Un vent glacial frappait le visage de Michael en cette froide matinée. Le soleil venait à peine de se lever que le jeune homme avait quitté la bordure du chemin où il avait dormi avec ses deux compagnons pendant la nuit, pour enfourcher son imposante moto à une roue et continuer son chemin vers une nouvelle destination. La veille, il était arrivé à Rosalia mais il avait été incapable de trouver de l’essence pour sa moto, essence qu’il avait presque complètement utilisé. Hors de lui, il avait alors continué sa route sans même se reposer et s’était assoupi sur la route vers Doublonville, la plus grande cité de la région à ce qu’il paraissait, et sans doute la seule capable de lui fournir du carburant.
L’air empli de rosée lui frappait durement le visage, et seuls ses imposantes lunettes aux verres teintés protégeaient ses paupières d’être complètements gelées. Même son imposant manteau de cuir bleu n’empêchait pas le froid de s’insinuer jusqu’à son âme. Michael frissonna de nouveau. Comment pouvait-on vivre dans un endroit pareil ? Le froid semblait insupportable pour lui qui avait toujours vécu dans un désert, bien au Nord d’ici, où chaque jour il devait subir des vents brulants et épuisants. Même si il s’était toujours dit qu’il y faisait beaucoup trop chaud, aujourd’hui, il se rendait compte que le froid était bien plus à plaindre.
Il remarqua un mouvement sur sa droite. C’était Mentali dans la nacelle de la moto qui s’était ébroué pour retirer les gouttes de rosée sur son pelage, suivi de prêt par Noctali qui fit de même avant de grimper sur le dos de son dresseur, posant ses pattes avant sur son épaule pour pouvoir voir la route devant eux, ses oreilles flottant dans le vent.
- Désolé, les gars. Le temps est pas au beau fixe, ce matin… cria Michael pour couvrir les vrombissements du moteur.
Noctali lui répondit par un grondement avant de se caler contre son dos pour ne plus avoir le vent dans les oreilles. Son dresseur eut un sourire avant de se concentrer de nouveau sur la route. Heureusement pour eux, le chemin n’était pas difficile, même si la moto de Michael pouvait aisément rouler sur n’importe quelle surface, aussi endommagée soit elle, mais ça n’était jamais très agréable de subir les bosses et creux d’un chemin à la vitesse où le dresseur conduisait.
Bientôt, il aperçu des immeubles et des bâtiments imposant à l’horizon, qui dépassait la masse végétale des arbres. Michael soupira. Enfin, une ville qui avait l’air suffisamment grande et habitée pour subvenir à ses besoins. Peut être même trouvera-t-il de quoi faire quelques combats plus intéressant que les pauvres idiots qu’il avait croisé sur sa route. Mais c’est alors qu’il perçu un cahotage dans son moteur suivit d’un bruit étrange qui faisait mauvais augure. Il regarda la jauge d’essence de son véhicule et vit qu’elle était bien basse. Le dresseur pesta alors que sa moto s’arrêtait petit à petit avant de s’immobiliser totalement. Il sauta de côté et releva ses lunettes sur sa tête comme il en avait l’habitude.
- Bon, et bien j’ai tout gagné ! D’abord la Team Rocket et maintenant ça ! Foutu bécane ! grogna-t-il en donnant un bon coup de pied dans le moteur orné de nombreux tubes.
Ce dernier laissa s’échapper une sorte d’étrange soupir alors qu’une fumée noire s’échappait des pots d’échappements, avant d’être réduit au silence le plus profond. Le jeune homme poussa un grognement frustré et tapa du pied en faisant les cents pas, parlant dans sa barbe, ses deux Pokémons le suivant des yeux d’un air à la fois inquiet et blasé. Noctali sauta en bas du véhicule et mordit le bas du manteau de son dresseur pour l’inciter à arrêter de tourner en rond, alors que Mentali descendait doucement et s’asseyait sur le chemin, observant la scène comme un homme devant une télévision. Bientôt, Michael se calma, cessant de traîner Noctali derrière lui et passa une main dans ses cheveux humides.
- Bon, on a pas vraiment le choix. On va devoir se rendre jusqu’à Doublonville à pied.
Il perçut Mentali qui grondait légèrement et leva les yeux au ciel.
- Bien sûr, môsieur Mentali peut monter sur mon humble dos s’il s’en sait gré. Dit il avec une voix exagérément snobe et en s’inclinant respectueusement devant son Pokémon paresseux.
Ce dernier, un peu vexé, fit mine de se lécher la patte, les yeux clos et la tête haute. Michael s’approcha, récupéra son sac dans le coffre de sa moto et attrapa Mentali sous les aisselles pour le placer sur son épaule. Noctali quant à lui était bien trop content de pouvoir se dégourdir les pattes et marchait en tête, slalomant joyeusement en faisant mine d’attaquer un ennemi invisible, alors que la petite équipée se dirigeait vers les imposantes silhouettes architecturales au lointain.
- Ha, je vous jure. Je ferai mieux de vous laisser dans vos Pokéball des fois… Aïe ! Ne me mords pas l’oreille, Ment’ !!!
Malgré l’endurance naturelle du dresseur, le chemin était encore long et l’équipée commença vite à fatiguer. Noctali commença à se laisser un peu distancer par son dresseur, qui avait pourtant du mal à porter le poids de Mentali en plus de son propre poids. Et surtout, il crevait littéralement de froid, son corps étant peu habitué à ces températures basses. Michael éternua soudain, manquant de faire tomber Mentali et faisant sursauter Noctali qui se mit à courir autour de son dresseur avec énervement.
- Désolé, les gars. Ce foutu temps m’a enrhumé, je crois… mais on doit plus être très loin. Regardez, le panneau indique qu’on y est bientôt ! … Qu’est-ce que c’est que ça, le Parc Naturel.. ?
Michael s’approcha du panneau avec un air plus que perplexe en lisant les indications. Visiblement, on était obligé de passer par ce parc pour atteindre la ville. La belle affaire ! Pourquoi ne construisait-il pas d’autoroute pour simplifier la vie de tout le monde ?! Grognant de plus belle, le dresseur puisa dans ses dernières forces pour continuer sa route, et bientôt ils arrivèrent devant un imposant mais magnifique portail de fer forgé, orné de luxueuses arabesques. Une fois qu’ils eurent passé l’entrée où un homme s’évertua à les convaincre de participer au concours de capture sans succès, ils découvrirent un immense parc rempli de fleurs et plantes de tous les genres et de toutes les espèces, des Pokémon insectes volant ou rampant par ci par là. Mentali et Noctali étaient bouche bée devant une telle végétation luxuriante et le dernier se rua comme un forcené dans les allées pour chasser un Papilusion.
- Noct’ ! Reviens ici, ne t’éloigne pas ! Tsss, celui là… Mentali, va le surveiller, j’ai pas envie qu’il fasse encore un scandale…
Alors que Mentali daignait descendre de son perchoir pour faire quelques pas à la poursuite de son ami, Michael perçut la sonnerie de son P★AD et l’attrapa à sa ceinture pour le décrocher. C’était encore un énième message d’Emilie qui souhaitait ardument de ses nouvelles. Mais comme à chaque fois, le jeune homme soupira avec une grimace gênée et referma son appareil sans répondre. Il connaissait la jeune fille, et savait que si elle savait où il était actuellement, elle s’inquièterait beaucoup trop et chercherait à le rejoindre. Hors elle n’était pas dresseuse et ne savait pas se défendre, autant dire une mission suicide. Sans parler de son extraordinaire naïveté qui faisait qu’elle s’imaginait toujours que tout le monde était bon et gentil. Aussi, il préférait ne pas lui répondre, même s’il détestait devoir lui raccrocher au nez à chaque fois…
Le dresseur étranger fit quelques pas, observant les plantes avec une certaine curiosité. Une telle végétation était impossible à voir chez lui, alors il était forcément particulièrement impressionné par tant de couleurs et de senteurs. En relevant la tête, il remarqua qu’il n’était pas seul et que le parc attirait visiblement beaucoup de promeneurs, de joggeurs ou de familles avec leurs Pokémon. Mais ça n’était encore que des enfants, des vieillards ou des incompétents, aucune personne digne d’un véritable match. Tant pis, ça ne serait pas pour cette fois, encore.
Michael continua sa route au milieu du chemin de sable fin pour rejoindre son duo fétiche déjà bien au-delà de son champ de vision. Si seulement il savait que Noctali était encore en train de faire des siennes…