Un nouveau départ! [annonce spéciale, Professeur Chêne]

     Le Bourg Palette était une ville admirable. Le village portait bien son nom ; c’était un vaste bourg jonché de petites maisons de campagne et dans lequel on pouvait trouver, malgré une urbanisation très lente et peu visible, un laboratoire très réputé. Au sud, près du laboratoire du célèbre professeur Chêne, on pouvait observer un parc naturel, très riche en pokémon de tout genre et qui avait accueillit de nombreux spécimens aussi uniques qu'improbables de pokémons. Non loin de ces deux attractions touristiques se situait la demeure de Sacha Ketchum, jeune dresseur de talent dont Proserpin, ainsi que beaucoup d'autres personnes, avait beaucoup entendu parlé.

     Le village était paisible, faiblement agité par ses habitants de plus en plus nombreux. Devant les maisons, quelques monsieur mîmes balayaient énergiquement l’allée principale ; spectacle étrange puisqu’il n’y eut visiblement que d’infimes poussières à pourchasser. La population du village avait toujours eut tendance à se développer autour de ces pokémons, et cette caractéristique était clairement compréhensible pour le jeune génie scientifique ; ce développement était simplement dû à une réserve de ces pokémons, non loin du village.

     Proserpin aimait beaucoup se retrouver ici, de temps à autres, autour d’un bon café, et dialoguer avec son confrère scientifique. Il s’agissait de Calvin, l’apprenti de l’illustre professeur Chêne. Le jeune garçon n’avait que douze ans mais constituait déjà pour Proserpin un futur espoir scientifique. Il était assez petit, les cheveux châtains, le teint légèrement métissé, les yeux bleu-gris profonds. Les deux amis aimaient se donner rendez-vous au petit café « l’Express » où, installés près de la grande place du centre, ils pouvaient faire part l’un l’autre de leurs différentes remarques et surprenantes découvertes. Longues étaient les heures passées ensemble à polémiquer sur les sujets les plus controversés de l’empire scientifique.

     Mais cette fois ci, il n’était pas là, seul son magnifique pokémon bouboule lunaire était présent. Et bien que la conversation ne fut pas très jouteuse, les paroles entre eux deux furent d’une extrême douceur et tendresse, suivit de très près par de longs enlacements amicaux. De là où ils se tenaient, les deux pouvaient ressentir le faible vent du nord caresser leurs joues, doublée de la vue magnifique d’un ciel légèrement opaque dans lequel régnaient de longs cumulus duveteux et à travers lesquels on pouvait entrevoir les rayons brumeux du soleil.

    Sept heure, le jeune génie n'était pas en retard et avait au contraire encore un peu de temps matinal à dépenser avant de se rendre au laboratoire. Il préféra néanmoins s’y diriger, faute d’idée meilleure, suivi de Rondoudou, chantonnant un nouvel air entraînant et hectique, incitant à une marche plus rythmée que lente. Tout deux se dirigeaient peu à peu vers le laboratoire sans que Proserpin ne puisse s’empêcher, le long de cette fraiche marche, de se figurer pourquoi le professeur avait voulu le voir précisément.

     Après de longues minutes de marche à rêvasser les yeux ouverts, Proserpin et Rondoudou arrivèrent à bon port. La voix de Rondoudou l'avait incité à une profonde réflexion concernant cette faculté presque lunaire de chanter une berceuse. Et bien que beaucoup voit ici une attaque spécialisée, Proserpin n'y voyait qu'une habilité naturelle, innée et irréversible, telle que la faculté de juger ou encore de parler. Aussi ne pouvait-on pas faire oublier cette attaque à un pokémon par son caractère immanent et omniprésent. Après tout, si nous étions à leurs place, trouverions donc nous juste que notre chant, cette capacité à moduler notre voix, soit considérée comme une attaque?

     Mais le jeune homme fut ramené à la réalité des choses, remarquant la porte du laboratoire se dessiner devant ses yeux. Une fois entrés à l’intérieur, ils furent surpris de voir que du nouveau matériel avait été livré ; le laboratoire comportait à présent une version améliorée de régénérateur pokémon ainsi que deux machines de reconstitution fossiles, importées d’une ville du pays. Absorbé dans le branchement de câbles prolifères, le professeur, au grand regret de Rondoudou, ne semblait pas remarquer la présence des deux arrivants. Mais le pokémon lunaire esclaffa sa vexation et le professeur fut contraint d’abandonner son activité au profit des deux invités, soulageant Rondoudou de son importance.

     Le professeur détenait son allure habituellement jeune, en dépit de ses nombreux cheveux gris et de ses quelques rides marquées. Il semblait respirer la confiance, bien que ses gros sourcils et sa carrure palpébrale lui donnaient un air étrange, et forçant la suspicion. Le pokémon, rassuré de ne pas être aussi anodin que prétendument, ronronna affectueusement d'un air bouboule en retour d’une brève caresse que le professeur avait adressé à la houppette rose bonbon du pokémon.

     Le chercheur pokémon se releva brièvement et regardait à présent Proserpin, un sourire au coin glissant légèrement de ses extrémités labiales. Le moment était à présent venu, le professeur allait enfin lui donner les réelles motivations de sa venue ici. Intérieurement, les questions fusaient calmement et sans chaos, dans une liberté contrôlée, si bien qu'il n'y eu bientôt plus qu'une question en tête ; quelle était cette mission nécessitant ses propres aptitudes ? Il était en hâte cérébrale, impatiemment pressé de le savoir et d'entamer vigoureusement ses recherches ; il voulait changer d’air, voir des choses nouvelles, vivre la vie autrement, comme si quelque chose lui manquait encore, et que cette même chose pouvait lui être proposée, peut-être, d’ici peu.

     Oui, il y avait eu un changement imperceptible à l’intérieur de son être alors que ses yeux se posaient sur l’ensemble des pokéballs mises en évidence au fond à droite. Et si… si cette chose qui lui manquait reposait ici...et si, s'il devenait un dresseur, lui aussi ? Après tout, il avait passé l’âge de la puberté et pourrait très bien se débrouiller seul. L'idée, telle une voix interne, distante et étouffée par les conventions sociales, résonnait avec une conviction de plus en plus forte. La force, indicible et irréversible, s'était emparée de lui, telle la braise s'empare de la paille.

     Cette envie, indescriptible, d’une vie subtilement différente immiscait son esprit tandis qu’un désir d’émulation inébranlable grandissait en son corps. Il se voyait soudain, combattant aux côtés de Rondoudou avec fierté et défiance. Bravant les dangers de vestiges inexplorés, partageant des combats en double, des repas avec des compagnons de voyage et tant de choses encore… Mais il y avait aussi, dans sa vision, une pokéball accrochée à sa ceinture. La question grandit alors en lui ; serait-il possible que le professeur ait eu en tête de lui offrir un pokémon ? S’agirait-il, par la plus grande des coïncidences, d’une étude évolutive sur un pokémon particulier ?

     Le professeur semblait lire en Proserpin comme dans un livre ouvert, alors que Rondoudou, lui, s’interrogeait sur l’état statique de son dresseur si aimé. La scène était intense, le jeune dresseur crispa ses poings d’une force démente et communicative qui se traduisit chez le pokémon par un air déterminé et incroyablement sérieux. Son avenir était là, juste devant lui et il attendait avec fermeté que le professeur, qui se tenait devant lui, écrive à son tour les quelques lignes d'un incipit grandiose ; celui de l'entrée d'un nouveau challenger dans ce vaste monde de mystères inexploités.

"Bonjour, je voudrais un bulbizar", ces mots sortirent de sa bouche sans qu'il ne pu savoir pourquoi.