Ah la niche ! [Taiki] - FINI

Invitation en tant qu'intervenant - Université de Céladopole - Conférence sur la pyrologie

Le bout de parchemin qu'il tenait en ses mains commençait à prendre une teinte légèrement pâle, moite à cause de l'excès de transpiration qui l'assaillait. Et la cause n'était en rien la chaleur ambiante ou un soleil puissant, au contraire, des nuages menaçaient un ciel grisâtre qui ferait pâlir de jalousie la région de Galar. La météo n'avait rien à voir avec sa transpiration. Ô que non. Taiki arpentait les rues de Céladopole avec une boule au ventre qui se refusait à le laisser tranquille. Dans son arène, c'était lui le Roi, le chef, et il affichait une assurance exemplaire. Sûr de sa stratégie, confiant en sa résistance physique et surtout assuré d'une victoire, ou au pire, d'un excellent match grâce au sérieux de son équipe d'arène, il lui était facile d'afficher une mine triomphante. Or, ce jour-là, c'était plutôt la mine de la déconfiture écrasée par un morceau de pain nommé "Timidité" qui était tombé sur son mauvais côté... L'idée d'avoir été sollicité pour intervenir lors d'une conférence universitaire sur le feu flattait certes son égo, cependant cela le terrifiait. Même lors de son école militaire, en tant que chef de groupe, quand il était question de présenter des thèmes à ses soldats, il peinait à surmonter sa crainte d'un public, même infime. Et là il allait devoir s'exprimer devant une quarantaine d'étudiants dans une immense salle où l'écho mettrait bien en avant ses bégaiements ou expression faussée par la gêne. Bref, un sacré challenge pour le colosse flamboyant à la timidité bien cachée.

D'autant plus qu'il n'était jamais allé à l'université de Céladopole et ne cessait de zieuter son Pokématos pour être sûr d'avoir emprunté le bon chemin, quand bien même il était une heure plus tôt que celle indiquée par convocation, et que selon son GPS, il n'était qu'à cinq minutes à pied de l'entrée du campus.

Et à mesure que les minutes estimant sa destination rétrécissaient, son rythme cardiaque augmentait. Vite, il allait lui falloir une pause, et peut-être, possiblement, changer de t-shirt pour être un minimum présentable. Oui, il avait pensé à tout et disposait même d'un sac à dos dans lequel se trouvaient quelques notes pour son intervention, une bouteille d'eau, des snacks et des habits de rechange. Au-cas-où, et il avait clairement bien fait.
Toutefois peu désireux d'être arrêté pour exhibitionnisme, Taiki cherchait un endroit discret afin de se changer rapidement son haut. Les yeux du rouquin ne repérèrent évidemment pas les toilettes publiques qui étaient à 300 mètres à sa gauche, mais ciblèrent un magnifique saule pleureur qui pouvait dissimuler son épais torse.
Quelle bonne idée !

Accélérant son pas, le champion de feu observa rapidement les alentours et constata que pour l'instant le chemin était désert de monde, et qu'il s'agissait d'un moment opportun pour utiliser le t-shirt numéro 2 sur les 5 pris.
Aussi, le trentenaire déposa son sac à dos au pieds de l'arbre, puis se camoufla derrière l'arbre qui devait sans doute être plus ancien que l'université au vu de son bois sentant le vécu, puis se changea.

Ce qu'il ne remarqua pas, c'était qu'il n'était pas aussi seul qu'il aurait aimé l'être...

Avant même qu'un certain malaise s'abattit sur lui, Taiki entendit un son de voix qu'il peinait à attribuer. Se retournant vivement, les joues rougies par la potentialité d'avoir été découvert par un autre intervenant de l'université, ou pire, un é-t-u-d-i-a-n-t, le champion d'arène crut bien sentir son coeur bondir de sa poitrine lorsqu'il affronta d'émeraudes pupilles. Les sonorités à la fois douces et viriles qui s'échappaient des cordes vocales de son interlocuteur n'étaient pas d'origine humaine, et, passé la surprise, cela le chamboula quelque peu. Tellement qu'il resta figé dans son mouvement d'enfilage de t-shirt et paraissait pendant une fraction de seconde tenir d'avantage de l'échappé du Pokécentre psychiatrique le plus proche que d'une pointe en pyrologie.

Pourtant, phénomène aussi rare fût-il, ce n'était pas du jamais vu pour le trentenaire, qu'un pokémon maîtrisât le langage humain.
Se rafistolant de manière convenable, plissant le tissu de son t-shirt pour le rendre quelque peu plus présentable, Taiki s'avança vers le Lougaroc qui lui faisait face. Son visage affichait toujours une certaine surprise mais davantage dominée par un réel intérêt.

- Quel est votre nom ?

Il fallait encore être d'une génération ancienne ou affilié à la Team Rocket pour considérer que les pokémons étaient dénués d'intelligence et de sensibilité, aussi Taiki prit-il à coeur de faire preuve de la même politesse que si son trouble-fait avait été bipède. Une expérience avec un Leveinard en soin infirmier l'avait fait comprendre que lorsqu'on vexait des humains, ces derniers giflaient. Or, les pokémons mordaient. Et mordre cela faisait bien plus mal qu'une joue rougie.

Les mains légèrement en avant, comme pour souligner sa non-hostilité, le rouquin continuait d'avancer vers la niche alors qu'il jaugeait la magnifique créature lui faisant face, mille et une observation fusant dans son esprit.
Puis...
Une lumière s'alluma. Et la politesse s'éclipsa.

"POKÉPHILE ? MOI ? MAIS NON DE NON VOUS IMAGINEZ DIRE DES CHOSES PAREILLES, DANS CE CAMPUS ! TRAITEZ-MOI DE ZOUAVE, MAIS MOI, POKEPHILE, MAIS BIEN SÛR ! QUELLE HONTE D'INSINUER TELLE CHOSE !"

De jeunes étudiantes passant par le chemin officiel stoppèrent leur marche un instant et observèrent la scène, des mains devant leur bouche, apparemment hésitantes de la situation qui se déroulait à quelques mètres devant elles ! Les mots qui résonnèrent en écho furent Moi, poképhile, mais bien sûr et leurs regards se posèrent lourdement sur le Lougaroc qu'elles connaissaient bien, dubitatives si ce dernier nécessitait leur intervention ou non. Tout ça pendant que Taiki commençait à avoir une veine temporale qui apparaissait de plus en plus à mesure que son indignation se poursuivait.
Forcément, l'université ne devait être que très moyennement au courant de sa susceptibilité. Comme le Lougaroc présent, qui devait bien s'en faire une idée, désormais.

Si la pression régnant dans le campus avait représenté un ballon, nous aurions pu avoir l'image d'un dégonflement lent, bruyant, mais soulageant. Ce fut le rire de Nick qui initia cette baisse de pression, telle une fine aiguille pénétrant le plastique de l'objet volant, alors qu'il communiquait avec le dénommé Déclic avec un telle aisance. Ce ne fut qu'à ce moment que Taiki prit enfin la peine d'observer réellement la niche sur laquelle le pokémon canin était posé, et arrivait enfin à la conclusion qu'il devait être un grand habitué du lieu. Et pas qu'un habitué, quelqu'un d'aimé, au vu de la sophistication dont faisait preuve son habitat. De une, elle était grande, de la place, il devait en avoir, et surtout, elle paraissait emménagée, avec la fenêtre que Taiki aperçut et même l'intérieur, qu'il devinait rapidement, devait garantir tout le confort nécessaire.

Le rouquin observa le pokémon au pelage homologue baisser les oreilles alors que les étudiantes l'éduquaient sur les mots à utiliser, ou non. A ce moment, le champion ne put s'empêcher de réprimer un sourire. Un sourire attendri. Son stress issu de son intervention, décuplé par le malentendu qui aurait en effet pu le faire figurer dans le pokéjournal de 20 heures, commençait à diminuer, même si le mal était déjà fait. Son t-shirt neuf se voyait déjà investi de deux auréoles au niveau des aisselles, et il risquait de devoir à nouveau se changer. Ca attendrait plus tard, car Taiki avait comme une impression de ne pas en être à sa dernière suée...

Mais là la minute était à l'attendrissement. Kelly, ou Sophie, fit une étreinte à Déclic qui remuait la queue de contentement. Après quoi, les étudiantes firent leur aurevoir. Une violente tape, qui le chatouilla à peine, fut son salut de Nick, qui rejoignait sa ronde. Taiki lui fit un signe d'adieu timide, les joues légèrement rosées. Encore heureux qu'ils n'en furent pas venus aux mains ! Ou au combat pokémon, bien que cela lui aurait fait un joli divertissement, et un bonne décompresse avant la séance de pyrologie.

Regardant les silhouettes disparaître dans le monstre de béton que représentait l'université, Taiki entendit la voix de Déclic, qui lui mentionnait ne toujours pas comprendre pourquoi il n'était pas parti se changer dans les WC. Gêné, Taiki se gratta la nuque.

A vrai dire, j'étais tellement stressé que je ne les avais pas vues. Désolé de vous avoir squatté votre... jardin ?

Un petit moment d'absence vint, seulement perturbé par des rires lointains d'étudiants qui profitaient de leur dernière minute de pause. Puis Taiki porta son regard sur Déclic, la gêne était passée.

- On dirait que vous avez trouvé votre endroit ! Votre niche est sacrément classe, et en plus les étudiants ont l'air de vous adorer. Vous êtes aussi un gardien de l'université ? Ou un professeur ?

Bien sûr, Taiki n'était pas dupe, la reconnaissance d'un pokémon dans le milieu du professorat restait encore du domaine de la chimère, mais vu que Déclic était doué de paroles, il se demandait si ce dernier donnait des cours aux étudiants. Ca le fascinait. Il était tellement anecdotique de rencontrer un pokémon capable de paroles qu'il serait bête de déjà partir. De plus, son rendez-vous ne débutait que d'ici une trentaine de minutes, Taiki avait encore de la marge d'en savoir plus.

Être un Lougaroc c'est posséder un sens supplémentaire par rapport aux humains : l'odorat. Ce qu'ils oublient souvent c'est que je n'ai pas le même point de vu qu'eux : je ne suis pas humain. J'ai souvent du mal à comprendre par exemple pourquoi ils se mettent autant de produits pour cacher leur odeur naturelle. Certes c'est très agréable de plonger la truffe dans les cheveux d'une fille qui sens les fruits. Mais les canidés utilisent beaucoup les odeurs pour communiquer. Ainsi je remarquais les auréoles sous les aisselles de Taiki non grâce à mes yeux mais grâce à ma truffe.

Il était stressé, doublement stressé. Mais c'était aussi un mâle dans la flore de l'âge, en pleine forme physique. Il sentait le carbone, légèrement le souffre et une pointe d'océan aussi. Je jugeais son odeur intéressante. En plus il était champion d'arène : l'affronter était donc indubitablement synonyme d'une bonne bagarre ! Finalement les filles nous laissèrent : elles s'installèrent sur un banc pas loin pour nous avoir à l'oeil.

Derrière le saule n'était pas un endroit que j'utilisais mais l'emplacement de la niche donnait l'impression qu'il s'agissait d'un petit coin privatif effectivement. Je n'en avais simplement pas besoin : j'avais de nombreuses cachettes au sein du parc du campus si je voulais être à l'abri des regards et à l'air libre, dont une que j'aimais particulièrement au bord d'un cours d'eau. Nous étions tout les deux désolés, nous étions donc quitte. Un partout, balle au centre.

Qui étais-je finalement aujourd'hui ? Pas grand chose finalement. Je n'étais pas un gardien... ni un professeur, je n'étais même plus flic. Chien de compagnie ? Et de qui ? Jamais l'idée d'être un jour professeur ne m'avait traverser l'esprit pourtant je connaissais certains cours par cœur, j'ai même corrigé un conférencier il n'y a pas si longtemps. Je du reconnaître que cet homme venait de taper fort, pile là ou ça fait mal si bien que durant dis longues secondes je ne répondis pas, me contentant de le regarder.

« Je ne suis qu'un pokémon ayant perdu son dresseur qui a la chance d'avoir trouvé une situation confortable. »

C'était l'entière vérité, ni plus ni mois. Je n'avais pas besoin de me battre pour survivre, juste de profiter de la vie. Que demander de plus ?...

« Je suis heureux ici, j'ai tout ce qu'il me faut. Un abri, à manger, à boire, des amis. Je n'ai pas à me battre pour trouver à manger, je n'ai pas à affronter la mauvaise météo ni à échapper aux humains qui souhaiteraient me capturer : celui essayera devra non seulement m'affronter mais en plus subir les foudres de la moitié du campus. »

Je sautais du toit de ma niche au sol.

« Bon aller ! Suivez moi, je vous guide jusqu'aux toilettes. Vous avez besoin de vous changer et, ne le prenez pas mal, de vous laver. »

C'est d'un pas sur que je m'engageais dans le bâtiment et me dirigeais dans ce qui pourrait facilement ressembler à un labyrinthe pour un nouveau venu. Beaucoup, pas tous, me saluait en me croisant. Élève, personnels et professeurs notamment. Notre destination était une vaste pièce carrelé et confortable, d'ordinaire réservé au personnel. Il y avait trois cabines de toilettes, trois de douches, trois lavabos. Je restais soigneusement à l'entrée.

« Voilà, faites comme chez vous ! Je... reste à l'entrée hein. Ne le prenez pas mal c'est... à cause de l'eau. Vous comprenez ? »

Je le voyais venir comme la truffe au milieu de la figure : j'allais me faire éclabousser à un moment ou un autre.

La question posée avec une totale innocence offrit un climat soudainement nostalgique à la conversation. Un lourd silence s'imposa entre Déclic et Taiki, quelques rares feuilles du saule remuant sous l'effet d'une brise furtive, alors que les iris émeraude du pokémon canin semblèrent se remémorer une triste réalité. Ce n'était nullement l'intention de Taiki de mettre les pieds dans le plat, aussi ce dernier se sentit quelque peu stupide lorsque le Lougaroc lui répondit qu'il était simplement un pokémon sans maître avec une situation confortable dont il profitait pleinement. L'évocation de Declic d'avoir "perdu son dresseur" fit inconsciemment prendre une mine plus grave au champion, qui ne connaissait que trop bien l'attachement possible entre un pokémon et son humain. Le trentenaire avait connu des gens qui souffraient de la perte de leur meilleur ami mais jamais il n'avait pu approcher le côte inverse; un pokémon dans cette situation. Le déboussolement devait être total. D'autant plus des êtres réputés comme les Lougaroc, capables d'un grand attachement avec un sens de loyauté assez unique.

Le bruit furtif de pas légers qui atterrissaient avec douceur dans le gazon annonçant que l'espèce canine venait de quitter le toit de sa niche sortit Taiki de ses pensées qui, comme il en fut invité, suivit Déclic. Un rapide reniflement sous ses aisselles confirmèrent aussitôt les dires du Lougaroc qui lui démontrait désormais où se trouvaient enfin les dénommées toilettes. Mais également douches. Et celles-ci se trouvaient à l'intérieur du bâtiment, qui était des plus impressionnants. De rapides regards à gauche et à droite confirmèrent à Taiki l'amour qu'éprouvaient les résidents de l'université pour le pokémon roux. Ils passèrent devant le hall, où étaient affichés le planning annuel ainsi qu'un plan avec les salles de classe, se trouvaient quelques photos entre Nick, Déclic, et divers étudiants, dont Taiki reconnut les dénommées Sophie et Kelly.

Un bref sourire parcourut le visage fermé de Taiki. La pensée que les futures générations pensantes de la région de Kanto paraissent être de bonnes personnes, car oui, pour Taiki quiconque pouvant aimer un Pokémon devait être une bonne personne, était une réconfortante pensée, qui faisait du bien par ces temps troublés.

« Voilà, faites comme chez vous ! Je... reste à l'entrée hein. Ne le prenez pas mal c'est... à cause de l'eau. Vous comprenez ? »


Le Lougaroc resta à l'entrée, décidé à ne pas pénétrer dans ce lieu purement humain.

- Quand même, je ne ferais pas preuve d'autant d'immaturité...., soupira presque dans un rire le cadet Yakimasu.

Posant son sac à dos, où dieu merci il lui restait encore au moins 3 t-shirt propres, Taiki remarqua qu'il lui restait également des snacks qu'il n'était pas prêt de manger. Le stress montant, le coup de chaud issu du malentendu de toute à l'heure avaient eu raison de son appétit.
Aussi, il prit un des sandwichs qu'il s'étaient préparés, et le montra à Déclic.

- J'avais pensé manger avant la conférence, mais j'ai l'estomac trop retourné. En attendant que je me douche, si tu veux en manger, je le pose là. Sers-toi seulement.

Quand est-ce que Taiki avait passé au tutoiement ? Etait-ce l'histoire du Lougaroc, ou le fait que ce dernier s'était montré malicieux ? A vrai dire le rouquin n'y réfléchit nullement, posant le sandwich en hauteur, vers un des lavabos, à la merci de Déclic s'il le désirait ou non, alors que Taiki remisa ses affaires dans l'une des cabines qu'il verrouilla, et laissa couler l'eau un instant, assez pour qu'elle devienne chaude.

Tendre un piège à Déclic ? Non ce n'était nullement son intention. Il avait juste besoin d'une douche éclair. Il oublia juste qu'il était d'une maladresse exemplaire...

Il n'y avait nul autre meilleure sensation que celle de l'eau chaude coulant sur un corps tendu. Le seul moyen que le champion de feu ait jamais trouvé pour se détendre soit après de dures séances d'entraînement, ou de longs matchs, était de laisser vaquer son esprit alors que toute sa firbre musculaire se décontractait sous la chaleur des gouttes qui l'assaillaient. Forcément, toute bonne chose avait ses propres limites avant de devenir mauvaise. Dans ses jeunes années, le champion avait tendance à abuser de l'eau chaude, ce qui avait sacrément abîmé sa peau. De plus, depuis qu'il eut obtenu cette vilaine balafre de Mufasa sur l'ensemble de sa tête, et d'autres cicatrices sur son corps, il se devait de se veiller à la température de la douche. Aussi, le plaisir ne dura qu'un court instant, et immédiatement le trentenaire passa à l'eau que beaucoup qualifierait de froide. Elle était simplement en-dessous de "tempérée" et cela suffisait pour faire le plus grand bien à la peau de Taiki et d'éviter des plaques rouges qui le démangeraient s'il poursuivait sa trop chaude douche.
Les yeux fermés, les cheveux mouillés, Taiki ne se rendait pas vraiment compte de comment il manoeuvrait le manche, aussi, il fut totalement surpris quand il entendit un vil couinement. Etait-ce quelqu'un qui malmenait Déclic ? Coupant l'eau, et sortant vivement, en omettant que le petit linge qu'il avait pris se trouvait dans son sac à dos, qui lui, se trouvait vers le lavabo où il avait laissé le sandwich pour le pokémon, les yeux de Taiki affichèrent la plus grande des surprises quand....

-C'est lui là ! »

A nouveau, un air accusateur le confronta. Le roux aurait pu faire face, clamer son innocence, ne pas se laisser à nouveau faussement accusé de choses qui le dégoutaient !

Sauf que là, il était à poil.

Donc le niveau d'intimidation de l'homme baissa salement, à mesure que du rouge pigmentait ses joues. Figé, bloqué par trois personnes le fixant aussi vilainement que s'il venait de commettre le pire des méfaits, Taiki maudit intérieurement Déclic qui, la truffe dans des boobies, ne s'inquiétait nullement de son sort.

- C'est vous qui avait fait aussi tristement couiné cette créature magistralement magnifique et unique !??

S'exclama le garçon qui, au moins, n'était cette fois pas armé d'un bâton tactique. D'ailleurs, Taiki dissimulait le sien de ses mains, les jambes serrées, n'ayant le voeu que de disparaître.
L'une des filles, celle qui n'essayait pas d'étouffer Déclic avec sa poitrine, se disssimulait le visage, tout en s'adressant à lui.

- C'est pas gentil de tendre un piège dans les douches à un pokémon qui déteste l'eau ! Même les maternelles savent faire preuve de plus de gentillesse.

Abasourdi, et quelque peu persuadé que peu importe les mots qu'il arriverait à prononcer, cela ne ferait que d'empirer sa situation, Taiki se dirigea tranquillement vers son sac à dos où il prit le linge qu'il eut tantôt fait d'enrouler autour de sa taille. Au même instant, un halo rouge illumina les douches, aveuglant brièvement les quatre humains présents et le pokémon roux, qui, de toute manière, ne vit pas grand chose puisqu'il était trop occupé dans un lieu confortable.

Ghost apparut, avec une mine renfrognée, l'os qu'il tenait en sa main brûlant d'un feu que Taiki avait rarement vu aussi vif.
L'ossatueur d'Alola se dirigea alors d'un pas déterminé vers Déclic, le fixant aussi intensément que s'il eût représenté la pire des menaces ayant jamais foulé la terre.

Taiki aurait voulu le rappeler dans sa pokéball, mais trop intrigué par ce comportement inédit, il le laissa faire. Allait-il engager un combat ? Au vu de sa démarche, on pourrait facilement le croire, mais sous quel motif ? Avait-il entendu leurs échanges depuis sa pokéball ? Voulait-il défendre l'honneur de son maître ? Toutes ces questions faisaient presque oublier au champion, et aux étudiants présents, qu'il était à moitié à poil.

Désormais devant la jeune fille qui tenait Déclic, qui le lâcha, reculant d'un pas tant elle fût intimidée par le pokémon à l'allure dangereuse, Ghost plissa les yeux, confrontant ceux émeraudes de Déclic.

Puis, il leva la main qui n'était pas occupée par son os. Là, Taiki poussa un "Non" autoritaire, de crainte que son pokémon le plus cher eût la lubie d'agresser Déclic.

Mais il n'en fut rien.

Une étreinte chaleureuse se resserra sur Déclic alors que Ghost versait quelques larmes. Un câlin, gratuit, opportun fut l'attaque qu'il utilisa, alors que son os, tenu suffisamment à distance de Déclic pour ne pas le blesser, réchauffait ses poils mouillés. Si Ghost avait eu le don de parole, il aurait dit "Pardonne mon humain, parfois c'est un goujat idiot et maladroit. Mais... je te jure qu'il est gentil au fond...". Heureusement que ça, Taiki ne put l'entendre.

La prétention humaine s'était souvent fourvoyée sur un nombre incalculables de faits. Soi-disant d'une intelligence supérieure, les bipèdes humanoïdes avaient considéré pendant des décennies les pokémons dépourvus de toute once d'empathie, ou de capacité à se mettre à la place d'autrui, cela faisant travailler une partie du cerveau qui apparemment n'existaient pas pour eux. Aujourd'hui, dans les douches, Ghost remettait un pied au nez à tous les arrières-penseurs qui continuaient malheureusement d'étayer leurs fausses théories à travers le monde. La scène émut autant bien les étudiants que Taiki, qui demeura immobile, observateur. Son ossatueur avait grandi dans un milieu fermé, scientifique. Arraché très tôt à sa mère, puis offert comme une vulgaire babiole à son paternel, chercheur en génétique chromatique lorsqu'il étudia à Alola, comme prix pour l'une de ses découvertes, Ghost n'avait pas eu l'environnement enfantin le plus sain. Toutefois, il s'était rattrapé, car il avait trouvé en la famille Yakimasu un vrai foyer, auquel il avait dévoué sa loyauté. Lorsque l'os vibrant de Ghost s'activa pour enlever toute l'humidité présente sur le poils de Déclic, le trentenaire eut soudainement un flash-back. De lui, recroquevillé dans son lit, tout jeune, après une énième dispute sur le fait qu'il n'aurait jamais de pokémon tant qu'il habiterait chez ses parents. Pleurant, maudissant ses géniteurs, Ghost avait fait exactement la même chose. Il s'était glissé sous sa couette, et avait tenté de réchauffer le corps du garçonnet, à défaut de pouvoir réchauffer son coeur.
Ce vif souvenir suscita une réelle émotion que Taiki dissimula aussitôt qu'elle fût arrivée en enfilant énergiquement son pantalon et un t-shirt (c'était le moment).

Quand il fut pleinement vêtu, les étudiants lui faisaient gentiment la morale.
Forcément, il était à mille lieux de se douter qu'une race canidé eût en horreur l'élément aquatique, mais il s'excusa de sa maladresse par un signe de tête à Déclic, qui tournait déjà les pattes, à la recherche d'un autre casse-croûte. Ghost voulut le suivre, mais un petit raclement de gorge de son maître l'en dissuada, aussi, l'ossatueur se contenta de faire un petit signe de main d'aurevoir à Déclic, qui le remerciait alors qu'il disparaissait dans un halo rouge.

- Merci Déclic. Un bon appétit, et j'espère que tu n'auras pas trop à corriger ma conférence.

Glissa-t-il davantage sous la forme d'humour que par reproche, alors que la silhouette du Lougaroc disparut totalement en direction des cuisines.

Enfouissant toutes ses affaires dans son sac, et pressant le pas jusqu'à la salle indiquée par sa nouvelle rencontre, Taiki arriva rapidement dans l'immense salle.
Dès qu'il entra, une sorte de frisson glacial parcourut l'ensemble de son corps. Une majorité d'étudiants étaient déjà installés, la plupart pipeletait entre eux, discutant des professeurs, des examens à venir, de leur plan du week-end et autres conversations dignes d'universitaires soit idéalistes, soit blasés. Quelques regards gênés se croisèrent, dont ceux des précédents jeunes qui faisaient le lien entre le champion de Cramois'Iles et le weirdo qui stalkait Déclic... Petit coup de malaise, offrant des joues écarlates au trentenaire.
Taiki avait l'impression de tout entendre et voir au ralenti, tant son coup de pression était violent. Il détestait devoir prendre la parole en public mais savait le faire avec aisance grâce à ses entraînements militaires. Mais rien ne le préparait à une si grande salle avec autant de jeunes à instruire. Ca l'épatait, et sortait clairement de ses compétences. Donner des ordres ? Facile. Orienter une mission ? Du pipot. Rendre un sujet scientifique intéressant pour cette armée de jeunes adultes ? Mission impossible.

Mais un simple regard en direction du fond de la salle, qui le confronta à de brillants yeux émeraudes, eut un effet réconfortant. Comme si, malgré tous les quiproquos, il y avait quelqu'un dans la salle digne d'intérêt et de confiance. Aussi, Taiki s'installa tranquillement et, à mesure que l'heure approchait, les murmures se tarir.

Puis, prenant une grande inspiration, Taiki se lança.