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 Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time!

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Mimi DellacchioCivile

Mimi Dellacchio


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MessageSujet: Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time!   Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time! EmptyLun 15 Nov 2021 - 18:22

Mirabella Dellacchio


Appelez-moi Mimi !


Origine de l'avatar : Haru Okumura / Persona 5


Présentation générale


Âge : 26


Taille : 1m62


Région d'origine : Inconnue


Groupe principal

Coordinatrice

Groupe secondaire

Civile



Équipe pokémon




Bigoudi


Niveau 30
  • Danse Folle

  • Rafale Psy

  • Projecteur

  • Imitation


Talent : Pieds Confus


Augmente l’Esquive du Pokémon s’il est confus.








Tutu


Niveau 25
  • Coup d'Main

  • Danse Plume

  • Atterrissage

  • Tranch'Air


Talent : Danseuse


Si n’importe quel Pokémon utilise une capacité dansante, ce pokémon peut se mettre aussi à danser.





Présentation physique


Dessine-moi une Mimi !


Les yeux rivés sur la belle danseuse du parc de Doublonville, le dessinateur fait glisser son fusain au rythme des pas de son modèle.

Il se laisse guider, jette quelques traits courbes et francs. Le corps bouge, tourne, dévoile ses jambes fines et tendues sous le voile poudré d’une petite robe d’été. Quelques lignes suffisent à représenter une silhouette fine et élégante, toujours en mouvement, renforcée par une musculature délicate dissimulée sous une peau au teint de pêche.

L’esquisse se précise à mesure que les pas se répètent. Un pied tendu, l’autre sert d’appui, la main se lève, et voilà que la danseuse sautille au rythme de son petit tambourin. Le fusain, lui, court, griffe, tente de retranscrire du mieux qu’il le peut ce spectacle de sons et de couleurs. Sur le papier, les bras fins et rosés s’allongent, les jambes se devinent de plus en plus. La robe s’élève, puis redescend, épouse les formes de sa propriétaire et les quitte aussitôt. Le morceau de bois noir s’efforce de la rejoindre, mais dès qu’il la rattrape, elle lui échappe aussitôt.

Les croquis s’enchaînent, découpent la chorégraphie en une série d’ébauches inachevées, donnant par leur imprécision à chaque forme humaine dessinée des airs de fleur en bouquet. Mais la danseuse, elle, ne s’arrête pas. Sa poitrine n’est jamais à bout de souffle, ses gestes simples dégagent une énergie fruitée. Le fusain cède, et tombe au sol. Quelques secondes de répit pour le dessinateur. Mais alors qu’il se penche pour ramasser la tige de charbon, la douce voix de la danseuse lui fait lever les yeux.

Elle fredonne, enchaîne les notes et les syllabes. Elles n’ont pas de sens, mais s’accordent avec la mélodie du tambourin. Les pas de danse les rejoignent en harmonie et s’emportent dans une nouvelle féerie.

Une page se tourne, le fusain reprend son chemin. Il se glisse dans un visage arrondi, décoré d’un petit nez, sans prétention. Les yeux le rejoignent, ils sont grands et ronds, regardent vers le bord du papier, encadrés par des cils longs et discrets. Deux petites encoches viennent signer une bouche en forme de cœur, tout près du nez qu’il corrige en le pointant davantage vers le haut. Les joues rebondies accompagnent par leur forme des cheveux qui s’arrêtent à leur hauteur, gonflés par des boucles rondes et légères. Un doigt noirci vient ajouter au sommet des pommettes une trace grise et estompée voulant rappeler la couleur rosée de son modèle.

Elle se met à sourire. Cette fois, c’est le dessinateur qui finit par rougir. Un second visage apparaît sur le papier. Les yeux ronds et naïfs ont laissé leur place à des pupilles fines, subtilement retirées derrière des paupières à demi fermées. Les lèvres entrouvertes simulent un baiser vaporeux venu chatouiller la pointe du fusain, empêtré dans un tracé incomplet. Un clin d’œil lui est destiné, le fusain roule sur le papier et signe la fin du petit spectacle.

Le visage de la danseuse retrouve ses formes douces et rebondies. Les cheveux bouclés s’écartent, à la manière des pétales d’une fleur épanouie. Les applaudissements retentissent, la danseuse s’incline et tend quelques morceaux de papier pour promouvoir un petit cabaret. Ses doigts délicats sont aussitôt soulagés, elle remercie chaleureusement ses spectateurs, rassemble ses humbles affaires, puis se volatilise, comme si elle n’avait jamais existé.



Présentation psychologique


C’est l’effet Mimi !


Il pleut à verse. Les rues de Doublonville sont presque désertes, les habitants se précipitent pour se mettre à l’abri. Dans la boutique, le silence est brutalement rompu par le carillon de l’entrée.

Du fond du magasin, un homme sort de son atelier, les mains noircies par le graphite. Ses yeux déconcentrés pensent l’espace d’un instant que le soleil est revenu, mais non, c’est simplement un parapluie couleur pamplemousse qui lui fait face. Les baleines se replient et dévoilent un visage lumineux, cerné de boucles rousses gonflées par l’humidité. Le bonjour est mélodieux et énergique. La réponse est moins franche, détournée par un croquis tout particulier, affiché sur le mur du magasin, juste au-dessus des pastels et des craies de cire. La danseuse de fusain a retrouvé son modèle.

Mais à peine le vendeur repose-t-il ses yeux sur la cliente que celle-ci s’adresse à lui sans perdre de temps. Elle parle vite, accompagne chacun de ses mots par des gestes et des mimiques expressives. L’ambiance du magasin se réchauffe à mesure que la conversation se déroule, adoucie par un parfum de fleur qui s’accorde parfaitement avec celui des crayons de bois. Son objectif est de faire un cadeau à sa petite sœur qui aime dessiner. Elle demande conseil, mais s’écarte aussitôt du sujet. Elle s’émerveille devant la couleurs des crayons près de l’entrée, s’étonne que tous soient faits à la main, puis au détour de quelques pas légers se retrouve à observer les fusains d’un air curieux et captivé. Les questions fusent, s’échappent de ses lèvres comme un petit feu d’artifice. Certaines sont pertinentes, d’autres plutôt inattendues, mais toutes sont prononcées avec la même sincérité.

Elle donne finalement des détails sur le cadeau qu’elle aimerait offrir. Ses critères sont nombreux, la question a sans doute été murement réfléchie. La conversation saute alors de craies en crayons, au rythme des remarques franches et étourdies de la danseuse qui n’en finit plus de tourbillonner. Elle écoute le vendeur avec intérêt, plonge ses grands yeux ronds dans les siens tout en le suivant jusqu’aux étagères de pastels. Elle demande si eux aussi sont fabriqués à la main, la réponse est positive, mais elle ricoche contre l’esprit fugace de la demoiselle, à présent absorbée par l’esquisse qui lui fait face.

À la manière d’un enfant qui découvre son reflet, l’étonnement est immédiat. Pourquoi est-ce qu’il n’y a pas de couleurs ? La remarque est naïve, mais prend le père de l’ébauche au dépourvu. C’est la technique de dessin qui le veut, répond-t-il au terme d’une brève hésitation. La danseuse est déconcertée. Malgré la multitude de couleurs présentes dans le magasin, tous les dessins exposés en sont dépourvus. C’est normal ? Le vendeur ne sait pas quoi répondre. De toute manière, son interlocutrice est déjà passée à autre chose.

Elle n’a même pas remarqué que c’était elle, sur la feuille de papier.

Le cadeau est finalement sélectionné. Il est soigneusement emballé dans du journal, maquillé d’un ruban de tissu qui tranche avec le papier grisâtre. La cliente est ravie, récupère son achat et son parapluie. Elle salue le vendeur et disparaît, comme si elle n’avait jamais existé.

Dans la boutique, un léger parfum de fleur subsiste. Le propriétaire parcourt les murs du regard, frappé par la noirceur de ses esquisses. Il finit par rejoindre son atelier, mais en ressort aussitôt. Il se dirige vers les pastels, en retire quelques uns de sous les pieds de la danseuse de fusain, puis après lui avoir adressé un dernier regard, repart s’affairer dans le fond de son magasin.



Histoire


Ouverture
Tout débute par une rencontre. Deux âmes suivent un chemin long et sinueux, guidées par leur désir d’indépendance et de liberté. L’une est en uniforme. Elle sort tout juste d’une école militaire. L’autre porte sa cravate de travers et jongle maladroitement avec son tout nouveau chapeau de pilote. Il titube ; sans doute sort-il d’une soirée riche en festivités.

Tout doucement, les personnages finissent par se rapprocher : ils se croisent, s’entrecroisent, joignent leurs pas puis se séparent, et enfin se découvrent.

Leurs mains se rejoignent et ne se lâcheront plus. Un violon suit gaiement le duo, sa mélodie enjouée se faufile entre leurs pas rapides tandis qu’ils prennent de la hauteur. Les yeux levés vers le ciel, ils pointent du doigt les innombrables destinations qu’ils désirent atteindre. Leurs jambes suspendues dans le vide battent la même mesure naïve et optimiste. Mais impossible pour eux de rester immobiles.

L’amoureux porte l’amoureuse, ils tournent et s’engagent dans une valse pleine de fraîcheur. Ils s’emportent, s’oublient, et voilà que dans une ultime pirouette, un landau vient se glisser dans la chorégraphie.

À l’intérieur, une petite fille au teint de pêche dort sans un bruit. L’ambiance s’adoucit, les instruments ralentissent leur cadence, mais le couple, lui, ne peut pas tenir bien longtemps. À peine née, voilà que l’enfant est emportée dans une nouvelle avalanche de notes fiévreuses. Le landau suit les amants, il pivote, glisse, mais l’équilibre est précaire !Le couple pensait pouvoir continuer leurs envolées comme avant, mais la poussette prend de plus en plus de place ; elle les gêne, les déséquilibre, les fixe au sol.

C’est alors qu’une porte s’ouvre. Une occasion rêvée pour les parents aviateurs. Ils se tiennent la main, s’apprêtent à la franchir, mais le landau, lui, ne peut passer par l’encadrement. Le violoncelle marque leur inquiétude : ils sont balancés à droite, puis à gauche, empêtrés dans une mélodie lancinante et répétitive. Heureusement, le glas d’un carillon vient interrompre la sinistre harmonie.

Une figure aux traits vieillis se penche au-dessus de l’enfant. Ses bras de mère privée trop tôt de l’amour de sa fille, qui lui a préféré l’uniforme militaire, saisissent avec douceur la main de la petite.

La grand-mère impose par sa présence un rythme doux et réconfortant. Mais à peine se retourne-t-elle que le couple, lui, a déjà franchi le seuil de la porte. L’orchestre s’endort, le rideau tombe sur une berceuse chantée sans instruments.

Acte premier
Scène I
L'école des petits couanetons
L’enfant a grandi ! Elle est devenue une adorable petite fille, pleine de joie et de vie. La voilà qui s’exclame et sautille sans aucun signe de fatigue. Entre deux petits pas, elle tente même une pirouette, mais tombe maladroitement sur le derrière.

« Ce n’est pas grave, il suffit de se relever ! », lui chante la flûte qui suit ses faits et gestes. L’instrument est malicieux, comme l’enfant qu’il accompagne. Seulement, comme elle, il est seul et se contente de jouer pour la grand-mère, qui admire sa petite fille et applaudit au rythme de ses prouesses juvéniles. Dans le jardin de la maison, la vie semble gaie et chaleureuse. Seulement, derrière son sourire, la vieille dame est triste de voir la petite ballerine sans personne pour la guider ou la suivre.

Le téléphone sonne. L’intervention est inopinée et désagréable pour les oreilles. Mais la jeune fille se précipite, elle décroche dans un empressement à l’image de son jeune âge. Allô ? Ce sont les parents. Non, ils ne sont toujours pas là. Oui, ils continuent d’aimer leur fille et de penser à elle. En voilà, une bien étrange conception de l’amour, mais pour l’enfant, il n’y a rien d’inhabituel. Le coup de fil est bref, la petite repart jouer ailleurs, sous le regard peiné de sa grand-mère.

Alors, tandis qu’elle tend l’oreille, un piano capte son attention. Un. Deux. Trois. Quatre. Les notes sont mesurées et soumises à une discipline stricte. Elles se répètent, il faut les suivre correctement ! Cinq bambins s’y évertuent, avec plus ou moins de réussite, sous le regard observateur de leur enseignante, qui, du bout des doigts, les aide à mieux se positionner. Tous sont alignés le long d’une barre en bois, à la manière de notes sur une partition. Certains se redressent, d’autres s’abaissent, et échangent diverses postures avec un amateurisme touchant.

La professeure aperçoit la grand-mère. Elles sont amies, depuis longtemps maintenant. Ses gestes gracieux d’ancienne danseuse flottent sur la mesure du piano tandis qu’elle rejoint sa camarade pour échanger avec elle.

L’enfant est seule ? Cela tombe bien, il reste une petite place, juste au bout de la barre ! L’école est sans prétentions, oui, mais les enfants prennent plaisir à s’y retrouver, et d’ailleurs, à peine l’enseignante a-t-elle le dos tourné qu’ils commencent à perdre le rythme du piano. L’une fait un malencontreux croche-patte à l’autre ! Voilà qu’ils se chamaillent maintenant ! Mais heureusement, l’arrivée de la petite nouvelle les réconcilie aussitôt. Sa grand-mère peine à lui lâcher la main, tandis que l’enfant, elle, trépigne d’impatience.

Le piano propose un premier rythme. Un. Deux. Trois. Quatre.

Trop vite, Mimi ! Plus doucement, Mimi ! Plus vite, maintenant ! Le bras en l’air, la jambe tendue ! Non Mimi, l’inverse !

Oh, la pauvre s’agace déjà, qu’il est pénible de suivre ces règles ! N’est-il pas plus simple de bouger comme on le souhaite ? Mais heureusement, l’enseignante est douce et patiente. Elle ne démord pas et corrige les gestes de la nouvelle venue. En guise d’exemple, elle même prend la pose et enchaîne quelques pas.

Les élèves l’admirent, en particulier la petite fille, qui veut essayer à son tour.

Scène II
La caisse enregistreuse
Ouvert. Fermé. Ouvert. Fermé. Le tiroir caisse chercherait-il à rejoindre l’orchestre ?

Dans l’école de danse, tous les enfants ne participent pas aux leçons. Il y a cette petite fille, qui s’amuse avec la vieille machine du comptoir. Celle-ci est presque vide et ne conserve que quelques pièces sans valeur. La jeune solitaire appuie sur les touches pour passer son ennui, enchaîne les combinaisons de chiffres, la tête enfoncée dans la paume de sa main droite. Derrière elle, l’écho du piano la laisse de marbre, mais involontairement, elle finit par bouger ses doigts en rythme avec la musique.

Puis il est l’heure. La leçon vient de se terminer pour les petits danseurs. Ils accourent et passent devant le comptoir en reprenant avec amusement les sauts qu’ils viennent d’apprendre. L’un trébuche, et finit sa course en traînant les pieds. Personne n’a prêté attention à celle qui était assise derrière la vieille caisse enregistreuse. Sauf la nouvelle venue, qui s’est arrêtée et fixe le comptoir de ses grands yeux remplis de curiosité. Elle se dresse sur la pointe des pieds dans l’espoir d’apercevoir la discrète qui se cache de l’autre côté, mais celle-ci l’évite. Elle se penche à gauche quand celle qui la cherche regarde à droite, puis à droite quand l’autre se dirige vers la gauche.

Les deux jeunes filles finissent par tourner autour du comptoir, jusqu’à ne plus savoir qui est en train de chercher l’autre. La flûte et la clarinette se courent après sur un air distrait et distrayant, et s’achèvent sur une envolée au moment où les deux petites se percutent maladroitement.

Les cymbales résonnent dans leur tête, jusqu’à ce que la plus jeune se relève la première. Elle tourne sur elle-même comme une petite poupée de boîte à musique et emporte avec elle boucles rousses et jupe à froufrous. Le tour de manège est bref, car elle propose d’aider sa camarade à la moue renfrognée de se lever à son tour. Celle-là ne danse pas. Elle occupe simplement l’école de danse car sa grand-mère en est la propriétaire et parce qu’elle aime rester ici de temps en temps.

Cette école, c’est son territoire. Tout lui est permis, ou presque ! Alors elle ne danse vraiment pas ? Non, cela ne l’intéresse pas.

Mimi rétorque une moue curieuse et perplexe. Elle assaille sa nouvelle amie de questions en batifolant autour d’elle comme le ferait un papillon près d’un bouton de fleur, mais ne reçoit que des réponses désintéressées. Peu importe pour la nouvelle élève ! La fille de la caisse enregistreuse est intelligente et connaît beaucoup de choses ! Elle ne bouge pas et porte des habits sombres, mais dès que sa bouche boudeuse s’ouvre, alors c’est toute une mélodie de clarinette qui vient réchauffer l’atmosphère. La petite flûte est ravie d’avoir trouvé quelqu’un pour l’accompagner, et se joint gaiement à la petite ballade.

Mais le temps passe si vite qu’il est déjà l’heure de rentrer ! Les deux petites filles se saluent, l’une sautille et s’empresse de raconter avec de grands gestes sa journée à sa grand-mère, tandis que l’autre se contente de marcher doucement, les mains dans les poches.

Alors que la dernière note tombe, les deux enfants se retournent pour s’adresser un ultime regard, en espérant se retrouver le lendemain.

Scène III
Les valises valseuses
Elles sont de partout ! De toutes les tailles, de toutes les formes, sous les chaises ou sur le lit, mais que font toutes ces valises ici ? Annoncent-elles un départ, ou une arrivée ? La petite fille, perdue au milieu de cette jungle curieuse, ignore la réponse. Mais peu importe, car ses parents sont revenus !

C’est un spectacle du quotidien qui se joue aujourd’hui dans la maison de la grand-mère ! Les échanges sont nombreux, les anecdotes fusent au rythme des instruments qui s’amusent à l’unisson. Mimi ne sait plus où donner de la tête, elle court et virevolte autour de ses parents, réclame leur attention en montrant tout ce qu’elle apprend à l’école de danse. Le père et la mère applaudissent l’artiste, ravis de voir leur fille épanouie. Puis le carillon sonne. C’est déjà l’heure du repas ! Nouvelle page pour la partition. Les plats entrent et tournent autour de la famille à nouveau réunie. Ils s’enchaînent les uns après les autres dans un défilé riche en couleurs et de saveurs, encouragés par le joyeux concert des couteaux et des fourchettes. La petite flûte caracole au milieu de l’orchestre, elle ne sait où donner de la tête et se contente de profiter de l’instant présent.

L’heure tourne, les chaises se retirent. Le repas est déjà fini ? La petite fille se lève et regarde autour d’elle. Mais… N’y a-t-il pas moins de valises que tout à l’heure ?

Encore une autre vient de disparaître ! La symphonie se disloque, le rythme s’accélère. Des silhouettes sans visage passent, ne prêtant pas attention à l’enfant. Dans leur sillage, elles emportent une valise et disparaissent avec elles. Mimi tente de les rattraper, elle espère pouvoir les empêcher de continuer, mais en vain…

Il n’en reste désormais plus qu’une, laissée ouverte au milieu du grand lit. Le bourdon sinistre du violon a remplacé ce qui, il y a encore peu de temps, sonnait comme la plus belle des harmonies. La petite fille grimpe sur le matelas et s’approche du bagage en cuir. Puisque toutes les valises quittent la maison, celle-ci aussi allait devoir s’en aller, n’est-ce pas ? Alors, guidée par quelques tintements mélancoliques, l’enfant se glisse doucement à l’intérieur. La boîte se referme.

Plongé dans le silence, le bagage demeure ainsi inerte. Quelques bruits de pas résonnent enfin. La mère et le père arrivent, chacun d’un côté du lit. Ils s’installent et de penchent au dessus de la valise dans un mouvement parfaitement symétrique. La boîte s’ouvre et révèle le visage sanglotant de la petite surprise. Les parents s’approchent et l’embrassent, promettent de revenir le plus tôt possible, puis se rejoignent d’un même côté du lit. Ils adressent un dernier au revoir à leur enfant, qui les regarde partir, l’âme de peine. Eux ne se retournent pas, mais leur fille, elle, continue de regarder dans leur direction.

Mimi reste seule sur le lit, avec pour unique lumière l’éclat de la lune contre son visage rougi par le chagrin. Comme naufragée sur son radeau de plumes, elle finit tout doucement par s’endormir.

De l’autre côté du lit, la grand-mère arrive à son tour. Elle console sa petite fille en la serrant tendrement contre elle, accompagnée par une dernière élégie qui vient signer la fin de la journée.

Scène IV
La fête foraine
Sur la place du village, chacun vaque à ses occupations. On lit le journal, on se promène, on revient de la boulangerie. Quand, contre toute attente, un petit bonhomme en uniforme bigarré vient faire irruption dans cette humble fresque du quotidien.

Sa démarche semblable à un petit soldat mécanique donne le tempo à la trompette qu’il prend plaisir à faire chanter. À peine décrit-il un premier tour de la place qu’un tambour le rejoint. Ils font un deuxième tour, puis voilà que des cymbales entrent dans le rang ! Et un tuba, maintenant ! Le rythme s’accélère à mesure que la fanfare se complète. Bientôt, ce sont des danseurs et des danseuses en habits colorés et festifs qui investissent la place du village. Les applaudissements redoublent, les manèges apparaissent de nulle part. Ça y est, la fête foraine est lancée !

Sons et couleurs se chevauchent et se bousculent jusqu’à donner le tournis. Les éclats de rires s’entrechoquent à la manière d’auto-tamponneuses lancées à toute allure. Plus rien ne reste en place, c’est un ouragan festif qui emporte les villageois dans un monde où le rêve rejoint la réalité !

Parmi les âmes prises au piège, nous retrouvons la petite fille aux boucles rousses, la tête levée vers un carrousel enfiévré. Par quoi commencer ? Elle et son amie à la moue boudeuse doivent se retrouver pour profiter d’un maximum d’attractions, mais la plus jeune est arrivée au point de rendez-vous avec un peu d’avance et a du temps à perdre. Les choix sont nombreux, contrairement aux quelques pièces bien timides au creux de sa petite main. L’enfant décide de s’installer sur un banc pour attendre son amie, mais une voix l’interpelle. Juste à côté, une petite tente parée de rouge et de rose capte son attention. Une vieille dame lui fait signe. Son corps rond et vouté est enseveli sous plusieurs couches de tissus aux motifs chamarrés et étincelants. Seul son grand nez pointu dépasse d’une fente cousue de pierreries, ainsi que ses mains noueuses en dehors de manches si larges qu’elles atteignent le sol.

Mimi s’approche, attirée par la ronde de notes folkloriques qui s’échappe du mystérieux chapiteau. Un long doigt désigne l’une des petites pièces tenues dans sa main. L’enfant la remet naïvement, et regarde le sou rouler jusque sous un verre en terre cuite, aussitôt rejoint par deux autres, parfaitement identiques. Les triplets s’alignent et prennent la pose. Commence alors sous la toile bariolée une longue danse hypnotique. Les frères pots de terre se rencontrent, s’éloignent, échangent leur place et finissent par retrouver leur point de départ d’où ils saluent leur unique spectatrice.

Lequel des trois frères détient la pièce ? Remplie d’excitation, la petite hésite, puis désigne celui du milieu. Le roulement de tambour se prolonge, et s’achève sur une bonne réponse !

La joueuse sautille de joie, la fanfare redémarre. La dame au long nez agite quant à elle son corps bariolé en rythme avec ses applaudissements, avant de s’écarter pour laisser à l’enfant le choix de sa récompense. Ses grands yeux levés vers les étagères remplies de jouets en tout genre, elle finit par jeter son dévolu sur une grosse peluche assise dans un coin. Est-ce un panda ? Ou un lapin ? Difficile d’en juger, mais son pelage tacheté est ravissant ! Le cadeau remis, la petite adresse un remerciement chaleureux et s’éloigne maladroitement en tenant contre elle la drôle de peluche qui fait presque sa taille.

La vieille dame la regarde partir, puis lève les deux autres verres afin de récolter dans ses mains ridées la petite pièce dissimulée sous chacun d’entre eux.

Scène V
Pas de deux et tournicotis
Elles sont assises sur le banc, chacune à une extrémité. Les jambes jointes, les mains sur les cuisses, elles regardent droit devant elles, avec un joli sourire. L’une est une enfant, l’autre est une peluche.

Entre le piano et les petits tambours, les premières notes rebondissent dans un rythme proche du métronome. Chaque battement enclenche un nouveau geste.

Tic-tac-tic-tac

La petite se lève dans un saut à pieds joints. Elle regarde à droite, puis à gauche, de nouveau à droite, puis s’assied à nouveau.

Tic-tac-tic-tac

La petite se lève dans un saut à pieds joints. Elle regarde à droite, puis à gauche, de nouveau à droite, de nouveau à gauche - non, il n’y a toujours personne ! - puis elle s’assied à nouveau.

Tic-tac-tic-tac

La petite se lève dans un saut à pieds joints. Elle regarde à droite, puis à gauche, de nouveau à droite, la peluche tourne la tête, de nouveau à gauche, se penche en avant, attend trois temps, tourne sur elle-même, puis elle s’assied à nouveau.

Tic-tac-tictic-tac

La petite se lève dans un saut à pieds joints. Elle regarde à droite, la peluche aussi, puis à gauche, la peluche l’imite, de nouveau à droite, la peluche reprend, de nouveau à gauche,  elle trouve cela amusant, elle se penche en avant, attend trois temps, la peluche se lève, elles tournent sur elles-mêmes, puis s’asseyent à nouveau.

Tactictoctic-tactactac

La petite se lève dans un saut à pieds joints. Elle regarde à droite, la peluche à gauche, puis à gauche, la peluche à droite, n’y a-t-il pas quelque chose de bizarre ? La petite s’étonne, la peluche se fige, elle tourne la tête, la peluche aussi. Mimi se retourne plus vite, et la prend en flagrant délit ! Elle se lève et s’exclame, la peluche tombe en arrière, emportée par le poids de sa propre tête.

Ce n’était pas une peluche en fait !

Voilà qu’elle roule et se redresse, titube avec souplesse, la petite la rattrape et la sert contre elle. Son amie arrive à ce moment et découvre la supercherie. Est-ce que c’est une plaisanterie ?

Non, c’est une peluche magique !
Et elle s’appelle Bigoudi !

Scène VI
La chambre
La tente rouge et rose a disparu, la vieille dame n’existe plus, tout comme la fête foraine, qui s’est envolée aussi vite qu’elle est arrivée. Sur la place, il ne reste plus que Mimi, son amie la clarinette, et la peluche qui a le tournis. Les deux enfants l’observent tituber naïvement, puis rouler doucement sur son derrière pour aussitôt retrouver un équilibre précaire. Le piano accompagne ses faits et gestes d’une suite de notes légères et un tantinet moqueuses.

Les amies se regardent, ne sachant trop quoi faire, mais la plus jeune refuse d’abandonner sa nouvelle peluche, qui finalement, n’en est pas vraiment une. Une idée vient, et voilà que l’attendrissant trio se retrouve dans la chambre de celle aux boucles rousses.

Bien sûr, c’est un secret, la grand-mère ne doit rien savoir ! Comme mis dans la confidence, les instruments décident de suivre la scène avec une discrétion feinte, prêts à s’exclamer au moindre retournement de situation. Les petits filles s’agitent entre lit, armoires et coussins, en quête d’une cachette idéale pour la réfugiée à spirales, déjà en train de tournicoter sur le bord du matelas. Un bruit de porte résonne. Les têtes se redressent, à l’affût. La grand-mère est rentrée ! Oh non ! Et rien n’est préparé !

Le rythme s’accélère, la cachette nargue les fillettes qui désespèrent à la trouver ! Mais ! Voilà que la peluche se hisse tout en haut de l’armoire ! Comment est-elle arrivée là-haut ? Elle perd l’équilibre ! Elle tombe en même temps que le violon !

Un coussin glisse et réceptionne la maladroite, qui rebondit, s’envole et atterrit sur le petit bureau en bois. Elle tourne, croise des pas emmêlés, et ne voit pas le bord de la table juste à côté ! Vite, une fille jette un second coussin, mais l’autre ne le voit pas et se le prend en plein visage. Elle tombe sur le lit, l’oreiller roule et se dépose au pied du bureau. La peluche fait un pas dans le vide, et voilà qu’elle vole à nouveau ! Les notes aiguës suivent gaiement sa trajectoire oblique. Elle continue de tomber et de rebondir ! Impossible pour elle de rester en place, on lui court après, on la mitraille de coussins pour étouffer le bruit de ses chutes rocambolesques, le crescendo s’emporte, et sans comprendre comment, la bestiole est désormais suspendue au lustre du plafond !

Pluie de plumes dans la chambre. Le balancier à ampoule improvise un nouveau mouvement, une fillette cherche à se mettre en dessous, mais est déséquilibrée par un polochon. Elle tombe et se cogne au lit, qui se décale d’un pas sur le côté. Son amie recule, s’emmêle les pointes et tombe en arrière. L’armoire la réceptionne, mais penche dangereusement en avant. Elle s’affaisse et s’écrase contre le lit !

Le vacarme est délicieux de comédie, et la cerise s’invite dans une dernière harmonie qui vient signer la séparation du lustre avec le plafond et sa rencontre avec le bord du lit.

Patatras. La porte de la chambre s’ouvre, le silence règne et s’attend au sermon. Mais la vieille dame ne trouve pas les mots devant un tel spectacle. La tête de sa petite fille surgit du tas de coussins répandu par terre. Elle tente de trouver une explication, aussitôt soutenue par sa camarade qui s’extirpe de sous l’armoire. En vain.

Finalement, la cause de tout ce remue-ménage se glisse hors des couettes emmêlées et tourne doucement la tête vers la dame âgée. Celle-ci lui adresse deux yeux ronds, mais ne peut se résoudre à s’énerver. La petite bête est maladroite, mais inoffensive, et s’est déjà réfugiée dans les bras de celle qui l’a accueillie. Aucun doute, l’amitié est déjà scellée, et la flûte a une nouvelle camarade avec qui jouer !

Acte second
Scène I
Vivi
Une paire de jambes blanches court vers la droite, puis vers la gauche. Elles font les cent pas, elles sont impatientes. En fond, le motif de la scène d’ouverture résonne, à l’exception que cette fois-ci, la flûte a rejoint la partition.

Enfin, un cri de nouveau-né. Un rayon de lumière vient éclairer le couple d’aviateurs, tous les deux penchés au-dessus d’un landau bien familier. La jeune fille aux boucles rousses accourt, rayonnante dans sa tenue de ballerine, sa peluche entre les bras. Voilà quelques mois qu’elle a fêté ses dix ans. Quelques mois, c’est également la durée depuis laquelle ses parents sont revenus, avec pour petite surprise un ventre rebondis et l’annonce d’une famille sur le point de s’agrandir.

Sa grand-mère est venue la chercher à l’école de danse. La naissance était prévue pour plus tard, mais la petite sœur ne pouvait plus attendre. La grande sœur, elle, déborde de joie. Plus de valises, ni ouvertes, ni fermées à la maison ; la famille est au grand complet.

En signe de réjouissance, la ballerine s’éloigne du landau à grandes enjambées et dépose son amie à spirales au sol. Tandis qu’on achemine le nourrisson jusqu’à la maison, elle tourne et saute, propose un enchaînement qui capte l’attention et attise les instruments à corde, imitée de près par sa petite peluche qui, même si elle trébuche à certains moments, la suit avec beaucoup d’entrain. Toutes les lumières fixent la petite artiste qui a fait beaucoup de progrès. Son amateurisme est compensé par une énergie à toute épreuve et sa silhouette s’est allongée et affinée. La pose finale est réussie, Bigoudi peine à la maintenir et tombe, mais son amie l’aide à se relever aussitôt. Toutes les deux font la paire, et saluent, ravies de leur performance.

Mais l’heure n’est pas au spectacle. On les appelle, il est déjà temps de rentrer ! La mélodie baisse d’un ton : il ne faut pas réveiller le bébé.

Dans la chambre des parents, le landau s’est changé en berceau. Instruments comme pas de danse orbitent autour du couffin, presque enseveli sous un tas d’ornement couleur pastel. La mère et le père restent au chevet de leur progéniture, la grande sœur est assise sur leur lit avec sa petite camarade. L’ambiance est douce et joyeuse, protégée par une mélodie répétitive qui rappelle celle d’une boîte à musique.

Mais soudain, un doudou est lancé hors du berceau. La tonalité bascule d’un octave. Pas d’inquiétude, le père s’empresse d’aller le récupérer pour le rendre au chérubin. Tout rentre dans l’ordre. La mère et le père restent au chevet de leur progéniture, la grande sœur est assise sur leur lit avec sa petite camarade… Mais le doudou est lancé à nouveau ! Cette fois, c’est la mère qui va le ramasser par terre, sous le regard observateur de sa fille aînée.

Pas le temps pour le motif de reprendre, l’heure sonne, la porte de la chambre s’ouvre. C’est la grand-mère. Le bébé dort, les parents sont appelés à venir dans le salon. Ils s’éloignent du couffin et le désignent à Mimi avant de sortir. Elle doit veiller à ce qu’il n’arrive rien. Naturellement, la grande sœur accepte.

La porte de la chambre se ferme, la musique reprend son air de berceuse. L’atmosphère s’adoucit, mais le doudou n’attend pas et s’échappe à nouveau ! Vite, la jeune fille se dépêche d’aller le récupérer. Sur la pointe des pieds, elle le replace près de sa petite sœur et s’assure qu’il ne puisse pas la déranger, mais à peine fait-elle un pas en arrière que le morceau de tissu s’envole à nouveau. Bigoudi intervient, mais le doudou ricoche contre sa tête et glisse maladroitement sous le lit des parents. Sans une seconde d’hésitation, la grande sœur s’aventure sous le matelas. Seuls ses petits pieds dépassent et laissent deviner ses efforts pour retrouver le bien du nouveau-né.

Elle ressort. Dans sa main gauche, le doudou est encore entier. Mais quelque chose d’autre a été déniché. Mimi le tire vers elle. C’est une valise, celle-là même dans laquelle elle s’était cachée autrefois.

Les notes jouées se refroidissent, la crainte de voir les parents partir s’infiltre dans la chambre à coucher. L’enfant jette un œil à sa petite sœur, puis se penche de nouveau au-dessus du bagage en cuir. Pas le temps de réfléchir, la voix des parents se fait entendre. Les pensées se bousculent, et encouragée par les grincements aigus des cordes, la valise se retrouve rapidement glissée en dessous du berceau, derrière les volants de tissu.

La porte s’ouvre, rien n’a changé dans la chambre. La jeune fille fait mine de rendre le doudou au bébé tout en poussant discrètement du bout du pied le dernier coin visible du bagage de cuir. Les parents ne remarquent rien. La mélodie reprend, l’ambiance se réchauffe. Le tableau initial se remet naturellement en place, la mère et le père restent au chevet de leur progéniture, la grande sœur est assise sur leur lit avec sa petite camarade. Seule la porte de la chambre, demeurée ouverte, est différente, menaçante, prête à aspirer quiconque marche trop près d’elle. La grande sœur la regarde, tandis que la scène s’achève.

Scène II
Pas de trois en relais

Première entrée

À la sortie de l’école de danse, Mimi discute gaiement avec son amie la clarinette. Toutes les deux ont un peu grandi et effleurent désormais du bout de leur âge une adolescence fraîche et rayonnante. Une myriade de petites filles en tutu glisse hors des murs de l’école et salue celle qui maintenant fait partie de leurs aînées.

Le piano, les cordes et les cuivres couvrent la fin de la journée avec réjouissance. C’est le printemps, les espoirs bourgeonnent sur le visage des danseuses, excitées par le spectacle qu’elles préparent. Mimi y joue un rôle important cette année, alors elle se prépare avec rigueur et plaisir pour ne décevoir personne. La voilà qui trottine, répète inlassablement les mêmes mouvements sous l’œil avisé de son amie et de Bigoudi qui tient de mieux en mieux debout. Le temps est à l’amusement, les notes sautillent sur la partition et s’enchaînent avec une attachante félicité. Mais il est déjà l’heure de rentrer pour la jeune danseuse. Heureusement, le chemin jusqu’à la maison n’est pas bien long : un enchaînement de sauts et de pirouettes suffit à lui faire rejoindre le pallier où vient l’accueillir sa grand-mère.

Dans le foyer, les pas de danse sont discrets et disséminés par intermittence entre les meubles du salon. Sans perdre de temps, Mimi s’empresse de rejoindre la chambre à l’étage. Là-bas, sur un grand tapis coloré, elle retrouve sa petite sœur, occupée avec ses nombreux jouets. Celle-ci n’est déjà plus en âge de dormir dans un berceau et se précipite maladroitement dans les bras de sa grande sœur sans oublier de diriger ses mains potelées vers les longues oreilles du petit panda.

Seulement, une sonnerie de téléphone vient interrompre les touchantes retrouvailles. La mélodie se tait subitement, la grande sœur se tourne vers la porte de la chambre. Elle ne danse plus. Ses pas discrets l’approchent de la sortie, où elle peut entendre sa grand-mère décrocher le combiné.

L’annonce sert le cœur de la ballerine. Papa et Maman ne rentreront pas ce soir à cause du travail.

L’atmosphère poudrée semble désormais bien fade maintenant que la musique n’est plus là pour la faire résonner. Un bruit se fait bientôt entendre dans les airs. C’est un avion de papier qui traverse la chambre, tirant derrière lui un long ruban de soie rouge. La petite sœur suit sa trajectoire avec curiosité, mais est surprise par la bande de tissu qui se détache et s’échoue contre son visage. L’avion continue quant à lui sa course et disparaît, sans réaliser ce qu’il a semé derrière lui.

Mimi sursaute et se précipite, mais trop tard, les pleurs de la petite envahissent la chambre. La grande sœur chasse le ruban, puis, après une brève hésitation, le noue autour de son poignet. Elle se lève alors et tape en rythme dans ses mains et se lance  aussitôt dans quelques pas guillerets. Son amie à spirale la rejoint, tourne avec elle et tombe en arrière. La danseuse l’imite, et la petite sœur se met à rire.


Seconde entrée

Une nouvelle danseuse entre dans la chambre. Elle passe devant celle qui s’occupe de sa petite sœur, tape dans sa main en guise de relais, et emporte la scène dans un nouveau tableau et une différente mélodie.

Mimi a encore grandi, sa tenue de spectacle est ravissante. Cette année, c’est elle qui incarne le rôle principal. Personne ne voit les nombreux rubans rouges attachés autour de ses bras et de ses jambes. Elle non plus. Les préparations sont nombreuses dans l’école de danse, tout doit être impeccable ! Les danseurs courent et accourent comme une ribambelle de couleurs toutes plus vives les unes que les autres. Le décor se construit à bout de bras, reflétant dans ses formes approximatives le petit budget de l’école, et dans ses couleurs l’entrain de ses élèves.

Au premier rang, une série de chaises est consciencieusement mise en place. Elles accueilleront la famille des participants. La belle danseuse ne peut contenir son excitation, encouragée par son amie, qui a pris en charge une partie de l’organisation, et Bigoudi, toujours fidèle et elle aussi maquillée pour l’occasion. Les instruments profitent de ce nouvel air chargé d’espoir et d’adrénaline pour chanter un air enjoué qui répond aux battements du cœur de celle qui occupe le premier rôle. L’heure tourne, les spectateurs entrent.

La grand-mère et la petite sœur sont les premières à arriver. Elles sont aussitôt accueillies et guidées vers les places du premier rang. À leur côté, deux autres chaises sont réservées et attendent patiemment d’être occupées. La danseuse accourt, enveloppée d’un long voile blanc pour ne pas révéler sa tenue avant le spectacle. Elle embrasse sa grand-mère et sa petite sœur, demande pourquoi ses parents ne sont pas encore arrivés. La vieille dame la rassure, ils seront là pour le spectacle et ont seulement pris un peu de retard.

Mais pas le temps pour l’inquiétude, car il est déjà l’heure de s’occuper des ultimes réglages. Le premier rôle est appelé en coulisse, elle disparaît après avoir jeté un dernier regard aux deux chaises vides.

Les lumières s’éteignent doucement, les conversations des spectateurs les suivent. Dans ce profond silence, seule la respiration de la danseuse se fait entendre.

Un, deux, trois, quatre !

Les percussions éclatent, les projecteurs brûlent : ça y est, le spectacle commence ! Main sur la hanche, jambe en l’air, un visage plus rayonnant que le soleil, Mimi lance par ses quelques gestes le coup d’envoi. Aussitôt, un festival de sons et de couleurs envahit la salle de spectacle. Les applaudissements retentissent et rejoignent aussitôt le rythme de la musique. Les élèves se succèdent en plusieurs petits groupes sur scène et proposent leurs meilleurs enchaînements, le tout dans une narration naïve et colorée sublimée par une farandole de styles musicaux bigarrés. Les poses sont soignées, l’investissement colossal pour ces enfants qui se sont préparés pendant toute une année.

Le rôle principal entre à nouveau et détonne par son costume volumineux, rempli de couleurs et d’ornements de tissus. Elle tourne, vrille avec allégresse, accompagnée par la petite bête à spirales qui fait preuve d’une incroyable souplesse aux côtés de sa partenaire. L’audience applaudit à foison, le spectacle continue.

Tous les danseurs se retrouvent enfin dans un dernier enchaînement commun. La ronde est belle, le dernier pas est donné au rôle principal qui achève sa pose sur la dernière note de la mélodie. La danseuse sourit, essoufflée mais ravie.

Les deux chaises, elles, sont toujours vides.

On applaudit, on siffle. Les danseurs alignés comme une guirlande lumineuse s’inclinent dans un salut conjoint. Les spectateurs quittent la salle, les lumières tombent, le décor se déconstruit lentement. Le brouhaha remplace les instruments qui en profitent pour se reposer.

Bientôt, la scène est complètement vidée. Plus de décor, plus de danseur, plus de spectateur. Seules deux chaises demeurent. Dans le silence, Mimi s’approche. Son sourire lutte pour ne pas quitter son visage, mais alors qu’elle s’installe sur l’un des deux sièges, il se déforme, coincé dans sa mâchoire serrée. Le sanglot est d’abord retenu, puis éclate bruyamment derrière des petits doigts tremblants.


Troisième entrée

Derrière les deux chaises, l’ultime danseuse fait son apparition. Elle a encore grandi, son corps désormais proche de l’âge adulte est entièrement recouvert de rubans rouges. Une mélodie gracieuse et mélancolique s’éveille et propose à la demoiselle quelques tours piqués sans prétention. Les pas sont graciles, l’éloignent des deux chaises vides puis la font revenir en arrière. Elle s’assied en dévoilant sa nuque rose pêche.

À ses côtés, sa petite sœur a pris place. Elle la regarde, pleine d’admiration. Ses jambes et sa tête balancent en rythme avec les quelques notes du violoncelle. Mimi lui adresse un sourire et se lève avec énergie de son siège, prête à esquisser de nouveaux pas.

Mais la sonnerie du téléphone retentit.

La petite sœur quitte aussitôt sa chaise et s’empresse d’aller répondre. Son aînée tend son bras vers elle, comme pour essayer de la retenir, mais en vain. Un nouvel avion de papier vient transpercer l’horizon. Dans un grand jeté, la danseuse intercepte le ruban et s’apprête à le nouer mécaniquement autour d’une partie de son corps. Mais elle réalise qu’elle n’a plus nulle part où l’attacher. Ses bras, ses jambes, sa poitrine, ses doigts ; tout ressemble désormais à un bouquet de nœuds écarlates. Non, il reste un endroit. Perchée sur ses pointes, la ballerine enveloppe finalement le ruban autour de son visage et choisit de se bander les yeux.

Mais à peine l’acte est-il accompli qu’une vague de petits tutus blancs vient submerger la jeune demoiselle. Emportée par le flot, la voilà précipitée près de l’école de danse où une drôle d’invitée vient de faire son entrée en scène. Sa tenue bariolée illustre son origine insulaire, son visage multicolore annonce un message important.

Perchée sur une estrade, l’inconnue apporte avec elle tout un festival de notes exotiques face aux cordes qui ne trouvent plus quoi dire. Ses pas sont explosifs, provocants et captivants par la liberté dont ils jouissent. Dans une ultime pirouette, l’étrangère révèle une clé en or, attachée à une chaîne suspendue au bout de son petit doigt. L’annonce est volontairement frontale. Qui se sent capable de venir décrocher cette opportunité ensoleillée ?

Les petits danseurs sont encore trop inexpérimentés, aucun d’eux n’est assez grand pour attraper le précieux sésame. Les regards se tournent donc instinctivement vers la plus accomplie des écolières, persuadés que cette occasion lui est avant tout destinée. Mais la danseuse ne peut plus voir la clé scintiller. Alors elle recule, fait quelques pas en arrière, et s’apprête à se volatiliser.

Au dernier moment, un air de clarinette interrompt sa fuite. La meilleure amie se tient face à la fugitive et lui bloque le passage. Son air boudeur a laissé sa place à celle d’une expression mécontente et déterminée. Elle la prend par les épaules et la pousse en avant. Mécaniquement, la danseuse recule à nouveau, sa tête tournant d’instinct vers l’arrière, vers là où les avions en papier ne cessent de voler. Mais à nouveau, son amie s’interpose. La mélodie culmine dans cet échange pris en étau, jusqu’à ce que la ballerine s’écroule, aveugle et muette, déchirée par le choix qui s’impose à elle. Le silence tombe, la situation semble insolvable.

Après quelques temps de repos, la clarinette chante à nouveau. La chaleur de ses notes sonne comme un appel auquel le piccolo ne tarde pas à répondre. La petite sœur s’approche, à la fois guillerette et solennelle. Ses couettes virevoltent en même temps que les longues oreilles du panda qu’elle tient dans ses bras.

Alors qu’elle arrive devant sa sœur, les instruments se taisent. La fillette tend alors ses petits bras et retire le ruban autour du visage de son aînée avant de l’attacher dans ses propres cheveux. Puis sans attendre, elle s’empare de la main de la danseuse et l’aide à se relever. Réfugié dans son dos et aidé de la clarinette, le piccolo souffle alors un air d’encouragement à la danseuse, qui se redresse et est poussée en avant.

Ses pas lui font fendre le nuage de tutus blancs, jusqu’à atteindre la détentrice de la clé dorée. Derrière l’estrade, on distingue vaguement la silhouette de la professeur de danse.

Mimi lève une main hésitante, le défi est accepté. La musique exotique reprend tandis que l’inconnue exécute un nouvel enchaînement exagérément festif. Elle tourne et s’agite, puis fait signe à la candidate de la suivre. Celle-ci se tourne vers le piccolo et la clarinette, qui n’ont pas attendu pour la rejoindre. Chacune prend la belle par une main, puis l’accompagnent dans ce nouveau pas en avant.

Scène III
L'audition
Sous la lumière d’un unique projecteur, la danseuse se déplie en même temps que la mélodie. Quelques notes lentes et mélancoliques dessinent des gestes gracieux d’une impeccable technique. La ballerine pivote, fait un pas de côté et prend de nouveau la pose, semblant flotter comme l’archet sur les quelques cordes du violon. Pas de respiration, pas de battement, l’instant semble dépourvu de secondes.

Mais alors qu’elle arque ses bras couleur pêche, juchée sur ses pointes, un avion en papier traverse le faisceau de lumière. L’attention est détournée l’espace de quelques notes, la candidate reprend aussitôt sa démonstration. Mais au détour d’une fragile arabesque, l’avion de papier revient, plus proche cette fois de la demoiselle. L’équilibre est conservée, mais le cœur vacille. La danseuse se redresse et lève la tête en quête du gêneur, qui atterrit à ses pieds.

La musique s’arrête, la démonstration également. Deux yeux fixent le triangle blanc qui, semble-t-il, refuse de la quitter. Le moment est long et douloureux. Le projecteur est sur le point de s’éteindre, car il est l’heure de l’ultime révérence.

Une jambe se lève.

Et piétine le morceau de papier.

Mimi se redresse, la flûte se réveille. Ses bras s’écartent, le projecteur s’élargit et laisse Bigoudi apparaître aux côtés de sa partenaire. Le regard est déterminé, l’expression brûle de passion. Une nouvelle inspiration, puis les percussions se déchaînent dans un saut à l’unisson.

Un grand sourire éclate sur le visage de la danseuse, la mélodie s’emporte. Ses pas ne respectent plus aucune norme, ils sont guidés par l’instinct, le talent et la plus pure des sincérités. Ses bras s’activent, ses jambes se lèvent ; à chacun de ses gestes, Mimi pulvérise ses chaînes. Le rythme frappe comme une série de coups de poing, il prend aux tripes par sa vigueur, ne semble plus en mesure de pouvoir s’arrêter. La danseuse se transcende et commence à tourner autour de sa peluche qui glisse sans hésitation entre ses longues jambes. Toutes les deux se regardent, puis une pluie de pas francs et tonitruants s’abat sur la petite bête qui se met à danser entre les gouttes sans jamais être touchée. Elle titube, roule et se balance entre les pieds de sa partenaire comme elle l’a toujours fait. Le tricotage est désarmant de facilité.

Plus de place pour les avions de papier qui continuent de faire irruption. La vocation de la danseuse les attrape et les déchire sans leur prêter attention. Elle vrille, saute, les rubans rouges se défont et tombent sous ses pas rythmés et mélodieux. Tout l’orchestre se déchaîne, repousse ses limites dans une symphonie brillante d’espoir. Le corps de Mimi s’exclame, imité par celui de Bigoudi qui, dans un parfait mouvement en miroir, la rejoint dans un éblouissant final. La musique s’achève dans une ultime envolée.

Rideau.

Scène IV
Le départ
La danseuse regarde la clé en or qui se balance désormais au bout de ses doigts. Un simple pas la sépare de la porte qui se tient devant elle, prête à être ouverte. Le bourdon des cordes suscite l’attente, mais le tintement d’un carillon la dissuade d’avancer. Alors, dans un élégant revirement, elle s’éloigne et suit la musique.

Ses enjambées la conduisent d’abord auprès d’un nid de petits tutus blancs qui, comme elle auparavant, répètent inlassablement les mêmes pirouettes avec une touchante maladresse, le tout sous le regard avisé de la grande enseignante.

Trop vite ! Plus doucement ! Plus vite, maintenant ! Le bras en l’air, la jambe tendue ! Non, l’inverse !

Mais l’exercice est interrompu, il faut saluer l’ancienne élève sur le point de s’en aller. Celle-ci rejoint le banc de tulle blanc et échange avec lui, le temps de quelques pas naïfs, un motif chanté par les instruments à vent, avant de rejoindre la professeure de danse qui la regarde avec tendresse. Toutes les deux se réunissent dans un bref enchaînement gracieux, signe de leur complicité et de la gratitude que l’une éprouve pour l’autre. Mais comme emportée par le courant, la danseuse ne s’arrête pas davantage et continue sa route, laissant derrière elle de nombreux souvenirs et un signe de la main en guise d’au revoir.

Ses nouveaux pas la mènent sur la trajectoire inverse de sa meilleure amie, elle aussi sur le départ. Sous le regard de la vieille caisse enregistreuse, elles se tapent dans les mains et s’autorisent un dernier tour autour du comptoir. Toutes les deux savent qu’elles ne tarderont pas à se retrouver, alors dans un dernier échange, chacune se sépare en s’adressant, comme la première fois, un dernier regard avant de se quitter.

Mimi ne cesse de tourner et de gambader. Sa robe et ses boucles rousses dessinent autour de son corps des arabesques remplies de légèreté. La mélodie respire l’espoir et la liberté.

À la maison, la grand-mère sirote sa tasse de thé. Sa petite fille s’autorise un détour et la rejoint à table pour une ultime dégustation. Le tintement des tasses et le carillon des cuillères rejoignent le temps de quelques mesures une musique rappelant les premières scènes. La complicité est intacte et solidement entretenue, toutes les deux regrettent d’avoir à se séparer, mais la grand-mère tire en arrière la chaise de la danseuse, car il est temps pour elle de continuer son envolée.

La voilà qui tourne et saute, se faufile sans gêne ni retenue au milieu des meubles qui à présent servent à sa chorégraphie. Elle se glisse et s’échappe, avance de quelques pas, et termine sa course dans la chambre de la benjamine. L’endroit a grandi, mais dans l’esprit de la sœur aînée, le berceau et le tapis coloré n’ont pas changé de place. Assise au milieu de nombreux jouets, la fillette répète les gestes de sa version passée et s’empresse de rejoindre la danseuse sous les encouragements des notes impertinentes du piccolo. Toutes les deux se retrouvent et profitent de ce bref moment pour échanger une dernière étreinte. Mais la petite fille se souvient, elle tient à offrir quelque chose ! Alors elle s’écarte et court à travers sa chambre, trébuche et se relève sans y prêter attention. Elle rejoint finalement le berceau et se glisse sous ses volants poudrés.

La valise réapparaît, comme prête à accomplir sa destinée. Les souvenirs comme les motifs des dernières scènes reviennent par vagues, mais cette fois-ci il n’est plus question d’un départ redouté, mais bien d’une nouvelle opportunité. Posée sur le grand lit, le coffre de cuir s’agite et s’active. Serait-il lui aussi pressée de partir en voyage ? Bien sûr, car à l’intérieur, c’est Bigoudi qui réserve sa propre surprise !

Le départ est imminent, Mimi saisit son bagage et emporte sa partenaire. Sa sœur et sa grand-mère se réunissent pour la regarder partir.

Plus que quelques pas pour rejoindre une bonne fois pour toute cette porte qui l’attend depuis tout ce temps. La danseuse s’empare de la clé et commence à s’approcher, mais un dernier obstacle est annoncé par le grondement des cordes. Mimi lève les yeux, ce sont ses parents qui lui barrent le passage.

La confrontation est directe et dure. L’hésitation, palpable. Les instruments se taisent peu à peu, seuls les battements du cœur demeurent. La main agrippée autour de la poignée de cuir, Mimi s’arrête de bouger, le regard baissé. Bigoudi, elle, n’attend pas, et contourne le couple d’aviateur pour rejoindre la porte entrebâillée. L’effort est absent, l’acte transpire l’évidence. Alors la demoiselle se redresse, confronte une dernière fois le regard sévère de sa mère et de son père, puis, dans un dernier souffle, les contourne à son tour et franchit le décisif pallier, sans se retourner.







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Mimi DellacchioCivile

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MessageSujet: Re: Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time!   Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time! EmptyLun 15 Nov 2021 - 18:23
Acte troisième
Scène I
Bienvenue à Ekaeka !
Les premières notes sont offertes par un petit ukulele. Il fredonne naïvement, surfe sur le bruit des vagues, bercé par le tempo apaisant de la ville insulaire. L’orchestre n’a pas fait le voyage, mais le petit instrument ne s’en préoccupe pas et s’amuse comme un enfant.  Sait-il seulement qu’il est seul ? Sans doute ne se pose-t-il tout simplement pas la question, car après tout, quelle différence ? Lui est heureux, c’est tout ce qui compte.

Dans le quartier marchand, les couleurs impudiques des bâtiments s’éveillent à leur tour, comme autant de fleurs ravies de ressentir à nouveau la caresse des rayons du soleil. C’est un véritable arc-en-ciel qui s’exhibe, qui dévoile ses courbes bigarrées, peut-être un peu provocantes, dans l’espoir de rivaliser avec celles des vêtements bariolés des passants. Les robes se gonflent, les chapeaux ondulent, le corps lumineux des habitants sonne comme une réconfortante mélodie. On s’emmêle, on se sépare, les couleurs s’échangent et se multiplient, et bientôt, c’est une effervescence irisée qui s’empare des rues de la ville.

Trompettes, maracas et tambour d’acier se joignent à la danse, il n’y a plus d’autre choix que de se laisser emporter par ce rythme ensoleillé.

C’est là qu’on l’aperçoit, perdue au milieu de ces innombrables couleurs, notre chère danseuse, immaculée dans sa robe perlée, ne sachant où donner de la tête devant cette fiévreuse assemblée. Malgré sa régularité, le nouveau tempo la prend par surprise, il la bouscule, la précipite, la confronte à autant de sourires qui finissent par lui donner le tournis. Bigoudi a déjà tout compris et lui montre le pas à suivre. Elle se faufile sans mal et attire sa partenaire devant une série d’échoppes colorées.

On l’interpelle, lui propose de danser, et voilà qu’on l’invite déjà à déjeuner ! La demoiselle est prise par la main, elle tourne et vacille pour aussitôt être attablée. Mais par le temps de réagir qu’un trio de serveur se met désormais à défiler autour d’elle, chacun proposant une de leurs spécialités. Les cloches se soulèvent dans un concert de desserts : celui-ci sent admirablement bon, mais celui-là a de si jolies couleurs ! Dans ce cas, elle les aura tous les trois !

Oh, mais voilà qu’on l’appelle ailleurs ! Vite, Mimi saisit son pain fourré avant d’être emportée dans une palmeraie de vêtements ! Il y en a des grands, des petits, des colorés, des chamarrés, des bigarrés, y a-t-il seulement une couleur qu’ils ne connaissent pas ici ? La danseuse est guidée face à un miroir, le vendeur la regarde, non, cette robe est bien trop fade ! Il claque des doigts, ses collègues surgissent de nulle part. Les porte-manteaux s’animent, les robes se remplissent et se perdent dans une valse exotique. La cliente les regarde tourner et se déplier, elle pointe du doigt la première, mais se ravise et préfère la suivante. D’une main experte, le vendeur saisit le vêtement sélectionné et le glisse sous le cou de sa protégée. Les chapeaux sont les suivants. En paille ou en tissu ? Il faut un petit nœud pour décorer une tête aussi dégarnie ! Et voilà que les chaussures accourent ! Elles s’emportent et se perdent dans un numéro de claquettes. Le vendeur attend, Mimi choisit une paire de souliers restés en retrait. Finalement, on la glisse derrière un rideau, et ni une ni deux, la voilà changée de la tête aux pieds !

On applaudit, on salue l’artiste, mais celle-ci a à peine le temps de se retourner qu’on enveloppe désormais autour de ses épaules une longue serviette colorée. La coiffeuse, armée de son peigne et de ses ciseaux, observe les boucles rousses de son invitée qu’elle fait asseoir à ses côtés. La main contre le dossier, elle envoie tourner le siège et s’affaire à éclaircir le visage de sa cliente, tandis que la petite Bigoudi se dandine aux pieds de sa partenaire changée en toupie. Les mèches s’envolent, le sèche-cheveux rugit, et voilà que dans une dernière révolution, la danseuse découvre avec plaisir sa nouvelle effigie. La serviette se déploie, envoie voler les boucles abandonnées et annonce comme un drapeau de course le départ pour une nouvelle envolée.

Mimi récupère sa partenaire et sautille avec elle jusqu’au pieds de petites marches d’escaliers. Tout autour d’elle, une myriade de jeunes danseurs font leur apparition et l’invitent à rejoindre leur joyeuse chorégraphie. La demoiselle écarte les bras et ne tarde pas à se laisser emporter elle aussi. Les instruments se réunissent alors dans un spectacle improvisé, rejoignent les danseurs dans ce festival coloré aussitôt achevé par le carillon du quartier.

Tous les jeunes danseurs gravissent les marches et disparaissent dans le bâtiment. On invite Mimi à les rejoindre, mais la jeune demoiselle profite de ce dernier instant pour contempler avec fierté la façade de l’école qui allait l’accueillir pendant trois années. Ne pouvant plus attendre, elle prend finalement Bigoudi dans ses bras, et se précipite à son tour vers le rêve qu’elle s’est forgée.

Scène II
Le restaurant
Les jours passent, la lumière du soleil se pare de teintes plus chaudes : c’est signe que la soirée approche. Les portes de l’école s’ouvrent à nouveau et laissent s’échapper une folle nuée de jeunes danseurs éreintés. Les leçons sont finies, tous se retrouveront le lendemain pour répéter ce qu’ils ont appris. Ils se saluent, s’autorisent quelques valses passagères avant de s’éparpiller pour retrouver chacun leur foyer. Au milieu de cet essaim, notre petite Mimi est encore enivrée du nectar qu’elle vient de goûter. Elle titube, balance tantôt à droite, tantôt à gauche, toute retournée par sa formidable journée. Bercée par les quelques notes de la ville, elle finit par retrouver ses esprits et, accompagnée de Bigoudi, se prépare sans doute déjà à retrouver son lit.

Mais comme l’horloge, la danseuse n’a en réalité pas encore fini de tourner. Ses pas légers la guident au travers du quartier commerçant jusqu’au seuil d’une petite entrée, partiellement dissimulée derrière des chutes de tissu fleuris. Elle entre et est aussitôt accueillie par les propriétaires et habitants du restaurant. En fond, un air de clarinette flotte doucement. La voix de la patronne résonne comme un tambour et chasse les dernières brumes de sommeil qui se sont logées dans les yeux de la jeune locataire. Celle-ci n’a pas le temps de se changer ; à peine rentrée de l’école, la voilà qui enfile son joli tablier et cache ses boucles rousses dessous un foulard qui signe le début de son service du soir.

La cloche de l’entrée sonne, les premiers clients sont déjà là ! L’endroit n’est pas bien grand, mais l’odeur des bols remplis de bouillon suffit à attirer toujours plus de gourmands. On appelle la petite serveuse, et la voilà qui accourt. La maladresse de ses pas trahissent son amateurisme, mais son sourire rayonnant suffit à lui pardonner ses petites erreurs.

L’heure tourne à l’insu de tous. Les clients se repaissent des plats qui leur sont servis, trouvant dans les virevoltes délicates de la jeune employée une fraîcheur suffisante pour oublier qu’ils sont en train de se brûler la langue. La demoiselle navigue avec de plus en plus d’aisance entre les tables, manipulant à bout de bras les gros bols de nouille encore fumants. Elle répond aux appels avec allégresse, sans s’arrêter de tourbillonner au milieu des innombrables tintements de la cloche d’entrée.

Le dernier bol est servi, le dernier client disparaît, repu. Derrière le comptoir, on s’avise des recettes du jour tandis que Mimi se défait de son uniforme. La nuit est tombée depuis longtemps, Bigoudi s’est déjà assoupie sur son tabouret. Sa partenaire la prend avec elle, salue ceux qui ont la gentillesse de l’héberger, et rejoint sans tarder sa petite chambre à l’étage.

Usés par la journée, les instruments se sont presque tous endormis. La danseuse a déjà revêtu sa tenue de nuit. Elle s’approche doucement de son lit, propose une dernière pirouette, puis se laisse tomber en arrière. Le matelas se gonfle, les lumières s’éteignent, il est temps de souhaiter de beaux rêves.

Scène III
La nuit des quatre fleurs
En plein cœur de la nuit, une drôle de mélodie s’éveille. On l’entend à peine, même en tendant l’oreille, comme un chuchotis venu ricocher d’on ne sait où contre les maisons du quartier. Est-ce un songe ? Est-ce la réalité ? Mais pourquoi donc se poser la question, quand on peut se contenter de profiter ? Il suffit de se laisser porter, s’oublier le temps de quelques instants, suivre la musique, peu importe sa provenance. Elle attire, guide les esprits égarés, fait sortir de la ville, passer par une épaisse forêt, jusqu’à trouver une petite clairière richement colorée.

Et tandis que les yeux s’ouvrent enfin, le spectacle commence !

Ils sortent en grand nombre, surgissent de derrière les buissons en fleurs ! On ne sait où donner de la tête, les ailes s’écartent, les becs tendent vers le ciel : ce sont les oiseaux danseurs, spécialement réunis pour s’amuser ! Qu’ils sont nombreux, qu’ils sont beaux avec leur plumage rutilant ! Cette fois pas de toute, la fête est lancée !

Maracas, trompette et ukulele s’emportent dans un concert de notes festives et ensoleillées, donnant à la pleine lune des airs de boule à facettes ! Les lumières changent de couleur, les oiseaux apparaissent et disparaissent dans une nuée de pétales chamarrés avant de se réunir dans une ronde plus belle encore que tous les bouquets les plus richement décorés ! On tape des mains en rythme, on saute et tombe à pic, la nature toute entière se joint à la danse des plus chatoyants de ses habitants ! Ceux-là lèvent une patte et agitent une aile, les autres s’éloignent et font tout l’inverse, le mouvement collectif semble se disloquer, mais au moment où la musique retrouve son thème préféré, voilà que tous se rassemblent dans une parfaite unité !

Subitement, sans s’annoncer, la lumière change alors et vire au rose poudré. Les oiseaux disparaissent, seuls ressortent ceux au plumage couleur fleur de cerisier.

Un peu d’air, la musique ralentit et se soumet au fredonnement du ukulele. Les danseuses s’alignent, leur corps ondule, semblable à un pendule, donnant à leurs ailes des airs de vague parfumée. Un pas de côté, un tour pour faire soulever les longues plumes suspendues autour de leur taille, puis la chorégraphie est répétée, cette fois enrichie de nouveaux gestes maîtrisés. Elles captivent, hypnotisent, emportent toute la clairière dans leur balancement sans fin, et enfin quand toute l’assemblée est enivrée, elles se volatilisent dans un dernier déhanché.

Les lumières changent et se vêtissent de rouge vif. Les ailes à volants se dressent, le regard s’embrase, c’est aux danseuses à la robe coquelicot de s’avancer. Olé!

Le rythme s’accélère subitement, les cordes brûlent sous le passage frénétique des doigts du musicien. Les oiseaux avancent comme de véritables guerrières, leurs talons frappent le sol avec ardeur, leurs ailes décrivent des mouvements d’une grâce flamboyante. Elles font volte-face, accélèrent et ralentissent aussitôt pour mieux saisir l’instant de leur prochain mouvement. Les mains tapent la mesure, on claque des doigts, on s’autorise quelques coups de maracas. L’intensité culmine, les danseuses rivalisent, combattent à qui sera la plus forte, la plus puissante ! La joute s’intensifie, on ne peut plus respirer, elles se font face, se tournent autour et ha ! Tout s’arrête, quelques jeux de cordes, et les incendiaires disparaissent.

Au tour du mauve de s’imposer. Derrière un éventail de plumes, le visage de nouvelles danseuses au plumage de lilas apparaît.

Les cordes pincées vibrent avec lenteur. Le premier éventail se lève, il glisse avec élégance vers la terre puis se redresse doucement. Les pas sont millimétrés, l’expression figée, maquillée de sérénité. Chaque mouvement est contenu pour ne rien perturber, on laisse les bras se déplier, puis revenir vers la poitrine avant d’entamer une nouvelle trajectoire. Les esprits vivants s’apaisent tandis que ceux des défunts s’éveillent, appelés par cette discussion avec l’invisible. Comme un pétale de fleur soufflé au gré de la bise du matin, les plumes paraissent flotter, guidées par une parole ancienne que seule une âme paisible est en mesure de recevoir. La fluidité découle des danseuses, devenues aussi légères qu’une feuille de papier. Elles se retrouvent enfin et saluent en baissant humblement la tête.

C’est alors qu’on les entend, elles arrivent, les danseuses aux pétales de jonquilles ! Elles sautent, elles tournent et agitent leurs pompons sous l’éclat ensoleillé d’une nouvelle lumière dorée ! One! Two! Let’s Go!

La trompette donne le tempo aux oiseaux, déjà emportés dans une chorégraphie électrisée ! Mais où trouvent-elles un instant pour respirer ? L’une voltige, l’autre cabriole, et à peine ont-elles le temps de se retourner que déjà leurs ailes rondes sont propulsées en rythme vers le haut et vers l’avant. Les pattes se soulèvent à l’unisson, elle touchent le sol et le quittent aussitôt sans se fatiguer, s’accordent avec les innombrables pompons pour un incroyable festival survolté. Chaque coup en avant résonne avec impact, chaque enchaînement sonne comme un électrochoc, le temps semble s’accélérer et ne plus être en mesure de s’arrêter ! La clairière toute entière est mise sous tension, les feuilles se dressent, les fleurs vibrent d’excitation ! La trompette éclate jusqu’à l’essoufflement, la pose finale est déjà donnée, le tambour annonce le coup d’arrêt !

Sans attendre, les pétales multicolores se soulèvent. Toutes les danseuses apparaissent et se réunissent dans un dernier enchaînement d’ampleur. Les différents styles s’échangent et se mélangent avec souplesse, aucun instrument n’est mis de côté : tout le monde fait désormais partie de la fête ! Mais, une seconde, n’y a-t-il pas une danseuse un peu curieuse ? Elle titube, tourne avec maladresse, se joint à la parade avec allégresse. A-t-elle toujours pris part à la chorégraphie ? Mais non ! Ça alors, c’est Bigoudi !

Comment est-elle arrivée ici ? La petite bête s’est invitée d’elle-même dans le spectacle et profite désormais de la scène au même titre que ses camarades irisées ! La voilà qui tournicote, ajoute sa petite dose d’étourderie innocente, participe à la ronde sans pour autant jamais déranger ses nouvelles partenaires. Son aisance inattendue surprend autant qu’elle confirme son formidable sens du déhanché, les festivités n’en sont ainsi que plus merveilleuses à regarder ! Les oiseaux accueillent la nouvelle venue avec plaisir, ils la flattent, la font balancer jusqu’au centre de leur colonie, et toutes se réunissent dans un dernier échange festif !

Les pétales s’envolent et tourbillonnent, les danseuses se trémoussent, s’accordent sur le même rythme, un pas à droite, un pas à gauche, un saut collectif et enfin, une éblouissante apothéose. Le tableau déborde de couleurs et de lumière, si bien que même la lune peine à se rappeler qu’il est déjà l’heure de laisser sa place au soleil. Les premiers rayons arrivent, les oiseaux disparaissent comme autant de ribambelles encore en train de se dandiner, ne laissant plus que Bigoudi, qui elle aussi comprend qu’il est l’heure de rentrer.

Le petit panda paraît un peu perdu mais à peine perturbé, il s’éloigne dans sa drôle démarche, ne remarquant pas qu’une petite tête dorée, cachée entre les fleurs encore effarouchée, est en train de l’observer. Une fois seule, la danseuse à pompons se redresse, regarde en direction de ses congénères, et décide finalement de s’en aller rejoindre l’improbable invitée.

Scène IV
Les télévisions
À la sortie du lit, Mimi s’étire lentement, encore engourdie par les derniers songes qu’elle vient tout juste de quitter. Les notes du tambour d’acier résonnent pour elle comme un doux réveil l’invitant à se lever. Sans attendre, quelques pas graciles lui permettent de rejoindre délicatement sa commode, d’où elle tire une petite brosse afin de dompter ses quelques boucles emmêlées par la nuit.

Derrière la fenêtre de la chambre, un grésillement remplace le lever du soleil. D’abord interrompue par quelques hoquets de bruit blanc, la mélodie s’éveille et annonce le thème de la matinée. L’écran de la fenêtre projette ses rayons jusqu’au pied du lit, où se trouve une valise déjà prête au départ. Elle attend sa propriétaire, désormais occupée à troquer sa robe de nuit pour une tenue légère et fleurie.

L’image de l’horizon saute l’espace d’un instant puis se stabilise. Bigoudi se réveille à son tour, roule avec maladresse jusqu’au bord du lit et est rattrapée de justesse par sa partenaire, déjà repartie s’occuper des derniers préparatifs. La petite bête à spirale descend de son perchoir avec précaution, tourne dans un sens tandis que Mimi vrille dans l’autre, et se glisse à droite du sommier avant d’apparaître de l’autre côté. À sa suite, une petite boule de plumes jaunes fait son apparition, aussitôt accueillie par les quelques notes festives d’une trompette qui réalise un peu tard qu’il ne s’agit pas là d’un nouveau spectacle de la clairière.

Est-ce que c’est une chanson que l’on entend ? Le son est difficile à capter, inutile de s’en préoccuper.

Un air de nouveauté souffle sur cette nouvelle journée. Autant d’années que de scènes se sont écoulées. Le temps passe vite, la danseuse a grandi, sa taille et son allure renvoient une image plus mature que le jour de son arrivée, ses gestes habitués témoignent des heures passées à s’entraîner dans cette petite chambre qu’elle a aimé occuper. Le petit oiseau à pompons fait désormais partie de la famille, son apparition soudaine correspond à son arrivée dans la vie de Mimi. Du jour au lendemain, elle s’est installée, et n’a plus voulu repartir. Rencontre prédestinée, ou rêve devenu réalité ? Seule Bigoudi semble détenir la vérité… Dans tous les cas, Tutu a été adoptée.

Mais déjà, les danseuses sont prêtes. La chambre est vidée, tout semble avoir été absorbé par la petite valise que Mimi empoigne sans difficulté. Elle jette un dernier regard en arrière à ses trois dernières années, salue les quelques murs qui l’ont si gracieusement hébergée, puis s’en sépare, encouragée par les nouvelles notes du ukulélé. La fenêtre s’éteint. Le restaurant est encore endormi, le spectre de la fête d’adieu de la veille flotte dans des guirlandes et des bouteilles vides que personne n’a eu le courage de débarrasser. Le décor défile comme un film du passé, puis s’efface et laisse place à la fanfare du quartier.

L’effervescence est la même que celle du jour d’arrivée, mais à présent tout le monde est familier avec la jeune danseuse et prend plaisir à la saluer. On la remarque, on la fait danser, certains lui proposent même de partager quelques pas, mais l’attention de la jeune demoiselle est attirée ailleurs. Sans s’arrêter, la voilà qui continue son chemin au milieu de la ville insulaire.

Le décor se déroule, les écrans fichés dans les fenêtres s’allument à mesure que Mimi et ses deux camarades passent à proximité. Les images sont troubles, le grésillement de plus en plus insistant, jusqu’à interrompre de temps en temps la mélodie de la ville. Les couleurs sont vives, captent le regard des passants comme une ampoule le ferait avec une mite. La transmission se répète inlassablement, projette ses teintes aveuglantes sur le corps de la danseuse qui malgré tout ne cesse d’avancer.

Bientôt, tous les murs sont remplacés par des téléviseurs, les haut-parleurs recouvrent totalement la voix des instruments. Dans les moniteurs, les mêmes images se répètent, se reproduisent d’appareil en appareil, grandissent, envahissent l’environnement de la danseuse, désormais captivée par cet univers de sons et de lumières.

Derrière les écrans, les projecteurs ressemblent à des étoiles, la scène se change en planète. Des figures abstraites, enrubannées de couleurs et de néons, dansent avec fougue et énergie, nourries d’attention, d’amour sincère, d’admiration pure. Ces créatures stellaires transcendent l’espace et le temps, elles paraissent invincibles, divines.

Debout face au mur de téléviseurs, Mimi tend le bras. Le rempart tremble et se sépare, creuse en son centre une nouvelle voie. Derrière, la musique est assourdissante, les lumières aveuglantes repoussent autant qu’elles attirent, invitent à se jeter à corps perdu dans leur dédale onirique.

La jeune danseuse récupère sa valise posée à ses pieds et, suivie de ses coéquipières, franchit l’arche, qui se referme aussitôt une fois la nouvelle étoile passée.

Acte quatrième
Scène I
Les coordinatrices
Elles forment un cercle, tout autour de la scène. Au centre, une estrade nivelée dont les différents paliers rappellent les marches d’un podium. La plus haute file droit vers le ciel, en direction d’un imposant trophée en suspension, comme un soleil autour duquel l’ensemble de l’univers paraît graviter.

Chaque étoile brille autant que la suivante, rivalise de beauté et de force pour prétendre accéder au triomphe. Elles se mettent en marche, se suivent mutuellement dans une ronde grandiose tout autour de cette scène circulaire qu’elles rêvent un jour de pouvoir fouler. Leur robe est identique, bardée d’une mosaïque de miroirs qui va même jusqu’à déborder du tissu pour recouvrir la totalité de leur corps. Les lumières aveuglantes s’y reflètent avec énergie, se répercutent dans un labyrinthe de reflets si scintillants qu’ils vont jusqu’à faire disparaître leur visage, lui-même camouflé derrière un masque de spectacle. Leur tenue géométrique est contrecarrée par des gestes d’une grâce et d’une énergie sans pareilles. Elles avancent, s’arrêtent et tournent comme si elles n’étaient qu’une partie d’une immense créature, puis reprennent leur marche millimétrée comme le feraient les aiguilles d’un cadran céleste.

Après trois mesures, la musique explose. Le battement des enceintes irrigue les projecteurs d’une nouvelle énergie. Ils s’agitent, parcourent l’ensemble de la scène, traversent les candidates qui répètent, infatigables, leurs enchaînements dans une cascade de constellation.

Soudain, tout s’éteint. Dans la pénombre, quatre piliers de lumière planent autour du cercle de candidates, immobiles, tête levée et tournée en direction du fabuleux trophée. Les projecteurs finissent par s’immobiliser : ils ont fait leur choix. Les élues montent sur scène, d’autres candidates viennent prendre leur place dans la ronde, qui reprend sa course. Parmi les nouvelles venues, quelques boucles rousses se font subtilement remarquer.

Le spectacle reprend dans un nouveau souffle. Les rideaux descendent pour encercler la scène. Ils tournent à contresens de la ronde des prétendantes et s’élèvent enfin pour révéler les tenues des quatre concurrentes. L’une prend une pose sérieuse et séduisante, masquée derrière un nœud gigantesque, l’autre balance la tête en arrière et tend le bras pour mettre en valeur les volants de sa manche bariolée. On applaudit, on houspille, on siffle. La troisième, main sur la hanche, l’autre pointée vers le ciel, dévoile sa taille de guêpe, la dernière, malheureusement, n’a pas eu le temps de terminer ses préparatifs mais fait de son mieux pour sauver les apparences. Le public n’est pas dupe, il rit, et se perd dans de nouveaux applaudissements.

Un roulement de tambour interrompt la musique devenue frénétique. Les lumières s’éteignent, puis le projecteur arrose la candidate à la taille de guêpe. Les cotillons et confettis éclatent comme des bulles de couleurs, la nouvelle couronnée est surprise et émue. Les prétendantes s’arrêtent et applaudissent, les adversaires ne sont pas aussi admiratives. L’une d’elle n’attend pas la fin de la cérémonie pour quitter la scène, défaite, ignorée des autres, à l’exception de celle aux boucles rousses.

La vainqueur salue son public et disparaît derrière le podium. Sans attendre, le carrousel étoilé reprend sa route. Les lumières s’éteignent, et voilà que déjà, quatre nouvelles demoiselles sont élues et invitées à monter sur scène.

La musique hoquette le temps de changer de style. Les candidates s’alignent et au coup d’envoi commencent à danser. Chacune respecte la chorégraphie imposée tour à tour par une adversaire différente. L’une privilégie le jeu de jambe, la seconde est parfaitement en rythme, la troisième n’est pas encore très à l’aise, la quatrième manque de bousculer la première pour capter toute la lumière. Les applaudissements redoublent d’intensité, la ronde accélère le pas, les lumières sont de plus en plus aveuglantes. Rien ne s’arrête, la machinerie s’enfièvre. La danse se termine enfin, chaque concurrente rêve d’accéder au trône, intimement convaincue d’être meilleure que les autres. Le roulement de tambour teste leurs nerfs, la ronde se fige. La lumière couronne une nouvelle vainqueur, les autres l’applaudissent. La gagnante les remercie, sa gêne et sa surprise irrite secrètement, mais les esprits sont déjà passés au spectacle suivant.

Noir, les prétendantes fixent le trophée. Lumière, la sélection est faite. La scène est à nouveau remplie sous une musique devenue si assourdissante qu’elle se déforme, méconnaissable, effrayante.

Le quatuor inédit s’active cette fois sur les différentes marches de la scène. Les prétendantes reprennent quant à elles le rituel, de nouvelles viennent remplacer celles tout juste choisies, comme si elles n’avaient jamais existé. Une candidate tend le bras, une colonne de flammes s’élève près d’elle. On applaudit. L’autre pivote et écarte les mains, projetant un nuage de paillettes devant elle. On applaudit. La suivante tourne sur elle-même, arrosée d’un jet d’eau flatté par la lumière glissée dans son dos. On applaudit. La dernière prend la pose, baignée par l’éclairage d’une multitude de projecteurs. On applaudit. Les rideaux se baissent, la musique change. Roulement de tambour, et déjà, la vainqueur est désignée. On siffle, on félicite, une perdante jette ses dernières paillettes de frustration, amère, sa camarade espère quant à elle gagner la prochaine fois, cachant derrière son sourire une douleur secrète.

Les voix s’élèvent, les corps tremblent, on s’efforce de faire bonne figure alors que la machine a déjà perdu toute cohérence. On applaudit encore et toujours, on siffle, on demande la suite. Les projecteurs se balancent, menaçants, au-dessus d’une ronde implacable, le roulement de tambour se dérègle, les mains brûlent à force de s’entrechoquer. Les lumières vacillent, laissent place aux ténèbres, et enfin, les nouvelles candidates sont désignées.

Celle aux boucles rousses se fige, surprise de sentir la chaleur du projecteur sur ses épaules. Ses adversaires sont déjà sur scène, la musique ne s’est même pas arrêtée. La cacophonie est insupportable. Les lumières pressent par leur intensité la nouvelle élue à se jeter dans l’arène. Mais son unique réflexe est de s’enfuir en courant. Elle disparaît.

On applaudit. Le trophée, lui, continue d’attirer le regard d’une ronde de nouveau en marche.

La scène est subitement interrompue.


Intermède
Un lampadaire s’allume dans la pénombre et le silence.
À son pied, un banc de fer blanc attend patiemment qu’on vienne lui tenir compagnie.

C’est un monde sans début ni fin, sans départ ni arrivée.
Une parenthèse de silence où même le temps n’a pas la possibilité de s’écouler.
Une île déserte, où il n’y a rien, et dont les seuls occupants sont un vieux réverbère à la lumière fanée et un banc désespérément vide.

Alors, quelques pas se font entendre.
C’est une naufragée. Elle est seule, peut-être perdue.
Elle n’a avec qu’elle qu’une petite valise, sans doute pleine, sans doute vide, qu’importe. Elle décide de s’asseoir, de patienter un peu, de reposer ses jambes fatiguées par tous les pas déjà accomplis.
Elle n’est ni joyeuse, ni triste.

Doit-elle s’arrêter ?
Doit-elle continuer ?
Le dilemme se lit sur son visage et sur ses regards discrets tantôt portés à droite, tantôt portés à gauche.  

Mais comme pour l’accompagner, un air de clarinette résonne au loin. Rapidement, un piccolo se joint à la chanson.

L’égarée quitte le banc.
Elle resserre sa prise autour de la poignée de sa valise, et continue sa route, toujours en direction de la musique.
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MessageSujet: Re: Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time!   Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time! EmptyLun 15 Nov 2021 - 18:24
Acte cinquième
Scène I
Les jumelles de Méanville

Dans une seule et même ville, deux mondes cohabitent. D’un côté le jour, de l’autre la nuit. Unis comme les deux faces d’une même pièce, ils ne peuvent se séparer et pourtant ne se rencontrent jamais.

Sur la place centrale, deux groupes se partagent la scène. Derrière eux, la fontaine projette ses jets d’eau vers le ciel sous le regard attentif de la grande roue dont la hauteur dépasse de loin celle des toits de brique situés près d’elle. À gauche, les costumes sont de toutes les formes et de toutes les couleurs. Dans leurs mains, les ballons de baudruche flottent, prêts à s’envoler à tout moment pour rejoindre les guirlandes de fanions colorés. À droite, on rivalise d’élégance, les tenues sont chic et flattent le corps divinement taillé des danseurs dont le visage exagérément maquillé reste dissimulé derrière un chapeau de cuir. Personne ne bouge. Le soleil n’a pas encore indiqué quelle heure est sur le point de sonner.

Entre les deux camps, le reflet cuivré du saxophone, du trombone et des trompettes annonce la couleur. La contrebasse attend patiemment, les percussions sont sur le qui-vive.

De part et d’autre des bâtiments de briques entrent alors Tutu et Bigoudi. Toutes les deux sont suivies par leur partenaire : l’une se cache derrière un chapeau, l’autre sous la coiffe rembourrée d’un costume de mascotte. Chacune s’adresse un regard mutuel, comme pour contempler son reflet, puis partent se mêler à chacun des groupes avant de s’immobiliser. Tutu monte sur une petite estrade réfugiée à droite de la place, Bigoudi suit une trajectoire parfaitement symétrique et l’imite du côté gauche.

Un silence, puis tout commence.

Les rayons du soleil s’allument, la grande roue se met à tourner. Les musiciens entament un jazz gai et festif, et aussitôt s’anime le groupe de la journée ! Bigoudi est une petite privilégiée, son podium est arrosé de lumière tandis qu’elle se met joyeusement à se trémousser ! L’assemblée des mascottes la rejoint, ils n’en pouvaient plus de patienter !

Tous s’avancent et s’éparpillent, investissent la totalité de la place sans prêter attention aux oiseaux de nuit qui, eux, demeurent toujours endormis. Malgré le poids et l’ampleur des tenues, les enchaînements sont parfaitement suivis, parcourus de gestes simples mais adorablement accomplis. Les baudruches se gonflent, s’envolent et rebondissent, servent de carton d’invitation à se rendre au parc d’attraction de la ville. Les imposantes peluches colorées sont de formidables émissaires, impossible de leur résister ! Les yeux n’ont plus aucun endroit où se réfugier, tout déborde d’énergie et d’amusement, la question ne se pose plus, il faut y aller !

Mais le temps passe si vite que l’heure sonne déjà ! La lumière du soleil laisse place aux néons colorés, les mascottes s’immobilisent et s’endorment. Bigoudi disparaît dans la nuit, Tutu prend la relève.

Les projecteurs se redressent, on visse les chapeaux sur la tête. Le temps d’une respiration, puis le jazz passe au swing et les danseurs du Music-Hall entament leur chorégraphie ! La scène est aussitôt investie, envahie de mouvements maîtrisés, tantôt séduisants, tantôt percutants. Maquillée de nouvelles plumes dorées, Tutu laisse elle aussi éclater sa verve électrisée. Elle projette ses ailes touffues dans les airs comme pour encourager les cuivres qui s’essoufflent presque à tant vouloir la suivre. Mais l’oiseau comme la troupe refusent de s’arrêter et tout le monde continue de danser !

Derrière eux, la grande roue se rembobine, la fontaine scintille, un air de secret flotte tandis que les danseurs disparaissent et apparaissent en rythme derrière les silhouettes endormies des mascottes. Ils jouent, attirent, captivent. Pléthore d’accessoires tournent entre leurs doigts gantés, les lumières de la nuit prennent plaisir à suivre ce spectacle intimiste avec lequel aucun songe ne saurait rivaliser. Les artistes se changent en figures abstraites, uniquement dédiées à l’histoire que leur corps s’efforce de raconter.

Et tandis qu’ils lèvent la tête, l’heure sonne à nouveau. Aussitôt, les chapeaux glissent devant les visages, le Music-Hall se fige, le parc d’attraction est tiré de son sommeil. Au loin, la grande roue a fini de tourner en arrière, elle reprend sa rotation ordinaire et refait venir les rayons du soleil !

Une nuée de ballons multicolores tombe sur la grand place. Les mascottes se réveillent au son des nouvelles notes du trombone et reprennent leur fabuleux spectacle, comme s’il ne s’était jamais arrêté ! Entre eux filent comme des étoiles filantes trois nouvelles figures, juchées sur des patins à roulettes, distribuant généreusement tracts et sucreries, sans oublier de saluer la petite Bigoudi, déjà repartie dans son adorable chorégraphie. La silhouette ronde de Mimi est quant à elle difficile à retrouver dans toute cette féerie, on l’aperçoit, tantôt par ici, tantôt par là, cachée comme une carte glissée dans un jeu que l’on prend plaisir à mélanger. Mais ça y est, on peut la voir en train de s’aligner comme le reste de ses camarades au costume rembourrés. Tous se tiennent par la main, peut-être prêts à saluer.

Mais les lumières s’éteignent, la nuit reprend déjà ses quartiers ! À nouveau, la grande roue change sa manière de tourner et donne au jazz une saveur soudainement plus veloutée.

Les danseurs fardés de la lumière des néons retrouvent mécaniquement leur entrain de la nuit précédente. Les enchaînements sont sophistiqués, parfaitement accomplis, suffisamment répétés pour être devenus purement instinctifs. Ils lancent leurs accessoires dans les airs, comptent sur leurs camarades pour les réceptionner. Tutu célèbre gaiement leurs prouesses et par une pirouette fait éclater plusieurs piliers de lumière. Les danseurs de la première ligne sont mis en avant, assument un rôle plus important que celui des nombreux figurants.

La démonstration est splendide, mais les esprits ne peuvent s’empêcher de chercher où se trouve Mimi. Ses boucles rousses tirées en arrière et cachées sous le chapeau de cuir n’agissent plus comme repère, la demoiselle est si maquillée qu’il est presque impossible de la distinguer des autres artistes. À peine la voit-on se glisser dans la lumière d’un projecteur qu’elle disparaît aussitôt, obéissant docilement à la chorégraphie.

Heureusement, la grande roue s’arrête, une parenthèse s’ouvre, et la belle se met à tourner autour de son costume de la journée. Tout sur la grand place s’est immobilisé, il ne reste plus qu’elle, sa jumelle et un petit instant de rêve pour simplement profiter. La danseuse prend la mascotte par sa main ouatée et l’attire sous les rayons ensoleillés des néons irisés. Elles partagent quelques pas faciles et innocents. Comme face à son reflet, Mimi du jour soutient Mimi de la nuit, toutes les deux se réunissent et trouvent un équilibre unique dans lequel Tutu comme Bigoudi ont un refuge où s’épanouir. Les musiciens s’autorisent quelques harmonies feutrées dans ce nouveau monde où le temps refuse de s’écouler.

Enfin, les deux figures se séparent et rejoignent leur univers respectif. Mais le songe n’est pas terminé. Les cuivres prennent une nouvelle inspiration. Il ne fait que commencer !

Toutes les lumières s’allument dans un nouveau festival coloré. Les ballons côtoient les néons, la grand place est prise au piège d’une chorégraphie endiablée ! Tutu et Bigoudi s’unissent chacune de leur côté dans un enchaînement dynamique et symétrique que le reste de la troupe ne tarde pas à imiter. Les deux mondes s’autorisent pour cette fois unique une rencontre inédite, guidés par les rêves innocents de la plus jeune de leur artiste, qui de fil en aiguille se retrouve propulsée malgré elle au centre de la scène. Danseuse et mascotte s’unissent une dernière fois, et prennent la pose, signant la conclusion de cet éblouissant final.

Scène II
Les essayages
La grand place se vide, l’effervescence est gentiment balayée. Au milieu de ce curieux cortège, une silhouette colorée joue les invitées. Elle regarde à droite, puis à gauche, penche la tête d’un air perplexe. Elle va adresser quelques mots aux musiciens, s’assure que les deux demoiselles sur leur estrade n’en descendent pas, interpelle la danseuse pour qu’elle reste à ses côtés et se retourne pour faire face à son assemblée. Dans son tablier, ciseaux, peignes et fer à friser sont prêts à travailler.

Main levée, le nouveau tempo s’envole au rythme d’un simple petit déhanché ! Le jazz festif laisse sa place à une mélodie coquette et funky, la contrebasse donne le relais à la basse électrique tandis que la ville prend peu à peu des airs de salon privé. L’invitée pointe du doigt les maisons une à une et les recouvre de rideaux rose poudré, chasse la grande roue pour la remplacer par un grand miroir en trois volets. Elle claque ensuite des doigts en rythme pour annoncer l’arrivée de son cortège de penderies, toutes remplies de vêtements et accessoires bigarrés. Dans sa truculente frénésie, la costumière enchaîne avec une série de pas de côtés et fait venir d’un geste de la main un fauteuil douillet dans lequel la danseuse se retrouve malgré elle précipitée. Sa nouvelle amie lui adresse un clin d’œil complice et fait apparaître au centre de cet inattendu défilé un petit podium rond sur lequel Tutu et Bigoudi sont invitées.

Séduite par la musique, Mimi se met à son tour à se trémousser en rythme, tapant joyeusement dans ses mains pour accompagner celle chargée de préparer les costumes des petites égéries de la journée.

La tenue est minutieusement préparée. Un chapeau par ci, une petite veste par là, la maîtresse des lieux se déhanche sans se fatiguer, déniche la perle rare sans même avoir besoin de la chercher ! Mais avant d’entamer les essayages, elle roule les épaules, fait un pas de côté et tape dans ses mains pour faire venir ses outils favoris. Ciseaux, sèche-cheveux, peigne et bigoudis, elle renvoie les derniers, ceux-là ne seront pas utiles. Les concernées sont quant à elles à peine préoccupées, elles aussi sont en train de se dandiner, observant avec grand intérêt les costumes qui leur sont présentés.

Un petit coup de peigne, le sèche-cheveux rugit, une minuscule retouche aux ciseaux, le sèche-cheveux enchaîne lui aussi. On essaie différentes coiffures, puis les vêtements sont choisis et posés sur le podium. L’habilleuse se baisse, soulève un tube de tissu autour de la toute petite scène, et le redescend aussitôt. Les deux amies sont déjà changées, comme par magie !

Petite jupe à froufrous et nœuds pour Bigoudi, collerette à bijoux et plumes gonflées pour Tutu, toutes les deux prennent la pose, un appareil photo saisit l’instant. Mimi applaudit, son amie est charmée, mais pas entièrement satisfaite.

La musique reprend.

Tout ce petit monde se dandine à nouveau en rythme. D’un coup, le tube est à nouveau soulevé puis abaissé. La tenue a encore changé ! Veste à carreaux et petit chapeau pour Bigoudi, couronne de fleurs et petit panier pour Tutu. Les deux amies prennent une nouvelle pose, la photo est prise, Mimi demeure surprise, son amie incomprise.

Et c’est reparti !

On se déhanche, on tourne autour du petit podium, le tube se lève et révèle un nouvel ensemble ! Un petit habit raffiné pour Bigoudi, coiffée d’un diadème, un costume étincelant pour Tutu, parée d’une barrette. Cet essai est particulièrement réussi ! Mimi se réjouit, mais sa camarade croise les bras. Non, elle le sait, il manque quelque chose. Soudain, elle comprend. La voilà qui prend la main de la danseuse et l’invite à monter rejoindre ses partenaires. La concernée n’a pas le temps d’objecter que le tube l’avale et s’abaisse sans attendre.

Surprise de la danseuse, qui ne comprend pas comment sa tenue a pu changer si vite. Elle regarde autour d’elle et prend automatiquement la pose lorsque son regard croise l’objectif. Les trois partenaires sont parfaitement accordées dans un ensemble doré, mais pour la costumière, la série est loin de s’achever.

Le tube se soulève puis redescend.

Tenue couleur cerise, gonflée de tulle pour brouiller une silhouette douce et sensuelle. La pose est coquine, le déhanché impertinent. La photo est prise, le groupe pense en avoir fini, mais il n’a pas encore le droit de descendre de la scène.

Claquement de doigt, le tube se dresse et s’abaisse.

Parure pastel, couverte de dentelle. Une histoire romantique aussi légère qu’une fleur printanière. Bigoudi a l’air ravie, Tutu prend la pose, Mimi adopte un air innocent. Le sèche-cheveux souffle une légère brise pour mettre en valeur la pureté du sujet photographié, mais ce n’est toujours pas terminé !

Dernier déhanché, la maîtresse des lieux fait le tour du podium et pointe du doigt son sommet. Une explosion, suivie d’une cascade pailletée.

Les mannequins disparaissent le temps d’une seconde et apparaissent pour la dernière fois dans une éblouissante tenue de scène. Rubans, jupe scintillante et irisée, veston à froufrous et parure sertie de pierreries. Mimi passe sa main dans ses cheveux divinement coiffés, Bigoudi est adorable malgré elle dans sa tenue colorée et Tutu célèbre comme il se doit cette franche réussite avec ses pompons illuminés. La costumière est conquise, la musique reprend pour de bon et invite à un ultime déhanchement collectif, tandis que les rideaux roses se referment lentement sur la place et annoncent la fin des essayages.

Scène III
Les cinq paravents
Derrière les rideaux, un nouveau spectacle du music-hall est à nouveau en train de se jouer. La musique paraît lointaine et à peine la reconnaît-on qu’elle semble déjà sur le point de se terminer. Les applaudissements retentissent, les chuchotements s’éveillent dans les coulisses tandis que les artistes se retirent. Enfin, les rideaux décident de s’ouvrir.

La scène est plongée dans le noir. Une silhouette s’invite, ses contours costumés sont subtilement dessinés par la faible lumière du croissant de lune. Elle regarde derrière elle, s’assure de ne pas avoir été suivie, puis disparaît, invisible. Une bougie s’allume alors et révèle dans sa lumière vacillante un large paravent de papier. Sur lui, l’ombre de la fugitive est délicatement projetée.

Résonnent les notes cristallines du shamisen.

La figure se déplie lentement. Du bout des doigts, elle commence à retirer son costume. Le chapeau tombe, les gants glissent et s’envolent. Le corset se défait de son lacet, révèle une poitrine frémissante digne des plus fines estampes. Ses cheveux se dénouent, viennent se répandre jusqu’au creux de ses reins. Elle se baisse, retire ses bas résille afin que ses jambes viennent à leur tour s’imprimer sur le papier. Comme un papillon sorti de sa chrysalide, la danseuse s’est progressivement changée en calligraphie.

Nouveau rythme pour l’instrument à cordes. Un long voile de tissu monte s’enrouler le long du corps de la vestale. Il se noue autour de sa taille, fait disparaître ses bras sous plusieurs couches de soie. De longues épingles viennent se ficher dans une coiffure soigneusement élaborée, couronnée d’un peigne dont la forme a été élégamment tracée. Le rituel est lent et méthodique, sa subtilité égale une technicité que la silhouette paraît parfaitement maîtriser. Quelques ultimes ajustements, puis l’ombre se penche et tire de sa longue manche un bâton que l’on devine paré de petits grelots.

Elle le tend face à elle, et le fait sonner d’un coup bref et franc. L’écho purifie l’atmosphère. La figure se met alors à se balancer doucement et entame une toute nouvelle danse.

Dans un même temps, d’autres bruits de pas se font entendre. Tout juste sortie de la pénombre, Mimi fait une apparition inattendue. Elle paraît chercher quelqu’un. Suspendu à ses doigts, une petite clochette se balance avec nonchalance, comme impatiente à l’idée de retrouver ses chères sœurs. La demoiselle regarde autour d’elle, et semble trouver derrière le paravent la personne qu’elle était venue chercher. Mais comme captivée par le spectacle de l’ombre, elle s’immobilise et l’observe, sans un bruit.

La silhouette continue de danser. Ses gestes sont lents et parfaitement contrôlés. Un bras se lève, trace une nouvelle lettre invisible sur le mur de papier, puis coule vers le sol avant d’à nouveau chercher à s’envoler. Debout devant la toile de papier, Mimi l’observe, éprise, et ne réalise même pas qu’elle aussi a commencé à bouger.

Le bâton à grelots tinte à nouveau. Celui qui en est séparé tente de lui répondre. La chorégraphie reprend, toujours sous la direction du très sérieux shamisen. Chaque pas obéit à une précision ancestrale, le moindre geste impose une technique enseignée par des années de pratique. Au-delà d’un simple corps, c’est la nature toute entière qui est impliquée et vainement reproduite au travers de mouvements longuement médités.

Un tintement adressé au ciel provoque l’apparition de quatre nouvelles bougies, chacune dissimulée derrière un même paravent. L’ombre s’y reproduit comme par magie, encercle désormais celle qui à son insu continue de l’observer. Elles sont désormais cinq silhouettes à répondre aux notes de la captivante mélodie. Les gestes sont purs, minimalistes, aussi doux que la lumière de la lune, aussi intenses que les rayons du soleil. Ils sont la flamme qui vacille, l’eau qui s’écoule, le tonnerre qui gronde. Chaque pas devient plus complexe que le précédent, la cadence s’accélère, le souffle se raréfie. Mimi s’efforce de suivre, mais dans sa précipitation elle perd l’équilibre et laisse échapper la clochette de ses doigts.

Le grelot roule sur le sol et brise malgré lui l’harmonie. Sursaut des ombres qui se volatilisent, laissant la première seule dans sa surprise. Elle se raidit et penche la tête hors du cadre de bois. Son visage magnifiquement maquillé et coiffé apparaît enfin et reconnaît Mimi qui s’empresse de réparer sa maladresse. La danseuse au kimono quitte définitivement sa cachette et récupère le grelot dans une gratitude sereine. Sa gêne est rapidement balayée par la passion sincère de son observatrice. Celle-ci trépigne, veut en savoir plus, mais la concernée semble embarrassée. Elle révèle derrière sa tenue brodée la présence d’une valise, signe de son départ imminent. Mimi ne la retient pas et se résigne, observe la direction indiquée par la danseuse, qui par son entrain semble prête à l’inviter. Mais celle aux cheveux bouclés refuse, son travail l’oblige à rester.

La danseuse comprend, la salue alors en s’inclinant respectueusement, puis disparaît dans toute sa délicatesse. Son interlocutrice la regarde partir, pensive, puis est tirée de sa rêverie par la mélodie du music-hall qui résonne au loin. Elle se retourne et s’empresse de répondre à l’appel, laissant la scène vide derrière elle.

Les rideaux commencent à se refermer, la scène est déjà prête à s’achever… mais de nouveaux bruits de pas les font s’immobiliser.

Dans le sens inverse, Mimi passe en courant, espérant rattraper sa destinée, sa fidèle valise au bout du bras, suivie de Tutu et Bigoudi qui lui emboîtent le pas.

Acte sixième
Scène I
Le grand ménage
Dans la vieille maison, poussière et saletés se sont changées en boules de coton. Ils sont de partout, sur les meubles, sous les placards, partout par terre, et même en l’air ! Ce sont de curieux pâturages pour ces moutons d’un ancien âge, leur laine s’est d’ailleurs tellement emmêlée qu’il faudra plus qu’un coup de balais pour les déloger.

Alors, la chef d’orchestre remonte ses manches, attache ses cheveux bouclés et bat la mesure. Un, deux, trois, quatre !

Mimi fait un pas de côté, tourne sur elle-même et monte sur le carton posé devant le canapé. Elle tape en rythme, agite les mains pour donner la mesure, désigne une à une les fenêtres qui s’ouvrent chacune à leur tour ! Bigoudi surgit derrière l’une d’elle, s’avance et tombe dans le champ de coton, Tutu apparaît près d’elle et secoue fièrement ses jolis pompons. Mais la poussière s’y accroche, change l’oiseau en mouton qui panique et s’agite, percutant par mégarde le meuble qui se dressait sur sa route. La fée du logis ne peut se retenir de rire, met ses mains sur les hanches pour demander un peu d’attention, et reprend gaiement sa partition. Un, deux, trois, quatre !

Elle écarte les bras et fait signe aux balais de s’approcher. Ces messieurs sont drôlement strictes, droits comme des danseurs de ballet. Ils prennent leur tâche très au sérieux, frottent activement le sol pour le débarrasser de toutes ses saletés. Mais, ne vont-ils pas un peu trop vite ? Une seconde, la poussière s’envole, un nuage de coton se forme ! Avaient-ils annoncés de la brume dans la journée ? Bien sûr que non, Mimi tente de les arrêter !

Elle leur fait signe, mais ne peut se retenir de tousser, tandis que les ouvriers continuent de se trémousser à travers toute la maisonnée. Alors la musicienne fait sonner son sifflet, rappelle à l’ordre ses soldats de la propreté. Les moustachus se redressent, l’air toujours aussi sérieux, comme s’ils ne s’étaient jamais perdus dans une quelconque danse saugrenue. Bigoudi tente de leur montrer l’exemple, mais elle trébuche et éparpille malgré elle le troupeau de moutons tout juste rassemblé partout dans la maison. Les balais se regardent, secrètement éberlués, tandis que la chef d’orchestre, à peine chiffonnée, reprend sa mesure. Bras en avant, jambe en l’air, un, deux, trois, quatre !

Le concert continue, c’est au tour des plumeaux de faire leur entrée et déjà, leur jupe ébouriffée se secoue sous le nez des balais, stupéfaits d’un tel déhanché. Les moutons s’échappent, sautent du sommet des placards, gambadent hors des fenêtres. Inutile de chercher à les rattraper, il faut leur rendre leur liberté ! Bigoudi leur dit au revoir, mais Tutu n’a quant à elle pas envie de s’émouvoir. Les nouveaux venus s’enorgueillissent de leur plumage, se pavanent, flattent leur image sous le bec de la petite danseuse qui refuse de passer pour une paresseuse. Ils vont voir, ces vantards ! Alors elle s’active, fait preuve d’initiative, se précipite vers les tas de poussière pour leur mettre un coup de pompon au derrière. Mais les plumeaux sont rapides et intrépides, ils dansent de partout, couchés comme debout, ils sont bien trop nombreux, impossible d’avoir raison d’eux !

Alors l’oiseau s’agace, change un carton de place, les plumeaux ne le voient pas, ils se bousculent et basculent ! Oh non ! Les moutons piégés dans leur robe s’enfuient, le salon est à nouveau envahi !

Tout le spectacle s’arrête, Mimi n’est pas satisfaite. Elle gonfle les joues, met ses mains sur les hanches, chasse la boule de coton qui vient de se déposer sur le haut de sa manche. Mais très vite la chef d’orchestre cesse de faire la moue, trahie par son pied qui continue de battre la mesure. Alors elle se redresse, réclame l’attention de tout le monde. Cette fois cela va fonctionner, elle en est sûre !

La demoiselle demande aux plumeaux de s’associer aux balais. Les moustachus sont étonnés, mais acceptent de rejoindre les jupons effarouchés. Mimi fait signe de tendre l’oreille, et un, deux, trois, un, deux, trois ! Le rythme a changé, la valse est engagée !

Les premiers pas sont donnés aux balais, les plumeaux acceptent de se laisser diriger, mais à peine ont-ils fait la renverse que déjà la situation s’inverse ! Jupes et soldats luttent et se chahutent, mais quelle efficacité pour ce fabuleux duel, le salon est nettoyé à une vitesse sans pareille ! Mimi est éblouie, danse elle aussi, suivie de près par Tutu et Bigoudi pendant que les derniers moutons s’enfuient ! Enfin, le dernier pas est accompli, et naturellement, tout le monde applaudit !

Les artistes saluent et se retirent. Mimi descend de son carton, ravie de ce résultat qu’elle admire. Mais alors que la maison respire à nouveau, débarrassée de l’envahissant troupeau, une silhouette se présente, vêtue d’un joli kimono. Elle comptait venir proposer un peu de thé, mais ne peut s’empêcher d’être émue de voir la vieille maison à nouveau habitée.

La chef d’orchestre pose sa baguette, invite son amie à s’asseoir tandis qu’elle se dirige vers un tiroir. Elle en sort un chapeau melon, qui visiblement était déjà là avant son installation.

Celle à la robe de soie s’étonne, l’objet appartient sans aucun doute à l’ancienne propriétaire. Mimi pose la question : la reverra-t-on ? La réponse est claire : cela reste un mystère !

Scène II
Le paradis retrouvé
Mais quel désordre, le cabaret n’est pas du tout prêt ! L’idée était de présenter une salle de spectacle, pas un véritable chantier ! Des chaises par ci, des planches par là, les câbles pendent dans le vide, et que dire de la pauvre scène, qu’une grosse échelle écrase de tout son poids.

Mais loins de se laisser démoraliser, les artistes sont à pied d’œuvre. Chacun s’occupe, trouve quelque chose à faire. Un grand trapu s’efforce d’accrocher un projecteur, son petit camarade le guide, juché sur une table pour prendre de la hauteur. Derrière lui, une dame voutée s’occupe calmement de repeindre un panneau, elle est concentrée, plonge son pinceau dans un pot puis dans un autre, remplit soigneusement un motif sur le point d’être achevé. Tout autour d’elle, d’autres planches déjà décorées se reposent, profitent du temps qui leur est offert pour sécher. Tout ce petit monde siffle joyeusement, meuble autant que possible une absence de musique à laquelle la salle de spectacle n’est pas du tout habituée. Pour donner la mesure, un homme dégingandé fait habilement jongler son marteau, il tape près de l’entrée, et tout le monde trouve un moyen de lui répondre.

Le jeune directeur, lui, n’est pas suffisamment enthousiaste pour fredonner. Son inquiétude est palpable, il fait les cents pas, rejoint malgré lui le rythme de la chanson artisanale, trois pas dans un sens, trois pas dans l’autre. Le pauvre se donne lui-même le tournis.

Puis sur le pallier, une petit silhouette vient jouer les trouble fête. Manteau épais, sac à dos bien rempli et petit béret, Mimi regarde les environs d’un air curieux. Elle vérifie discrètement ce qui est inscrit sur un papier qu’elle tient entre ses mains, puis comprend qu’elle ne s’est pas trompée. L’homme au marteau interrompt justement sa mesure pour venir à sa rencontre. Il se plie pour regarder le prospectus, acquiesce et désigne à la nouvelle venue celui qu’elle est venue chercher. La demoiselle le remercie, ajuste sa tenue et en profite pour chasser la petite boule de coton qui l’a accompagnée tout au long de son trajet. Puis elle s’aventure dans la zone en chantier. Elle contourne une caisse, enjambe un tuyau, balance malgré elle son corps au rythme des sifflets des drôles de locaux.

Mais alors qu’elle continue d’avancer, son visage glisse malgré lui vers la scène toute encombrée. Sans doute la trouve-t-elle un peu petite, piégée sous cette immense échelle, mais ses jambes frétillent déjà à l’idée de la fouler. Sauf que l’étourdie a oublié de regarder devant elle, et tandis qu’elle se tourne, son dos rencontre celui du directeur, qui lui aussi, tête en l’air, ne regarde pas où il met les pieds.

La rencontre est fortuite mais rapidement pardonnée. La nouvelle venue présente aussitôt le papier que le jeune homme reconnaît sans difficulté. Il se redresse, regarde la scène et se gratte la tête, visiblement confus. Il ne s’attendait probablement pas à recevoir de la visite aussi tôt. Mimi comprend qu’elle n’est pas venue le bon jour et s’apprête déjà à faire demi-tour, mais son interlocuteur s’agite, promet de trouver une solution. Alors il s’empresse de monter sur la scène pour la débarrasser de l’imposante échelle. Il la tire, il la pousse, elle bouge enfin mais est beaucoup trop lourde, et voilà qu’elle s’écrase dans un puissant fracas. Les artistes cessent leur ouvrage, s’assure que leur directeur n’a pas reçu de dommages. Mais non, il va bien et est déjà en train de finir de désencombrer pour laisser le champ libre à la petite nouvelle.

Les sifflets se sont tus, le marteau ne résonne plus. Dans ce silence, tous les regards se tournent vers Mimi que le jeune directeur invite désormais à monter sur scène. Celle-ci retire son sac à dos et son béret avant de doucement aller se positionner. Une fois sur les planches, le regard de la petite danseuse brille de gaieté. Elle n’a pas peur, se sent déjà chez elle dans ce petit sanctuaire feutré.

Les lumières s’éteignent à l’exception du projecteur tout juste installé. Plongée dans le noir, Mimi inspire, tout sourire, et, aussi simplement, se met à danser.

Son corps s’éveille, commence déjà à tourner. Les premiers pas paraissent bien nus sans musique pour les accompagner. Mais la danseuse ne s’en préoccupe pas, suit son propre rythme, écoute la mélodie discrète qui circule jusqu’au bout de ses doigts.

Ils claquent, annoncent un rythme. Un coup de talon leur répond, invitent à aller plus vite. Alors la danseuse s’anime, tape dans ses mains, saute et vrille, libère par un lumineux enchaînement la partition qui la conduit. Sa poitrine se change en caisse de résonance, elle se gonfle, se réchauffe, fait remonter jusqu’à sa gorge un air doux et virtuose.

Alors, ses lèvres roses s’ouvrent et fleurissent dans un baiser, déposent autour d’elle des syllabes simples et clairsemées. Les notes virevoltent, suggèrent au simple contact de l’oreille un fabuleux orchestre ; elles s’accrochent à ses cheveux bouclés, glissent le long de ses doigts et de ses pieds, leur donne une multitude de couleurs au point où tout semble prêt à déborder. Mimi se tourne, offre un clin d’œil et laisse enfin tout éclater.

Les lumières du cabaret s’allument et dévoilent une salle de spectacle au grand complet. Tout le monde est captivé par la danseuse qui a déjà remplacé son manteau par une tenue scintillante et irisée. Elle lève le bras et souffle un baiser aux cuivres qui se mettent à chanter. Puis petit tour sur le côté, le clavier lui aussi est prêt à s’emporter, et enfin saut en avant, guitare et batterie rejoignent la formidable assemblée ! Mimi exulte, s’emporte dans un jeu de jambes endiablé, rejoint le centre de la scène et propose un somptueux déhanché. Elle écarte les bras, et comme par magie, voilà qu’à ses côtés apparaissent Tutu et Bigoudi ! Le trio s’adresse un regard complice et avance, prend possession de la scène dans un enchaînement unique et étincelant.

Devant ce spectacle grandiose, l’un des spectateurs est épris, sent que son cœur explose. Il est touché, ému, prend conscience d’une passion dont il ignore les raisons. Alors il se lève et applaudit avec vigueur celles qui viennent tout juste de prendre leur dernière pose. Le public est ravi, lui ne comprend pas d’où viennent les larmes qui coulent derrière son sourire.

Alors dans une dernière hésitation, il s’avance et profite d’un instant pour se glisser vers la scène. Il félicite celles qui en descendent tout juste les marches, s’excuse de les prendre par surprise et leur tend ce qui semble être une petite carte de visite. Mimi la regarde, s’excuse de ne pas comprendre, mais à peine récupère-t-elle le présent que l’homme s’éloigne déjà, coupable de son inconvenance.

Les trois danseuses n’y prêtent pas plus attention et rejoignent les loges, tandis que sur la scène du cabaret, le spectacle est prêt à continuer.

Scène III
Quatuor à cordes
Isolée au milieu de la grande ville, la clarinette chante la suite de son chemin. Ses notes ont basculé dans un octave plus graves avec l’écoulement des années, mais sa voix demeure douce et pleine de gentillesse.

Elle s’avance, sa silhouette se dessine comme une grande ombre noire creusée à même la lumière. Derrière elle se tire un engin qu’elle tient depuis sa jeunesse, une vieille machine équipée d’un tiroir caisse. La bête est lourde, son ventre est rempli de rêves, mais sa propriétaire compte bien en faire la pièce maîtresse de son nouvel univers. Elle arrive finalement, se tient devant une ficelle suspendue dans le vide. La solitaire retrousse ses manches et l’actionne d’un coup franc.

Devant elle, c’est alors un immense décor qui se déplie. Semblable à une maison de poupée, le bâtiment est grand mais pratiquement vide. Ses murs sont à repeindre, les meubles sont à nettoyer, il y a tant de poussière que la clarinette menace de s’étouffer.

Juste à côté, une autre corde décide alors de se décrocher du ciel. La demoiselle se balancent effrontément, semblent appeler à ce qu’on vienne aussi s’occuper d’elle. Mais la clarinette est déjà bien occupée avec la première, et si elle la lâche, alors tout risque de s’effondrer. Heureusement, la chanteuse à la moue boudeuse est solitaire mais pas isolée, et malgré son air patibulaire, elle sait déjà qui appeler. Alors elle redresse son bec, et lâche un coup de sifflet. Les lumières vacillent, s’envolent comme une nuée d’oiseaux apeurés, puis elles clignotent et prennent de nouvelles teintes colorées.

Dans le fond, la mélodie du cabaret résonne, vigoureuse et pétillante. Elle n’est plus à présenter, voilà Mimi qui arrive en sautillant. La belle est ravie de retrouver son amie d’enfance, elle court la rejoindre, répand dans son sillage les notes lumineuses et généreuses de son tout dernier spectacle.

La clarinette repose sa voix, profite discrètement de l’instant pour admirer la danse de sa camarade, puis lui désigne la deuxième corde qui vient tout juste de s’immobiliser. Celle aux boucles rousses contemple le décor, se dit qu’il manque encore beaucoup de couleurs, puis agrippe la ficelle et la tire de toutes ses forces vers elle.

Un nouveau pan se déplie, et comme par magie, de nouvelles pièces de la maison se remplissent ! Du rose par-ci, du pastel par là, les couleurs sont douces, élaborent une agréable mélodie pour ceux qui les regarde ! Mais quelques endroits demeurent encore cruellement vide, et ne manque-t-il pas de la lumière aussi ? Mimi tente de tirer plus fort sur sa corde, mais rien n’y fait, en fait, il y en a même une troisième qui décide de se présenter ! La danseuse cherche à la saisir, mais la clarinette lui chante de ne pas s’obstiner. D’ailleurs, elle se redresse, et renouvelle son coup de sifflet.

Les lumières vacillent, tremblent brutalement sous le grondement du rock d’une guitare électrique. Mimi se redresse, surprise par cet orage soudain tandis que sous le déluge s’approche une grande silhouette vêtue de noir. La dame est grande, sa tenue de cuir est cousue d’insolence, mais sa démarche déborde de grâce et d’élégance. Elle s’approche de la clarinette, échange avec elle quelques notes passagères ; toutes les deux semblent se connaître depuis plusieurs années et attendaient cette occasion pour se retrouver. Mimi n’est pas jalouse, au contraire elle ne peut se retenir de danser !

La troisième convive s’approche de la corde, l’attrape du bout du bras et la tire contre sa poitrine. La maison vibre et s’électrise, quand soudain de nouvelles lumières la remplissent.

Le travail est réussi, le trio est ravi. Toutefois, elles ne semblent pas avoir encore tout à fait fini. Le bâtiment est beau mais encore cruellement vide. Il manque de soin, de détails, d’une petite touche de folie. Une quatrième corde se décroche à son tour, les trois filles la regardent, mais la clarinette est à bout de souffle. Heureusement, Mimi sait déjà à qui s’adresser. Alors elle tourne, s’enroule dans sa ficelle, lève la main et s’engage dans un somptueux déhanché.

Comme pour lui répondre, les néons prennent place. Dans le fond, les claquements de doigts retentissent. Ils se rapprochent, et introduisent les notes funky de la basse !

C’est un concert festif qui succède au rock combatif. L’invitée fait son entrée, armée de ses peignes et de son fer à friser, toujours dans son indispensable déhanché ! Elle s’amuse, retrouve Mimi déjà en train de se trémousser tandis que les deux autres camarades l’accompagnent de claquements de doigts parfaitement maîtrisés. Ravie d’être aussi bien entourée, la nouvelle venue s’empare de la corde isolée et la tire à son tour. Un dernier panneau se déplie et projette sur la maison une salve de glamour et de coquetterie.

Il est maintenant temps pour les quatre cordes de disparaître et pour le quatuor de prendre ses quartiers.

Chacune rejoint la pièce qui lui est dédiée. La première est une boutique, celle au-dessus un petit cabaret, juste à côté une salle de jeu et en-dessous un salon de beauté. Les mélodies autrefois isolées s’unissent finalement dans une incomparable symphonie que quelques pas de danse tantôt francs, tantôt discrets, viennent finalement conclure, signe pour les quatre protagonistes que démarre une grande et belle amitié.

Scène IV
Le souhait du piccolo
Retour dans la maison de coton, qui semble bien vide pendant que son occupante s’installe à proximité de son cabaret. Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette dernière n’a pas déserté son petit foyer. En réalité, elle y revient régulièrement et sa musique continue d’y résonner, notamment car elle est désormais accompagnée d’une petite voix fluette venue depuis peu lui tenir compagnie.

Elle dessine, agenouillée devant une table basse. Un peu de vert par-ci, un peu de bleu par-là, ses craies de cires roulent et glissent, sans doute faudra-t-il bientôt lui en racheter, car leur mine est déjà bien usée ! Le piccolo suit ses tracés, une note aiguë pour les courbes élancées, un son plus grave pour les traits rectilignes. Elle lève finalement la tête, et dévoile son visage d’une jeunesse tout juste fleurie. Ses cheveux attachés en couettes, la petite sœur de Mimi a bien grandi ! Mais que fait-elle ici ?

Dans ses cheveux, le ruban rouge n’a plus sa place. Il a probablement été retiré à force de lui serrer la tête. Lassée comme sa sœur l’a été, la cadette a décidé de rejoindre son aînée afin de combler le vide d’une distance trop difficile à supporter.

Pour son travail, Mimi est malheureusement contrainte de s’éloigner régulièrement, mais l’abondance de ses affaires éparpillées dans le salon montre que ses absences ne sont jamais très longues. Le petit piccolo s’est d’ailleurs rapidement accoutumé à ce nouveau tempo, il chantonne joyeusement, conscient que contrairement à ses parents, la danseuse n’échangera jamais sa voix pour une quelconque sonnerie asynchrone.

Le dessin est terminé, l’adolescente se lève de son coussin, puis l’admire et demande l’avis à son ours en peluche, allongé sur le canapé. La petite bête se retourne, signe de son approbation, mais maintenant le piccolo doit tout ranger, sinon gare aux réprimandes ! L’instrument s’affaire donc avec vitalité, il chantonne, enchaîne les notes sans jamais fléchir. Sa mélodie gambade dans le séjour, elle saute sur les coussins, pousse les tiroirs, encourage les crayons à retourner dans leur boîte. En un rien de temps, la maison est nettoyée !

Seul reste un carton que Mimi n’a pas rangé. Les plus observateurs savent qu’il était déjà là, lors du grand ménage, recouvert de moutons. Désormais, il est bien visible, distraitement relégué dans un coin du salon.

La petite sœur hésite à l’ouvrir. Il n’est pas à elle, mais pourquoi demeure-t-il toujours ici ?Quelques notes enjouées signent la décision prise, et la boîte se trouve déjà posée sur la table basse. Des petits doigts curieux parcourent le long de sa surface, ils longent les arêtes, tapent sur les flancs. L’objet n’est ni lourd ni léger, il est soigneusement scellé, mais une petite lame de couteau saura le crocheter ! Une fois fait, les pans s’ouvrent sans délais, l’adolescente trépigne, se tourne vers son ours qui continue de rouler sur le côté, puis plonge ses mains dans le mystérieux paquet.

Le chant du piccolo s’interrompt, tandis que du carton s’échappe une robe aux innombrables reflets. La petite sœur la reconnaît, elle se souvient de ce qu’il s’est passé. L’instant d’admiration rompu, elle ne peut s’empêcher de tirer complètement le vêtement à elle pour admirer sa beauté sans pareille. Elle la tourne, l’approche de la lumière, s’autorise quelques notes familière, mais alors qu’elle se retourne, une porte claque, et Mimi entre dans la pièce.

Les deux sœurs s’échangent un regard. Une nouvelle mélodie accompagne l’air frais de l’extérieur, le piccolo ne sait plus où se mettre.

Il fredonne des s’excuses, mais l’aînée n’est pas en colère. Son air étourdi chasse le malaise, justifie la présence de la robe par un oubli sincère de sa propriétaire. Celle-ci s’en approche justement et la récupère des mains de sa petite sœur. Elle la regarde, tourne doucement avec. La tenue lui va à ravir, et la cadette ne peut s’empêcher de le lui dire. Mais la grande sœur entend déjà derrière la multitude de reflets les échos assourdissants de cette terrible année. Au fil de ses souvenirs, sa délicate mélodie grésille. Le spectre de la cacophonie frappe ses tempes, les ombres tournoyantes des candidates défilent sur les murs du salon. Le grondement enfle, les applaudissements reviennent, la musique brûle.

Puis tout s’arrête, Mimi remet la robe dans les mains de sa sœur et s’en va ranger ses affaires. Elle dépose son sac, sort de sa poche ses clés et une petite carte qu’elle n’a pas eu cœur à jeter. Derrière elle, Tutu et Bigoudi gambadent joyeusement dans la maisonnée, réclament l’attention de l’ours en peluche toujours allongé. Le piccolo les regarde faire, mais ses notes clairsemées laissent deviner un air pensif.

Il se concentre alors, tend son oreille vers le cœur de la robe. Perdu au milieu des éclats de miroirs chante encore un air de flûte à peine audible. Son souffle est alimenté de rêves déçus, d’une amertume enfouie, mais aussi d’un espoir secret.

La petite sœur se redresse et se tourne alors vers son aîné. Elle lui tend la robe, déterminée. La flûte s’éveille, chasse les instruments qui l’accompagnent. Ses quelques notes flottent dans les airs.

Je ne peux pas, ce n’est pas mon univers…

Le piccolo de lui répondre.

Alors change-le en montrant à tout le monde ce que tu sais faire.

Le corps de la danseuse frémit. Son cœur le secoue d’une toute nouvelle énergie. Le silence tombe, offre le choix d’une dernière hésitation.

Puis Mimi saisit la robe, la main tremblante d’excitation.

Clôture
À quoi donc est-ce que vous vous attendiez ?

Il n'y a rien à clôturer, le spectacle ne fait que commencer ! ~☆
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Super TerraMaître du jeu

Super Terra


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Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time! Empty
MessageSujet: Re: Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time!   Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time! EmptyMer 17 Nov 2021 - 19:40
Que dire devant tel poète ?
Merci ?

J'ai hâte de croiser Mimi en RP et de voir cette belle fleur croître parmi nous !







Fiche validée !







Félicitations, votre fiche a été validée !





Avant de rp, n’oubliez pas d’aller préparer votre journal de bord !



Vous pourrez ensuite partir à la recherche d’un partenaire de rp ou demander une capture.



Si vous ne voulez pas rp tout de suite, pourquoi ne pas renseigner les relations de votre personnage, ou bien lui créer un pokématos ?



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MessageSujet: Re: Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time!   Mimi Dellacchio - It's shoubi doo time! Empty
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