Quelle bande de cochons, grogna Garth en ôtant une boite de conserve que montrait Gardevoir d’un air intrigué.
Il commençait à douter que son ami soit ici… mais les témoignages concordaient, et il devait sûrement s’éloigner. Puis, il n’avait pas encore entendu d’eau, et il devait forcément rester près d’un point d’eau ne serait-ce que pour la boisson…
Une semaine, la chasse dura.
Jusqu’à ce qu’un jour, il trouve enfin ce point d’eau. Oh, il y en avait eu plusieurs, mais ils étaient par trop exposés et voisins de forêts pour qu’un humain puisse espérer s’y reposer sans être constamment attaqué…
Deux cascades, provenant de l’intérieur d’une grotte. Improbable qu’il se soit installé dedans… Mais dans les alentours, pourquoi pas?

Garth était persuadé que s’il était quelque part, c’était par ici.
Et puis, il ne devait pas être perçu en ennemi. Au contraire, il devait presque se montrer comme vulnérable, pour que son ancien supérieur pense avoir toujours le contrôle.
« Désolé beauté. Promis, je ne t’y garderai pas longtemps… juste le temps de m’assurer qu’un Rhinoféros ne va pas te foncer dessus, d’accord? » murmura-t-il à Gardevoir, en souriant, tirant de ses poches de bandoulières sa poké ball. Elle baissa la tête, puis acquiesça.
« Brave fille, » fit-il en la rentrant. Puis, il essaya de se relaxer. De se concentrer sur les bruits extérieurs, tant pour déterminer les réactions de ses actes, que de repérer un éventuel assaillant.

« Sakaki-sama? » se contenta-t-il de répéter plusieurs fois, en appelant.
Pas trop fort, toutefois. Pas question d’éveiller tout le quartier.

« Sakaki-sama ? »

Cette voix familière résonna en écho dans la tête de l’interpelé, qui ne réagit pas en l’entendant, persuadé qu’il s’agissait d’ un produit de son imagination. Il avait repensé à son vieil ami, et voilà qu’il entendait le son grave de ses cordes vocales… cela ne pouvait qu’être qu’une illusion, comme il lui en arrivait de temps en temps avec Lisa. Cependant… le son se répéta, sans qu’il soit trop fort, comme si son ami Maise était dans le secteur, la résonnance étant facile dans la grotte.

Intrigué, mais persuadé d’une hallucination orale, Giovanni se leva, et sans grande conviction ouvrit la porte secrète de sa cachète, recommandant à Persian de rester à l’intérieur [après tout ne sait-on jamais… et le Pokémon était tout ce qui lui restait], puis sortit.

L’air était devenu légèrement plus frais depuis son arrivée, et l’obscurité s’épaississait de plus en plus. Sans trop s’éloigner de la caverne, Sakaki s’avança un peu et scruta les environs. Il ne voyait rien, ou du moins pas grand-chose, si ce n’était les contours des arbres, et quelques petites ombres rampant par terre, s’agissant de pokémons nocturnes.

« Sakaki-sama ? »

L’écho de la voix retentit dans les oreilles du Boss, et indiquait en même temps sa provenance. Elle se situait proche d’une cascade, un petit peu plus loin de la grotte. Alors, Giovanni s’éloigna pour voir s’il s’agissait réellement d’un tour de son imagination, ou pas, malgré les miaulements plaintifs de son Persian qui le regardait partir au loin, devant l’entrée secrète. Mais Sakaki le fit taire par un mouvement de main, et continua sa route.

A ce moment, les interpellations s’arrêtèrent, ce qui eut pour effet de faire perdre le chemin à suivre au Gym Leader. Allant à l’instinct, il décida de poursuivre tout droit, vers une cascade qu’il pouvait entendre. Plus il allait de l’avant, plus le Boss remettait en question la réalité de ce qu’il avait ouï… plus il pensait donc à une méchante hallucination venant de son subconscient.

Mais heureusement, une silhouette, marchant au hasard, dans les bois, prouva le contraire. Et à nouveau, cette ombre l’appela.

Il n’y avait plus aucun doute. Giovanni s’était stoppé net, sa respiration devint légèrement haletante. C’était comme… s’il voyait un fantôme ressurgir de son passé, un spectre qui lui faisait plaisir de voir pourtant. Sakaki avait beau ne pas pouvoir distinguer parfaitement le physique de son ancien collaborateur, et ami, il savait que c’était lui. La voix ne pouvait le tromper, la démarche non plus, mais surtout ces cheveux blancs contrastant avec le noir environnant, et la petite tâche également blanche se trouvant sous son menton, qu’on pouvait deviner être une barbiche. A l’époque où le scientifique Maise s’était séparé de la Team Rocket, il commençait à se laisser pousser une petite barbe, et elle avait quelque peu poussée apparemment.

Voilà, celui dont il avait intérieurement regretté l’absence quelques minutes auparavant était devant lui, à quelques mètres seulement, mais ne pouvait pas le voir, Giovanni ayant sorti un smoking noir se confondant avec la nuit.

Il profita de son camouflage pour s’approcher de plus près du savant, et une fois arrivé à une distance suffisamment raisonnable pour ne pas lui refiler un infarctus, Giovanni fit signe de sa présence.

« Cela faisait longtemps… vieille branche… »

L’ancien champion de Jadielle porta un regard vers la tête noire par l’obscurité de l’homme, et afficha un sourire à peine visible.

Ils avaient des choses à se raconter, oh oui, beaucoup de choses.

Invité

« Cela fait longtemps… vieille branche. »

Garth n’avait pas entendu Giovanni s’approcher.
Après tout il n’était pas un pokémon, ses instincts, ouïe, vue et odorat n’étant pas aussi développés qu’eux (heureusement sinon il aurait été un monstre), son manque d’attention était excusable.
Le chercheur soupira de soulagement.

« Vous n’imaginez pas depuis combien de temps je vous cherche, Sakaki-sama. »

Il marqua ses mots en inclinant du chef, en marque de respect. Normal qu’il ne l’ait pas vu, aussi. Se camoufler dans le noir… bonne idée. A retenir.

Puis il détailla son ancien supérieur en attachant sur lui et son allure générale ses yeux d‘azur.
Giovanni n’avait pas l’air misérable, et Garth constata sans jalousie qu’encore une fois, en ce qui concernait la pratique, son ami était supérieur. Trois ans en vadrouille, dans la nature, à se cacher, à plus de quarante ans, et il avait l’air en pleine santé. En tout cas surement plus que l’allure que lui, Garth, avait après seulement trois semaines perdu dans la nature, à quinze ans.
Un maître, vraiment.

« Vous semblez en très bonne forme… »

Pour quelqu’un qui a été cru mort pendant trois ans, a-t-il pensé, mais n’a pas osé exprimer.
La réalité était que Garth n’y avait jamais cru. Giovanni, ne pas mourir de vieillesse? Mais c’était une aberration. Pas impossible… Mais il savait que ce n’était pas arrivé. Pourquoi?
Mais parce que Garth avait encore besoin de son ami, tout simplement. Leur collaboration n’avait pas abouti au projet final, il ne lui avait pas fourni la puissance absolue, et lui, ne lui avait pas encore donné les moyens de trouver la réponse à la question existentielle du chercheur.
Donc, Giovanni n’était pas mort. Aussi simple que ça.

Revoir son supérieur et ami après une disparition de plusieurs années, n’était pas une situation dans laquelle Garth trouvait naturellement les faits et gestes à accomplir.
L’homme confiant qu’il était devenu, maître en ses lieux de ses possessions, lui disait d’agir comme il en avait envie et tout simplement d’adresser une accolade fraternelle, disant à quel point il était soulagé et heureux de le revoir.
Mais le timide et nécessiteux gamin qu’il était et qui devait, littéralement, sa vie à Giovanni sans qui il ne serait resté qu’un employé de centre pokémon sans moyen d’assouvir ses ambitions pour le reste de sa vie, voulait rester poli, distingué, et commencer par offrir ses services au chef de la Team Rocket.
Tout ça se résumant en la question qui tue, nommée « Tutoiement ou vouvoiement? »

D’abord, le chercheur commença par opter par la seconde option, en s’avançant et tendant la main d’un geste calme et presque soumis.
Sauf que, à son grand amusement et presque soulagement, une réplique naquit illico dans sa tête, celle d’un Garth qui avait passé ses quarante deux balais cinq mois auparavant.

« Et puis comment ça, vieille branche?! Dois-je te rappeler que nous n’avons que deux ans de différence? »

Réplique qui vit le jour directement.
Il parut le premier surpris par ses mots, esquissa un sourire franchement amusé, et haussa les épaules, hésitant encore toutefois à passer à l’accolade. Non, parce que Sakaki-sama n’était pas non plus l’un de ses élèves qui revenaient le voir après leur voyage de dresseur. Alors un comportement de sempaï n’était pas trop approprié…
En même temps, dans la situation dans laquelle il était, Sakaki n’avait pas l’air de l’homme tellement important qu’il était, même s’il en avait les vêtements. En exil depuis trois ans. Trois ans, purée.
« Tu ne te souviens peut-être plus très bien de moi…. Mais moi, si. Et je me demande où est passé le Sakaki-sama pour qui j‘ai travaillé… oh, plus d‘une vingtaine d‘années. Que s’est-il passé? »

Garth décida qu’il lui parlerait plus tard de la Team Quetzacoalt. D’abord, il désirait trouver des réponses. Toujours comme ça, avec le natif de Pacifiville. En premier, trouver les réponses aux questions les plus simples. En dégager la véritable énigme cachée derrière le plus grand mystère en second.

Le mystère en question était: la team Quetzacoalt. Et l’énigme concernait le contexte de leur naissance dans le monde social de Kanto… et peut-être Johto, Garth n’avait guère eu le temps de faire des recherches sur eux.

Giovanni fut énormément surpris par la première parole de son ancien acolyte… ainsi, il le cherchait depuis longtemps... et dire que le leader avait pensé que son subordonné avait voulu définitivement le rayer de sa vie… apparemment c’était le contraire, l’homme qu’était devenu Maise voulait le retrouver… l’état pitoyable de ses vêtements, même visible dans la pénombre, témoignaient du périple qu’il avait du faire pour lui...

Autre chose que remarqua le chef de la T/R, fut la marque de respect que fit son vieux pote en s’inclinant, comme pour saluer un aîné. Le sourire sur ses lèvres s’agrandit. Certaines choses ne changeaient pas.

Le dresseur autrefois [ou toujours, il l’ignorait] maladroit, se permit une remarque sur sa condition. En effet, Giovanni physiquement, s’entretenait au mieux, et ne laisser pas les événements affectaient son hygiène de vie, cependant il aurait aimé retourner le compliment, mais comme il l’avait constaté au préalable, Garth semblait revenir d’un marathon d’une semaine…

L’homme à la peau métissée paraissait être pris dans un combat mental ; il ne devait pas tellement savoir comment se comporter face à lui, chef suprême de l’ancienne société la plus redoutée au monde, et en même temps le propre sauveur de l’être cultivé avec qui il avait réussi à faire de bons coups étant jeunes. Mais Garth eut l’air de se décider, en faisant un pas vers Giovanni, la main tendue. Avant de répliquer derrière :

« Et puis comment ça, vieille branche?! Dois-je te rappeler que nous n’avons que deux ans de différence? »

Un silence de mort s’installa. Une tension palpable dans l’ambiance naquit. Et… sans crier gare, Giovanni éclata d’un rire court, sec, mais franc. Son coéquipier n’avait pas perdu son sens de la justesse à ce qu’il pouvait constater

Non décidément, certaines choses ne changeaient vraiment pas.

« Tu ne te souviens peut-être plus très bien de moi…. Mais moi, si. Et je me demande où est passé le Sakaki-sama pour qui j‘ai travaillé… oh, plus d‘une vingtaine d‘années. Que s’est-il passé? »

Le sourire étant apparu sur le Pokémafieux se liquéfia totalement. Son meilleur ami était dans le droit de connaître la vérité, d’apprendre ce qu’il s’était passé… et donc de savoir que le seul et unique responsable de la décadence de la Société Team Rocket était son propre Chef… Mais Sakaki n’avait guère envie… de dévoiler comme ça sa faiblesse, il ne supporterait pas que Garth puisse le juger, lui, ou bien se permettre de le regarder de haut, bien qu’il doutât qu’il fasse une chose pareille. Il ne préférait pas lui avouer que ce fut de sa propre volonté que de démanteler la compagnie la plus redoutable de l’histoire du Pokémonde. Mais en avait-il vraiment le choix ? Pouvait-il encore se jouer de Garth Maise, d’abuser de sa loyauté ? S’il s’était posé cette question quatre années auparavant, la réponse aurait été oui. Or les choses avaient changé à ce niveau, la fierté personnelle de Giovanni étant descendue de plusieurs crans après sa défaite, lui-même ne pouvait plus considérer les autres avec autant d’orgueil, en particulier quand l’autre était sa bouée de sauvetage.

Le Boss laissa donc sa self-estime légèrement de côté, et s’avança vers son ami pour serrer la main qui était restée dans le vide.

« Détrompe-toi, j’ai beaucoup pensé à toi durant ces trois ans spécialement, je ne t’ai pas oublié, semi-veille branche. »

Un nuage se retira de la lune, éclairant la forêt où se trouvaient les deux collègues, leur permettant de se distinguer plus nettement.

Giovanni avait la mine fermée, le regard sérieux et même quelque peu austère, tandis qu’il voyait Garth plus ouvert, l’air curieux, attendant des réponses patiemment. Et ces réponses, Sakaki devait les lui fournir, bien que cela l’embêtât, mais c’était utile s’il voulait retrouver un certain climat de confiance mutuelle avec son vieil équipier, même si le terme confiance était un peu poussé.

« J’ai perdu contre un vulgaire dresseur de Bourg-Palette… un gamin, rien de plus. Quel chef perdrait si lamentablement contre un gosse ? Après ce cuisant échec, je ne me sentais plus digne d’être aux commandes de la Team Rocket. »

Ces phrases étaient pires que 20 lames de rasoir enfoncées dans le cœur du Boss, il ne supportait pas avouer sa faute, et mettre à nu ses impressions, ses émotions, étant signe de grande faiblesse. Mais il se devait de le faire, car Garth attendait des explications.

« J’ai donc décidé de tout arrêter, pour mieux me reconstruire. J’ai préféré qu’on me croit mort, pendant que je vivais tel un ermite, étudiant de près les Pokémons de type sol, afin de m’améliorer. »

Voilà, telle était la simple histoire de la triste destinée de la plus grande équipe de voleurs jamais créée. C’était humiliant pour son chef de parler de tout cela, mais également une obligation.

« Au bout de deux ans, je pensais pouvoir faire mon come-back facilement, regroupant les membres de la Rocket pour étendre notre domination comme autrefois… Mais il y a eu un événement inattendu. Cet événement était la création d’une autre société du crime, très organisée… qui partageait des ambitions autres que les miennes. Mais les moyens auxquels ils ont procédé pour y parvenir ont créé la même vague de panique que notre unité à l’époque, voire en pire. Du coup, ça a effacé tout le peu de crédibilité qui restait à la Team Rocket. Et j’ai vu certains de mes meilleurs agents disparaître des mains des membres de cette organisation qu’on peut jugée terroriste. Son nom est Quetzacoalt. Leur ambition est sans limite, leur pouvoir est désormais plus grand que le mien… »

Giovanni marqua une petite pause, mettant ses mains dans sa poche, le regard fixant un point imaginaire.

« Bon, nous serons mieux dans mon abri pour parler de tout cela, suis-moi »

Sans même attendre une réponse de son aîné [au niveau de l’âge donc], Sakaki tourna les talons, et se dirigea vers la grotte.

Invité

Un vulgaire dresseur de Bourg Palette?

Plus de vingt ans auparavant, Bourg Palette avait été le but suprême pour lui, un lieu où son ambition pourrait se réaliser avec un long travail, très long, tout cela au mérite. Sa voie avait certes été détournée… mais le nouveau directeur de laboratoire, un dénommé professeur Chen, n’avait pas été promu très longtemps après, et jouissait ces jours-ci d’une renommée fantastique.
Garth accordait, du coup, encore plus d’intérêt à ce lieu et en particulier aux inventions (non pas aux découvertes puisque celles-ci n’étaient guère utiles) qui y étaient faites. Notamment…

Le pokédex.
Un objet qui regorgeait de données utiles sur les Pokémons, était aux yeux du métis un ordinateur miraculeux.
La partie déduction, qui compose la moitié du talent d’un combattant et les premiers coups, histoire de cerner l’adversaire, ses forces, ses faiblesses, supprimée par un travail déjà fait et qui ne souffrait d’aucune approxiation.
Concevoir qu’un enfant guidé par un tel engin et donc libre de donner cours à la seconde partie, les réflexes et la fougue communicative, puisse devenir un excellent dresseur, était une chose que le chercheur pouvait faire.
Mais vaincre un pokémon qui combat à l’instinct, sans dresseur, qui a le potentiel de puissance suprême lui permettant des pouvoirs psychiques agrémentés de la connaissance omnipotente du monde et de la génétique même des Pokémons, tout cela par son essence même d’hybride entre l’homme et le pokémon?
Impossible. Mewtwo était une énigme, même si Garth et l’équipe de chercheurs étaient ceux qui l’avaient réalisé… il augmentait le poids du « pourquoi » que l’explorateur cherchait à comprendre.

Giovanni cachait donc quelque chose.
De plus grave qu’une simple blessure de l’égo, Garth en était persuadé… des mots se formèrent dans son esprit, qu’il n’avait pas prononcé depuis bien longtemps.

- Il me manque des données, Sakaki-sama. -

Mais ils ne franchirent pas ses lèvres et partirent se figer dans son regard inquisiteur. L’ex chef avait l’air décidé à tout lui raconter, il n’avait plus qu’à attendre… Ce n’était pas le moment opportun pour signifier en même temps qu’il se mettait à son service.

Plus que la honte, le fils d’Ansem décela l’hésitation, un manque de confiance… et surtout un sentiment étrange, comme si la situation de ce jour s’était inversée, ce jour où Sakaki dans la forêt avait trouvé un vagabond sans attaches. Mais maintenant c’était Gi-kun qui avait fui ses propres liens et les avait perdus, et Garth celui à qui la fortune souriait. Du moins dans son cœur, car il avait aimé une femme, achevé l’un de ses rêves d’enfant, acquis des amis très chers, et réconcilié avec sa famille.
La différence étant que même au fond du gouffre Giovanni pouvait trouver la puissance n’importe où, avec son charisme et le renom des Sakaki… et l’arme surpuissante qu’il était sensé avoir.

Les Quetzacoalt, hein?
Garth constata que Giovanni avait omis un détail. Le pourquoi de sa faiblesse, à lui qui possédait une arme de destruction massive. Les conséquences qui ont autorisé l’arrivée des Quetzacoalt, n’avaient fait que confirmer les doutes de Garth. Ils avait profité d’un moment de faiblesse, soit.
L’important était: pourquoi cet instant de faiblesse avait-il été crée.
Sakaki ne s’aperçut surement pas de l’œil chargé de reproches que son ami attacha sur lui, puisqu’il semblait perdu dans le vide, et l’invita à entrer dans la base avec lui.
Parfait, l’endroit idéal pour libérer Gardevoir et avoir du même coup un allié psychologique dans l’interrogatoire qu’il allait mener… Et l’endroit où, sans aucun doute si Mewtwo était toujours à Giovanni, il se trouvait.

Ah, c’est sur, Garth trouva un chat dans la planque.
Pas celui auquel il s’attendait.
Il dut se contorsionner dans tous les sens pour ne pas écraser la queue de Persian qui s’était couché en plein milieu, comme tout bon matou qui se respecte. Une bien belle bête, qu’il n’avait pas vu depuis fort longtemps, d’ailleurs…
Comme il s’y attendait, la grotte n’avait rien d’un camping du style qu’un vagabond se serait fabriqué avec les moyens du bord, plutôt caravane de riches avec la petite source dans laquelle sont les bouteilles d’alcool pour les rafraichir.
Sacré Giovanni… pas étonnant que dans ces conditions il soit encore en pleine forme.

Enfin, mon vieux Garth, tu n’a pas le temps de te détendre. Alors… Le travail de chercheur doit commencer. Le métis soupira un long instant, prenant du courage pour commencer. Contrarier le boss, était un exercice qu’il n’aimait pas franchement faire, même si ce n’était plus techniquement son supérieur.

« Je suis justement venu vous parler d’eux. Je ne concevais pas comment vous avez, Sakaki-sama, pu laisser une telle chose se produire… Team Rocket ou pas, champion d’arène ou pas, tout ça n’a aucune espèce d’importance comparée à votre arme. Alors je ne vais pas y aller par quatre chemins… »

Garth fronça les sourcils et réajusta son monocle, un éclair passant subrepticement dans son regard de glace.

« Comment avez-vous perdu Mewtwo? »

Il voulait enchaîner, mais une sensation le fit un instant se déconcentrer. Gardevoir bougeait dans sa balle et voulait absolument sorti. Garth grimaça de devoir détourner son attention pour quelques secondes.

« Excuse moi, Moineau veut sortir. »

D’un geste nonchalant il pressa le bouton pour que Moineau, sa Gardevoir et fidèle amie, se matérialise à son côté. Dans le non-respect total de la philosophie de la Team Rocket, Garth adressa un sourire tout frais réservé ‘à mes proches’ à son pokémon et murmura un « sois sage » affectueux.
Puis il retourna à son chef sans aucun scrupule.

« Il s’est échappé? Mort de défaillance? Mort au combat? Vous l’avez donné à quelqu’un, Chocolate ou Silver par exemple? Il… »
Le chercheur énuméra toutes les hypothèses possible et imaginable, jusqu’à arriver à la dernière, celle qu’il croyait vraie, fixant sans nulle gêne, enfin, le visage et l’attitude de l’ancien Boss, comme pour déceler le moindre changement qui confirmerait sa thèse.
« Ou il a été volé par la Team Quetzacoalt? Mais si tel est le cas… »

Garth s’apprêta à parler de Rayquaza. Mais la même raison qui lui avait fait quitter la Team Rocket sans dire un mot des années auparavant le poussa à se taire.
Il préféra s’expliquer sur sa démarche.

« Je suis à votre service. Quelque chose t’a perturbé au point de baisser ta garde, non seulement contre un dresseur, mais contre le monde, d’où tes ennuis. »

Il observa une pause, et grimaça à moitié en un sourire nostalgique.

« Il me manque des données, Sakaki-sama. »

Son très cher ami l’avait suivi dans la grotte, quitte à manquer de s’encoubler sur Persian qui avait jugé bon de barrer la route avec son corps. Une fois à l’intérieur, ce fut à Garth de parler… Et beaucoup.

« Je ne concevais pas comment vous avez, Sakaki-sama, pu laisser une telle chose se produire… Team Rocket ou pas, champion d’arène ou pas, tout ça n’a aucune espèce d’importance comparée à votre arme. Alors je ne vais pas y aller par quatre chemins… »

Voilà le genre de remarque que redoutait Giovanni, qui avait crispé sa mâchoire à l’entente de cette plainte de la part de son confrère. A nouveau, le sentiment de honte revint. Il regrettait. Oh oui il regrettait. Mais ce qui était fait était fait, il fallait avancer maintenant, même si la blessure était encore fraîchement en train de saigner, et que par ses dires l’homme en face de lui faisait comme s’il ajoutait de l’alcool fort à la plaie… c’était douloureux, mais ça aidait à la guérison…

Cependant, la question de Maise qui suivit perturba d’une toute autre façon Sakaki… Mew…two avait-il dit ? Un… deuxième Mew ? L’énonciation de ce nom créait un blanc total, un vide dans les souvenirs du Gym Leader. Ce dernier fit un effort de concentration exceptionnelle pour tenter de mettre le doigt sur pourquoi cette chose lui semblait en même temps si familière, et si étrangère. Ce Mewtwo serait-ce la chose à laquelle Giovanni essayait de penser, avant qu'il n'eût entendu son collègue du passé ?
L'ex-champion étant donc tant perdu dans ses pensées qu’il entendit à peine le scientifique le tutoyer en s’excusant pour faire sortir son Gardevoir de sa Pokéball, alors que Garth l’avait précédemment vouvoyer…

Une fois le Pokémon libre, le borgne se retourna vers Giovanni qui avait les sourcils froncés, toujours en plein effort mental, pour continuer à parler de ce Mewtwo. Il lui fit toutes les thèses possibles et inimaginables du comment et du pourquoi, son arme comme il la nommait, n’était pas avec lui, avait disparu. Le Boss était totalement décontenancé, perdu, il ne savait absolument pas de quoi pouvait bien parler le métis bavard devant lui… On aurait dit qu’un épisode de sa vie avait été effacé, épisode dont Garth était au courant. Il fallait qu’il sache de quoi il s’agissait… Mais il attendit que le savant ait totalement fini, avant de l’interrompre.

« Je suis à votre service. Quelque chose t’a perturbé au point de baisser ta garde, non seulement contre un dresseur, mais contre le monde, d’où tes ennuis. »

Un silence vint après que l'intellectuel ait dit qui lui manquait des infos.. un silence de plomb. Ça y était. Giovanni en était sûr… la perspicacité de son ami d’enfance n’avait fait que de s’accroître au fil du temps, il avait réussi à mettre en à peine quelques mots échangés le doigt sur la problématique du Boss, alors que lui-même avait mit plus de temps à trouver le pourquoi de sa décadence. La vivacité d'esprit était une chose que Garth Maise ne perdrait sans doute jamais.
Sakaki aurait aimé répliquer à ceci par une phrase justificative, que c’était depuis la perte de Lisa que tout avait vraiment commencé à se briser dans ses ambitions, dans sa tête, que l’absence de ses gosses le déchirait et qu’il s’ennuyait profondément, seul au pouvoir, et donc il n’avait pas jugé nécessaire de conserver son niveau, se laissant quelque peu aller, ce qui lui fut fatal dans l’arène contre ce dresseur d’il y avait 3 ans, chose qui lui permit de constater sa véritable vulnérabilité. Il avait voulu tout quitter pour se fortifier, pour oublier, pour passer à autre chose. Et cela avait réussi. Lisa ne venait plus autant perturber ses nuits et ses journées qu’autrefois, et les souvenirs de ses enfants étaient rangés dans un coin de son cerveau qu’il n’ouvrait quasiment plus.

Cependant, Giovanni ne pouvait pas autant dire, tout d’un coup là, devant celui qui fut pendant une longue période soumis à lui. Non, ces histoires ne concernaient que lui, Garth n’avait pas à en être au courant. L'orgueilleux être humain qu'il était voulait toujours pouvoir observer de haut son entourage, dont le scientifique.

Persian coupa court aux pensées de son patron, en rejoignant les deux compères, ne rompant pas le silence instauré avec ces pas feutrés, mais avec un miaulement curieux en direction de Gardevoir, puis alla se nicher timidement vers les genoux de son maître qui s’était assis sur le canapé.

« Un coup tu me vouvoies, l’autre vous me tutoyez, n’est-ce pas vieux frère ? »

Voilà tout ce que trouva le boss pour détourner la question non directe précédente de son ami, pour pouvoir enchaîner sur sa question à lui, qui avait failli lui occasionner un mal de crâne considérable.

« Tu m’as parlé de mon arme… qui s’appellerait Mewtwo… mais… je ne vois pas du tout de quoi tu parles… A vrai dire en fait, je ne sais rien de la suite de l’opération Mew. Mes souvenirs s’arrêtent à la découverte de la pierre contenant l’ADN du Pokémon. J’en avais conclu que le clonage était impossible… Ce qui … apparemment n’a pas été le cas ? ...»

Invité

« Un coup tu me vouvoies, l’autre vous me tutoyez, n’est-ce pas vieux frère ? »

Effectivement.
Garth changeait de répertoire selon qu’il s’adresse à l’être humain qu’il voyait blessé, ou au chef de la Team Rocket susceptible de lui donner des ordres. Il ne put s’empêcher de rire, retenant toutefois ses éclats par un ’tss’ caractéristique du professeur qu’il avait été.
Pris en flagrant délit de conflit interne…

Le changement de sujet, toutefois, n’était pas aussi innocent et protecteur pour son égo que Giovanni l’aurait voulu - à l’inverse, Garth conclut que cette faiblesse était en rapport avec l’amnésie soudaine du Boss en ce qui concernait Mewtwo… et tous ses suivants, apparemment.
Rien d’étonnant… Un homme qui, soudainement, se retrouvait pris dans un état de faiblesse passager mentale est ébranlé. De là à ce que de la montagne quelques pierres s’écroulent et fassent un éboulement qui crée une colline, qui grandirait au fur et à mesure que le mont s’aplatirait, l’imagination n’avait qu’un pas à faire. Ou, plutôt, la déduction de Garth.

« Tu m’as parlé de mon arme… qui s’appellerait Mewtwo… mais… je ne vois pas du tout de quoi tu parles… A vrai dire en fait, je ne sais rien de la suite de l’opération Mew. Mes souvenirs s’arrêtent à la découverte de la pierre contenant l’ADN du Pokémon. J’en avais conclu que le clonage était impossible… Ce qui … apparemment n’a pas été le cas ? ...»

Donc, Sakaki-sama avait perdu toute mémoire de l’évènement. Les autres aussi. Garth, non. Pourquoi?
La seule chose capable d’effacer ainsi les mémoires de tous était cette arme en question. Du moins, c’était la seule conclusion logique. Un attentat psychologique, une invasion de la Team Rocket par des pokémon psy, auraient pu causer un oubli général, mais alors les évènements oubliés auraient été bien plus conséquents que la simple existence d’un pokémon.
Un sourire, malgré lui de fierté, apparut sur les lèvres du scientifique. Brave bête, pensa-t-il, en accentuant sans y prendre garde sa caresse sur la tête de Moineau. Capable de se libérer de lui-même, et de préparer sa sauvegarde.

Conséquence, l’ébranlement de l’Empire Rocket. Conséquence, un nouveau syndicat du crime. Mais, de ce que Garth se souvenait, il y avait deux personnes au moins pour qui Giovanni serait resté. Ses deux enfants… Là, par contre, Mewtwo n’y était pour rien. Enfin.
Maintenant qu’il avait parlé du chat cloné, il ne pouvait plus se retirer. Pardon, Gardevoir, murmura-t-il à son pokémon, avant de se relever… et reprendre son attitude de scientifique.

« L’expérience a réussi… Et de ce que je peux juger maintenant, au-delà de nos plus folles attentes. La créature est devenue plus que ce que vous espériez, plus qu’un pokémon, plus qu’une légende. Son comportement en témoigne… »

Le scientifique ne put transformer la joie qu’il avait sur son visage en neutralité comme il l’aurait été préférable. Pas drole pour la victime de ces agissements, mais pour lui, chercheur, ce résultat était formidable. Et pour un homme qui espérait simplement étudier les Pokémons légendaires, c’était une bonne nouvelle. Un de plus.

« … il a effacé vos mémoires à tous. Effacé toute trace de son existence dans les âmes de ceux qu’il connaissait. Manque de chance pour lui, si j’ai travaillé à sa création, il ne m’a jamais vu… De là, tu as été affaibli, et ce moment de faiblesse a probablement déclenché toute cette série. Je me trompe peut-être, je ne connais pas exactement la chronologie des évènements. »

Voilà, le puzzle était quasiment complet, mais la dernière pièce n’était pas importante. Et puis maintenant, il fallait passer à autre chose, s’ils continuaient à lambiner ce ne serait pas demain la veille que Garth pourrait retourner auprès de Lilianne et réussir à trouver LA réponse qu’il cherchait. Gardevoir frémit quelque peu, Garth était sur que c’était parce qu’elle sentait que… ce qui allait se passer ne plaisait pas au scientifique, mais il devait faire des compromis. Lourds. Mais ce n’était pas le premier.

« Enfin… Le passé est le passé. Pour reconstruire un présent, il faut déjà sortir d’ici, et… se rendre aussi terrifiants que la Team Quetzacoalt. Mais ce sera possible plus rapidement si… vous remettez la main sur Mewtwo. Ou sur un autre pokémon légendaire. Dans les deux cas, je crois que mon aide sera utile… Et désolé de mettre ça sur le tapis, mais j’ai besoin de fonds pour mener les recherches. »

Garth n’avait aucune envie de blesser un pokémon légendaire. Déjà parce que pour attirer l’attention de Celui à qui il voulait poser sa question, il valait mieux que ce soit en bien. Il doutait qu’Arceus n’essaie pas de le tuer s’il avait fait du mal aux siens… et cloner Mew pouvait être considéré en deux sens. D’un autre côté, pour les rencontrer, il n’y avait pas trente six milles solutions.

Alors… un compromis. Un gros. Vraiment très gros. Mais qui sait, Garth aurait été capable de trahir Giovanni pour Mewtwo, s’il l’avait vu se développer, et il savait pertinemment qu’il aurait pu le faire. Voilà ce qui ne plaisait pas à Garth. Se mettre encore une fois sous les ordres d’un homme qu’il appréciait bêtement par amitié, mais dont il doutait très clairement sur ses choix.

**Effacer… ma mémoire ? **

Voilà ce que retint essentiellement Giovanni quand Garth eut fini son explication de qui était Mewtwo. Désormais, Sakaki savait pourquoi dans le coffre d’or de la Team Rocket, il y avait un grand blanc, tout comme dans son cerveau. C’était par la faute des années d’investissement et de coût qu’avait nécessité la création de ce clone… ce qui ne servit pas à grand-chose en fin de compte, si le Pokémon surpuissant avait échappé à son contrôle, et effacé son souvenir… Tout cet argent cependant n’était pas forcément gaspillé, car, comme l’avait sous-entendu Maise, peut-être que la récupération de l’être génétiquement crée était… possible. Du moins, ils pouvaient l’espérer.

Le Gym Leader remarqua, pendant que Garth parlait de ce qu’il devait considérer comme sa création, une sorte d’expression joyeuse s’emparant du visage de son ami. Il ne pouvait le blâmer de sourire alors que lui avait plutôt envie de boire pour se soulager, après tout, avec le scientifique Fuji, Garth était un des principaux chercheurs travaillant sur le cas de Mew, étant le seul survivant de la créature, donc le « papa » de Mewtwo, en quelque sorte.

Le « père » du Pokémon le plus puissant au monde coupa court à cet instant de remémoration du passé, encourageant le Boss à aller de l’avant. Et il avait raison. Giovanni ne pouvait rester éternellement caché, dans une grotte au fond de la forêt entre Kanto et Johto. Non, ce n’était pas le genre d’avenir qu’il s’envisageait. Et il avait encore raison, concernant le fait que pour vaincre l’ennemi, il fallait savoir inspirer plus de peur, et ce par la possession d’une arme de destruction massivement efficace, tel Mewtwo, ou un autre Pokémon dont le nom seul suffit à provoquer l’intimidation des opposants.

Dans les deux cas, je crois que mon aide sera utile… Et désolé de mettre ça sur le tapis, mais j’ai besoin de fonds pour mener les recherches. »

Utile ? C’était bien un faible mot, l’aide de Garth était désormais vitale pour la renommée de celui qui autrefois était l’homme le plus respecté et craint de la Poképlanète.

La question financière n’irrita pas un seul nerf de Giovanni, ce dernier sachant parfaitement qu’on n’obtenait rien sans sacrifice. Et Sakaki savait pertinemment qu’importaient le coût et la durée des recherches du savant Maise , avec lui il était certain d’obtenir un résultat concluant.

« Tu n’as pas à t’excuser Garth… je te donnerai tous les Pokédollars que tu me demanderas, comme au bon vieux temps. »

Une moue quelque peu nostalgique fut durant une fraction de seconde lisible sur le visage très fermé de Giovanni, mais elle se fit vite remplacer par un sourire plein d’assurance, subtil cocktail entre avidité de grandeur, de reconnaissance et soif de pouvoir.

« Comme tu l’as dit, rester dans cet endroit serait enterré définitivement la Team Rocket… Il nous faut un plan. Capturer Mewtwo ou un Pokémon légendaire…. »

Il marqua une légère pause puis eut un rire furtif.

«Ça relève de nos rêves de gamins. Mais c’est nécessaire pour atteindre mes buts. Cependant, en priorité, il faut recenser tous les agents de la Team, car même à deux je crains qu’on n’arrive pas à grand-chose. Tu auras besoin d’une aide scientifique, c’est inéluctable, et d’une bonne infrastructure. Il faut relocaliser notre base en un deuxième temps, ensuite réengager du personnel sérieux, et enfin nous pourrons nous lancer à la chasse de mon arme. »

Giovanni, toujours ce sourire en coin, oscillant entre mépris et fierté mal placée, caressa de sa main droite son Persian, tout en observant Garth. Maintenant que la chose qui titillait depuis un moment le boss de la Team Rocket avait été élucidée grâce à Maise, une autre intrigue vint se poser en question dans l’esprit du Pokémafieux. Pourquoi diable son compagnon de toujours l’avait-il quitté sans rien dire du jour au lendemain ? Était-ce par apport… au fait qu’il avait honte d’avoir participé au clonage d’un être légendaire, d’avoir blessé l’identité d’un « héros » comme Garth aimait les appeler… Giovanni se souvenait que le borgne ne supportait pas l’idée que de telles créatures puissent être injuriées, et la seule condition qu’imposa le métis autre que l’argent à leur contrat d’enfance, avait été que jamais il n’ait à faire de mal à un de ces Pokémons rares. Contrat qui hélas, avait été légèrement bafoué, la Team Rocket ayant sévi sur des Pokémons semi-légendaires, et sévissant sûrement à l’avenir sur des Pokémons totalement légendaires. La nécessité de la force pour avoir l’obéissance d’une telle puissance résumée à un seul organisme vivant étant plus que primordiale… Mais serait-ce la seule et unique raison du départ soudain de son bras droit ? Sakaki ne pouvait le savoir, mais comptait bien demander cela à son associé, dans la minute ou bien plus tard, tout dépendant si l’occasion se présentait…

Giovanni, n’attendant aucun acquiescement de la part de sa vieille branche quant à sa stratégie de reconquête du pouvoir ultime [car il jugeait qu'il n'y avait rien à redire sur son plan], se leva. Il avait une de ces soifs… et sûrement que Garth aussi, étant donné la longueur du voyage du savant.

« Puis-je te servir quelque chose ? Un whiskey peut-être ? »

Et à nouveau, sans attendre aucune réponse, Sakaki ouvrit le réfrigérateur, duquel il sortit une bouteille de whiskey, ainsi que deux verres tirés de l'armoire, servit à boire à l'intellectuel ainsi qu'à lui-même, et tendit le verre.

« Tu trinqueras bien avec moi à notre réussite future, non ? »

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« Tu n’as pas à t’excuser Garth… je te donnerai tous les Pokédollars que tu me demanderas, comme au bon vieux temps. »

Bonne nouvelle.
Au moins, ça, c’était éternel. Comme au bon vieux temps, certes, sauf que maintenant Garth n’avait plus trop besoin d’escorte. Ca lui manquerait toujours, d’avoir quelqu’un qui le protégeait et le défendait pendant que lui n’avait que sa cervelle à faire marcher, comme quand son garde du corps avait capturé son fidèle Kraknoix, maintenant devenu un beau et féroce Libegon.
Les fonds pour financer les expéditions, le matériel de décrassage, de fouille et de reconstitution du passé, au moins, ça c’était assuré. Pour employer des chasseurs aussi.

Garth acquiesça silencieusement, et regarda qu’en Giovanni s’allumait une lueur qui lui avait toujours plu à moitié. D’un côté, c’était signe d’action, et de bonne humeur mentale de son boss. De l’autre, ça allait mal finir pour plusieurs êtres vivants, que ce soit pokémon ou non? Il cacha une grimace, et ne traduit son doute que par une caresse transformée en prise un peu rude sur Gardevoir, qui se contenta de couiner. Heureusement, seul Garth et le Persian en eurent conscience.

« Comme tu l’as dit, rester dans cet endroit serait enterré définitivement la Team Rocket… Il nous faut un plan. Capturer Mewtwo ou un Pokémon légendaire…. »

Giovanni marqua une pause, pendant que son ami décidait qu’il n’était vraiment pas à l’aise avec cette décision. Il l’observa continuer, avec une moue absolument pas dissimulée, cette fois.

«Ça relève de nos rêves de gamins. Mais c’est nécessaire pour atteindre mes buts. Cependant, en priorité, il faut recenser tous les agents de la Team, car même à deux je crains qu’on n’arrive pas à grand-chose. Tu auras besoin d’une aide scientifique, c’est inéluctable, et d’une bonne infrastructure. Il faut relocaliser notre base en un deuxième temps, ensuite réengager du personnel sérieux, et enfin nous pourrons nous lancer à la chasse de mon arme. »

Les deux hommes se faisaient face, l’un déjà en train de toiser son ancien acolyte comme il l’avait toujours fait et parti caresser son Persian, et l’autre grimaçant, en train de tortiller sa barbiche, ayant arrêté de caresser Gardevoir pour simplement lui prendre la patte dans la main droite et la serrer, comme cherchant un appui à cette hésitation cornélienne qui ne l’avait toujours pas lâché depuis sa nouvelle rencontre avec Sakaki-sama.

L’Œil bleu intense de Garth finit par déceler une once de doute chez son interlocuteur aussi. Probablement, maintenant qu’ils avaient parlé de lui, ils s’intéresseraient maintenant au chercheur. Mais ça, ce n’était pas possible. L’explorateur mentirait sur les raisons de son départ, pas question de faire autrement. S’il laissait au grand jour éclater le ressentiment fort et le manque de confiance qu’il avait envers la Team Rocket, et donc, contre son propre ami, cela serait fini. Et il y avait gros en jeu. La vie de ses parents, de Lilianne, et la protection du maximum de Pokémons légendaires. Si cela était possible Garth ferait en sorte qu’un minimum soient utilisés pour mettre fin aux ambitions des Quetzacoalt, et… pourquoi pas aussi…

- A celles de la Team Rocket. Ils seront heureux que tu les ai aidés à sauver leur monde tout en les protégeant de l’organisation, tu n’auras plus jamais besoin de préparer des expéditions pour les rencontrer, puisque tu serais leur ami, et enfin, Arceus peut-être daignera… mais il te faudra tuer toute source de danger pour eux sur ce monde. -

Heureusement pour Garth; Sakaki ne le regardait plus, et s’était levé. Sa décision était prise, reconstruire entièrement la Team Rocket. Garth aurait volontiers mené les recherches avec des équipes qu’il aurait constitué lui-même et sans rien laisser paraître de l’organisation que leurs finances, mais il fallait aussi faire un compromis ici. Non, vraiment, ce jour-là, il avait passé un pacte d’amitié avec le diable. Imbécile que tu est, ton ambition valait-elle si chère?

« Puis-je te servir quelque chose ? Un whiskey peut-être ? »

Monsieur Maise sursauta fortement en l’entendant. Toujours perdu dans ses pensées… Et dans cette voix insinuée en lui, qui lui susurrait des envies de meurtre. Oh bon sang, non, pas possible… Même si l’amitié qu’il avait pour Giovanni connaissait des hauts et des bas, il lui devait tout de même son rêve… et le bafouement de ses serments… Oh, bon sang, Garth avait très mal à la tête. Il sentit alors une douce chaleur irradier sa main, rouvrit les yeux qu’il avait fermé en portant la main gauche à son front, et vit Moineau à côté de lui, le regarder avec douceur, maintenant ses deux pattes autour de sa main droite, qu’il avait utilisé pour garder le contact avec elle. Le visage du chercheur s’adoucit.

- Je ne mérite pas de t’avoir à mes côtés, ma belle… Si tu savais comme je suis un monstre…- pensa-t-il avec un pincement au cœur, réalisant aussi qu’il craignait pour ses propres Pokémons.

Son exil lui avait permis de tisser des liens avec tous. Confier Abo à Lilianne, Nosférapti à ses parents, pour qu’ils aient une compagnie, leur offrir une seconde vie à eux qui avaient été capturés pour servir le crime, connaître mieux Libégon, son fidèle compagnon de l’exploration, et rencontrer un Tarsal devenu une belle Gardevoir, amie de sa naissance en tant qu’homme libre.
Team Rocket, hein? Et maintenant, les remords d’avoir laissé les vols se commettre l’oppressaient, en sachant que ça continuerait et qu’il serait complice.

« Tu trinqueras bien avec moi à notre réussite future, non ? »

Giovanni lui tendait un verre empli de whiskey. Pas le genre de boisson que Garth affectionnait… mais bon, pouvait faire un effort. Il dégagea son bras que Gardevoir tenait, lui murmurant de le laisser un peu et d’aller jouer avec Persian, pour prendre le verre, plantant maintenant son regard redevenu glacial sur son ami.

« Volontiers… »

Ah, il regretta dans l’instant. A peine une petite gorgée passée dans sa gorge, il se mit à tousser en écarquillant les yeux, à tel point qu’il dut confier le verre à Gardevoir, accourue dès les premiers signes, pour pouvoir avaler une grande gorgée d’air et se remettre tranquillement de l’alcool.
Ouaaah, pour un palais habitué au thé, ça c’était du truc qui picote… Il dut s’essuyer, des larmes ayant pointé aux coins de ses yeux. Punaise, ça c’est du fort
Il ne prêta volontairement pas attention à Giovanni, persuadé que celui-ci se moquait de lui, et sortit un calepin de l’une de ses poches, avec un crayon. Tentative de détournement attention…

« Il faudrait commencer par récupérer ce qui reste… Renouer avec votre fille et votre fils, je ne sais pas où ils sont, moi. Mais il faudra songer à construire un nouveau QG, où vous risquez des attaques de la police ou de la Team adverse. Je vous conseille Rosalia, c’est une ville chargée d’histoire, et la plus chargée en légendes. Donc, une proximité supplémentaire… Il faudra rester discret. Ou Doublonville, la ville la plus fréquentée de Johto. Si vous voulez Johto bien sûr, mais la Police aura plus de facilité à vous trouver à Kanto. »

Garth marqua une petite pause. Un sourire totalement amusé apparut sur ses lèvres.

« Et puis, il y a des jolies danseuses à Rosalia. Une source de motivation supplémentaire pour les troupes. »

Il reçut un mal de crâne intentionné de son propre Pokémon qu'il foudroya du regard, et mima l'action d'appuyer sur un bouton de la main gauche pour lui dire de cesser, ce à quoi Moineau, furieuse, obéit.

"... De toute façon, c'est vous le Boss. Décidez, et nous partons sur le champ."

Garth prit le verre que Giovanni lui avait tendu, tout en l’observant d’un de ces regards froid que le leader connaissait assez bien pour avoir dû supporter à plusieurs reprises cet œil bleu glacé lorsque les deux hommes avaient des désaccords, ce qui n’était pas chose rare, même si ces divergences de point de vue portaient plus sur les moyens que mettait en place Sakaki pour atteindre ces buts, moyens que Garth trouvait profane de sa morale, que sur leur amitié propre.

Le Gym Leader savait assez qu’il ne fallait pas soutenir le glacier qu’apparaissait dans l’iris du scientifique, et faire comme si de rien n’était.

D’ailleurs, l’attention de l’ex-champion était plutôt tournée vers le verre de Garth, et sa figure. Oui… le Boss savait bien que son collègue était un sacré buveur de thé, et ne consommait que rarement des produits alcoolisés, voire jamais. Donc il attendait impatiemment le rude contact du liquide et des lèvres du métis… et ses attentes ne furent guère déçues.

Garth avait manqué d’étouffer… dommage, Giovanni aurait pensé voir son ami supporter l’alcool avec toutes ces dures années que l’homme aux cheveux blancs avaient endurées, ainsi il aurait pu trinquer plus souvent avec lui. Mais bon, on ne refait pas les gens, du moins pas totalement.

Malgré le rictus moqueur qu’affichait Giovanni, Maise ne dit rien et se contenta de sortir un petit cahier d’une de ses poches, accompagné d’un crayon. Puis l’homme à la peau foncée commença à lui suggérer d’éventuels futurs membres… tels les enfants de Giovanni. A leur énoncé, le Boss renfrogna les sourcils. Son fils était irrécupérable, ça il le savait. Et sa fille… officiellement elle devait résider proche de l’arène de Jadielle, étant la championne [en lui ayant ravi son badge, la peste], mais il avait déjà essayé de l’y trouver, en vain. Donc elle non plus il n’avait aucune idée d’où elle se trouvait.

Puis des noms fusèrent de la bouche du savant, argumentant le pourquoi il ne fallait pas créer le Quartier Général dans tel ou tel endroit. L’attention entière du Leader était centrée sur les dires du savant. Puis, à un moment… le Gym Leader fut déstabilisé, ne sachant prendre la remarque de son vieux collabo comme une blague… ou une proposition sérieuse.

« Et puis, il y a des jolies danseuses à Rosalia. Une source de motivation supplémentaire pour les troupes. »

Là, il marquait un point. Malgré la vulgarité des propos tenus, vulgarité qui au passage ne dérangeait pas le moins du Monde Giovanni [ce qui parut être le contraire de Gardevoir, ou plutôt Moineau, car cette dernière sembla foudroyer du regard son patron, qui lui était amusé de la chose…], il y avait de l’idée… Garth rattrapa sa frasque en disant que de toute manière, la décision appartenait au Boss [attitude qu’il appréciait de son très cher allié].

« Il est vrai qu’à Kanto je serais trop vite repéré… et cela en serait de même à Doublonville, s’il y a beaucoup de monde, cela signifie également plus d’ennemis. »

Giovanni eut l’air de marquer une pause, perdu dans une réflexion profonde, son sourire malicieux de tout à l’heure refaisant peu à peu surface, son visage restant cependant sérieux.

« Rosalia serait un choix excellent. Pour qu’une entreprise marche bien, car la Team Rocket est une entreprise, il nous faut des troupes motivées et heureuses de travailler. Les danseuses leur apporteraient une distraction, qui serait donc bénéfique pour la qualité de leur service. Et si on craint un relâchement de leur part, il suffirait de les priver de l’entrée du club de danse. Comment lier discipline et … jeu… Bonne idée Garth… Je ne te savais pas aussi… connaisseur en matière de motivation des troupes...»

Sacré borgne. Il avait tout de même évolué depuis ces 20 ans s’étant écoulés.

Cependant, le fils de Ma’am Boss ne paraissait pas parler de cette proposition à la légère. Un petit silence prit place, encore, alors que Persian observait d’un drôle d’œil la petite Moineau, qui avait l’air mécontente, et que Giovanni entamait de moitié son verre de whiskey.

« Cette ville serait l’endroit idéal donc. »

En une gorgée, le chef de la Nouvelle Team Rocket finit jusqu’à la dernière goutte l’autre moitié de son verre, puis prit celui à Garth à peine consommé, sachant que ce dernier ne le finira point, pour le boire d’une traite, cul-sec. C'était cela l'avantage d'offrir un verre à Garth... il nous revenait de toute manière.

Persian observa son maître avec une sorte de petit sourire propre aux félins, tandis que son patron se leva avec aisance du canapé.

« Rosalia, nous voilà. »

[FINI]

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Giovanni Sakaki : 335 lignes
Gart Maise :330 lignes

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